OM : Deschamps, ou le retour du fils prodige ?
On ne présente plus Deschamps, multi champion de France, d'Italie, d'Europe et du monde, en clubs comme en sélection. Il vient de signer pour deux ans et prendra ses fonctions le 1er juin 2009. A priori une bonne nouvelle pour le peuple phocéen qui va remiser les habits de deuil enfilés après le départ d'Eric Gerets. Une bonne nouvelle aussi pour les joueurs ? Re-boostés au bon moment pour finir le championnat en beauté ?
Bon, allez ! Une boutade pour commencer : Jean-Michel Larqué est le dernier cador de l’écurie RMC à ne pas entraîner. Luis Fernandez est à Reims, Courbis à Montpellier… et Didier Deschamps est à l’OM. OK : pas drôle… En plus, Jean-Mimi ne veut plus coacher. Sinon, sérieusement, l’arrivée de la Dèche à Marseille n’est pas vraiment une surprise vu qu’il figurait sur la short-list des successeurs potentiels de Gerets avec Metsu, Antonetti et Paulo Le Guen (c’te blague !). Il suffisait de voir la bouille réjouie de vieux matou matois de Papa Diouf dimanche soir au Canal Football club pour deviner que le boss de l’OM avait pêché du lourd. En plus, Didier Deschamps, (excellent) chroniqueur habituel de l’émission de l’autre Mathou, était absent. Ben, voyons !…
Or, donc, voilà : c’est fait. Avant d’aller plus loin, une autre boutade. DD est très lié à Puma alors que l’OM, c’est Adidas à tous les repas et à tous les étages ! OK : pas drôle. On savait que DD était calé dans les starting-blocks depuis juin 2008 pour entraîner à nouveau. Il avait donc résilié son contrat avec RMC pour être pleinement dispo.
Deux pistes émergeaient : les Bleus, à la ramasse après un Euro 2008 catastrophique, et le PSG, tout de suite ou à court terme. Domenech sera finalement sauvé par la FFF, apeurée du buzz des Anciens de France 98 qui avaient ourdi une Opération Deschamps. Côté PSG, une approche avancée actionnée par Villeneuve avait aussi laissé croire à une arrivée de DD au club. Finalement, Paulo, un temps menacé (début octobre), conservera son poste… avant d’être viré aujourd’hui.
Deschamps avait la bougeotte, désireux de replonger au taf. Surtout que son pote Lolo Blanc réussit une saison de feu avec Bordeaux. Pas de jalousie, juste de l’émulation entre les deux fils préférés d’Aimé Jacquet. On est bien contents : Puel, Deschamps et Blanc, ça re-crédibilise notre pauvre L1 qu’on aime quand même.
Sérieusement : le retour de DD en championnat de France, c’est la dernière chance de sauver notre football hexagonal. Faut plus rêver : les grands entraîneurs ne viendront plus en France et les clubs français, quels qu’ils soient, qui joueront la C1 la saison prochaine n’ont a priori aucune chance d’y briller. Après Puel et Blanc, bâtisseurs actuels des futurs OL et Bordeaux, voici donc Deschamps chargé de bonifier un OM revitalisé par Gerets. Les attentes sont énormes : la France du Foot attendait le retour du grand Deschamps, en réserve de la République, et dernier coach à avoir qualifié un club d’ici, Monaco, en finale de la Champions