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PP Initials

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PP Initials

« Raymond Radiguet – Marylin Monroe – Brigitte Bardot. Quelqu'un m'a fait remarquer une fois que les gens qui avaient des initiales identiques avaient souvent un destin tragique » (Raphaël Metlz – Meltzland – Editions du Panama – p. 58).

Si l’on ramenait une telle citation, qui évoque le destin tragique de ceux qui ont des initiales identiques, aux effectifs professionnels des équipes de Ligue 1, un décompte minutieux offrirait une liste de dix neuf noms. Il s’agit de : Stéphane Samson (Stade Malherbe de Caen), Rodolphe Roche, Stéphane Sessognon (Le Mans MUC 72), Kim Källström (Olympique Lyonnais), Cédric Carrasso, Taye Taiwo, Gaël Givet, Fabrice Fiorèse, Matt Moussilou (Olympique de Marseille), Malaury Martin (AS Monaco), Lionel Leitizi, Lilian Laslandes (OGC Nice), Pedro Pauleta (Paris Saint Germain), Jérémie Janot (ASSE), Eugène Ekobo (Racing Club de Strasbourg), Rudy Riou (Toulouse Football Club ), David Ducourtioux, Khaled Kharroubi, Steve Savidan (Valenciennes).

Un patronyme fait actuellement débat, celui de Jean-Sébastien Jaurès, dont le prénom composé l’épargne potentiellement de l’accident. Le cas de Pedro Pauleta étant également l’objet d’une controverse, car on ne sait pas s’il faut comprendre que l’attaquant du PSG se nomme Pedro-Miguel (prénom composé) Pauleta, ou Pedro, Miguel (Miguel étant entendu ici comme le second prénom) Pauleta. La deuxième hypothèse aura notre préférence, en ce qu’elle offre au joueur portugais l’opportunité de rejoindre le top 19 des initiales identiques entre le nom et le prénom, lorsque l’on est un professionnel qui gagne sa vie dans un club de Ligue 1. Et être dans un top quelque chose, c’est un évènement assez rare pour Pauleta en ce moment.

Jusqu’ici rien de très passionnant me direz-vous. Une habille citation de la rentrée littéraire de septembre 2007 d’un auteur publié par les éditions du Panama, éditeur du petit livre vert, combinée avec une lecture compulsive des effectifs des équipes professionnelles de Ligue 1, placera au mieux celui qui l’utilise au niveau d’une Elizabeth Teissier qui refile une vieille prédiction pour s’offrir une semaine au soleil, dans un pays justement baigné par le soleil. Mais point de semaine au soleil pour ce qui nous concerne !

C’est donc le sens du tragique qui animera ces brèves remarques. Il est en effet assez aisé de remarquer que l’actualité a rappelé à notre souvenir que la carrière de Cédric Carrasso avait pris ces derniers jours un tournant délicat, puisque le gardien de l’OM s’est rompu le tendon d’Achille lors d’un entraînement. La saison du joueur est d’ailleurs terminée. Et puisque nous parcourons les rangs de l’OM, on passera sous un silence gêné le cas de Fabrice Fiorèse (fin de contrat le 30 juin 2008, source www.om.net), lui aussi condamné à errer dans des couloirs qui ressemblent plus aux ASSEDIC qu’aux chemins d’accès aux pelouses.

Le nom de Rudy Riou (nous quittons l’Olympique de Marseille) ne sera pas évoqué, quoique pour d’autres raisons qui resteront obscures. En effet, ceux qui suivent le foot corpo, tel que narré par Arnaud Dutant dans les chroniques de l’ASSE 2000, se souviendront d’une chanson créée par le collectif dudit club, intitulée « la balle masquée » (l’ASS 2000 – l’album – morceau n°3, indisponible dans le commerce), et dans laquelle le nom du gardien du Toulouse Football Club était évoqué.

Toujours pour ce qui concerne les gardiens, le cas de Lionel Leitizi fera l’objet de brèves remarques. Même s’il n’est aujourd’hui que remplaçant dans son équipe niçoise, on a tous en mémoire la carrière du sympathique gardien nissart (ça fait couleur locale), ému aux larmes un soir de finale de coupe de France, et traité avec mépris par son ancien employeur (le PSG) qui le lâcha après des années de bons et loyaux services, mais dont la fin de carrière met en lumière une étrange interrogation quant à ses déplacements sur la ligne du but. Lionel Leitizi a-t-il été opéré des deux hanches ? L’interrogation est moins anodine qu’il n’y paraît.

Oui, osons le dire haut et fort, les initiales identiques entre un nom et un prénom sont le signe d’un destin fatal. Souvenons-nous encore du sympathique Kim Källström de Lyon qui crachait en direction d’un arbitre le 11 août 2007. Drôle de Haka pour le K.K suédois (une rime qui rame).

Bien évidemment, le cas le plus poignant reste celui de Pedro Pauleta dont on pressent que la saison 2007-2008 risque d’être agitée. Si l’on ne peut que louer le professionnalisme tranquille de l’ancien Bordelais et actuel joueur parisien, il n’en demeure pas moins que la fin de carrière du numéro neuf du PSG risque de vaciller, comme tanguent les bateaux à l’approche des Açores, île natale du joueur (métaphore très pauvre).

Revenons-en au cas Pedro Pauleta. Les 768 signes (titre non compris) qui précédent n’étaient qu’un prétexte pour évoquer l’homme qui symbolise l’attaquant en fin de carrière. Qui d’autre que Pedro Pauleta pouvait jouer le rôle de l’ambassadeur (une sorte de Monsieur Ferrero) de ceux dont les initiales identiques marquent une existence tragique ? Qui ?

On entend déjà des supporters parisiens, forcément atrabilaires, qui croient déceler une basse attaque contre le capitaine du club de la capitale. Qu’ils rejoignent pour une fois les supporters marseillais dans leur ire vengeresse. Un indice a été ostensiblement glissé en prélude à ce texte. Une citation censée nous offrir l’occasion de lier football et rentrée littéraire (ce qui est assez beau même si certains disent cela prétentieux). Une liaison donc entre le football et la littérature, mais non par le biais d’un ouvrage, seulement grâce à un auteur ou ce qu’il défend. En l’occurrence, nous évoquions Raphaël Meltz (le prénom n’a rien à voir avec le compagnon du masque de cire, mannequin, chanteuse pour gogos, terminator en retraite des podiums de la mode, selon Justine Lévy que les seules questions du masque et du terminator obsèdent. Souvenez-vous quatre voyelles et trois consonnes).

Raphaël Meltz, s’il nous lisait, s’offusquerait. « Le football ce n’est pas l’objet de mon dernier ouvrage, même si la revue que j’animais (R de Réel) avait consacré un article au football dans son numéro dédie à la lettre F (au travers d’un article rédigé par Laetitia Bianchi) » (phrase inventée et attribuée à Raphaël Meltz pour les besoins du récit). Pourtant, la citation de Raphaël Meltz, détournée, réappropriée, n’a d’autre but que de réveiller le lecteur, le secouer, afin qu’il redevienne critique face à ce qu’il lit. Le supporter parisien quitte ici le stade atrabilaire pour celui de l’apaisement. Les supporters marseillais précédemment évoqués, bien que n’ayant rien à voir avec le sujet, sortent du conflit.

Et si la malédiction qui marque (marquerait) la fin de carrière de Pauleta n’était qu’invention, orchestration, délire, mis en œuvre par des nervis (des hommes de main) de l’actionnaire du PSG, dans le but explicite d’alléger la masse salariale ? Des janissaires n’auraient-ils pas été spécialement missionnés pour décrier les talents de Pauleta, le forcer à quitter le club par la calomnie ?

Les statisticiens, tendance Canal Plus, nous parleraient chiffres, rétorqueraient grâce à des bilans, fourbiraient leurs armes par le biais de comptes de résultats (tout ici est mis au pluriel car cela fait plus riche). Pauleta marque moins. Pauleta court moins vite. Pauleta n’est plus aussi efficace. Pauleta serait moins ceci. Pauleta serait moins cela. Paradoxalement, il n’a jamais gagné autant d’argent. Les pauvres fous. Comme si le football se résumait à vivre sa vie comme Philippe Doucet (journaliste sur la chaîne Canal Plus qui nous abreuve d’études, forcément diverses et variées, lors de chaque journée de championnat) entre deux courbes, trois ralentis, quatre chiffres essentiels…

Les « êtres sont multiples, les apparences un jeu » nous glisserait dans l’oreille la journaliste Claire Simon (un prénom à jouer dans un film d’Eric Rohmer pour peu que votre genou s’y prête, un nom à croquer la cuisine française dans un supplément hebdomadaire du mercredi d’un quotidien du matin, ou sur une chaîne du câble se voulant capitale et première). Les « êtres sont multiples, les apparences un jeu » répéterait Claire Simon nous croyant sourds à propos du travail de Raphaël Meltz, tel qu’elle le conçoit à la lecture de Metlzland (à moins qu’il ne s’agisse de l’ouvrage « Mallarmé et moi » ).

Pauleta le maudit (n’hésitons pas à convoquer Fritz Lang) est aussi cet être multiple, protéiforme pour lequel les apparences ne sont qu’un jeu. Point de malédiction mais déclin d’un homme qui tombe ? Car c’est bien cela que l’on nous décrit. Quelle maxime caractérise la conception que se font les employeurs à propos de leurs salariés dans le monde du football ? « On a pressé le citron, on peut jeter la peau » (les plus malins auront reconnu l’emprunt à François Béranger, qui chantait en 1979 l’inanité du colonialisme).

Le citron des Açores aurait été pressé. Ce qu’on supposait être une malédiction tardive (due au sort tragique de ceux qui portent des initiales identiques) ne serait qu’une fin de carrière qui se mêlerait à une gestion productiviste des ressources humaines. Tout ça pour ça.

Donc. Si l’on se résume. Les êtres sont multiples, les apparences un jeu (encore merci à Claire S. qu’il convient de louer à la hauteur de son anonymat, très grand, mais que l’on apprécie, Claire S. pas son anonymat, bien que cette personne nous soit absolument inconnue). Il n’y aurait point de malédiction propre aux initiales identiques, ce qui est en un sens rassurant mais aussi décevant d’un point de vue dramatique. On réduit un homme à un instantané, à la manière de ces photographies de naissance qui fleurissent sur internet. Sauf qu’ici la photo n’est pas vraiment belle, la pose n’est pas artistique, c’est une fin et non un début. D’un caractère multiple, d’apparences qui ne sont qu’un jeu, on passe à une rubrique nécrologique, à un bulletin de santé castriste (tout va très bien officiellement, mais en réalité on sait que cela va très mal), à de l’acharnement.

Reste alors le point de savoir pourquoi dix-neuf joueurs de Ligue 1 ont été jetés à la figure des lecteurs, alors que ce petit jeu des initiales identiques vous offre à peine de la notoriété au Balto (nom générique préféré à estaminet du coin, bistrot, rade, café etc…). Pasticher maladroitement Raphaël Meltz. Peut-être, et même très sûrement. Crier que la rentrée littéraire nous emmerde. Hurler qu’il faut aller au stade (d’accord, ce n’est pas la révélation du siècle). Dire que le tragique chez Stéphane Samson, Rodolphe Roche, Stéphane Sessognon, Matt Moussilou, Malaury Martin, Eugène Ekobo, David Ducourtioux, Khaled Kharroubi, pour ne citer qu’eux, il n’est pas vraiment prégnant, mais surtout qu’on ne leur souhaite aucun sort funeste, car c’est ainsi que se termine la tragédie. Un peu de tout cela. Aurions-nous triché ? Oui. « Tout le monde triche. Personne ne triche » (Raphaël Metlz – Meltzland – Editions du Panama – note introductive).

Jean-François BORNE

Retrouvez l’inénarrable Jef Borne sur son blog

Pardon d’avoir douté, Rayan Cherki

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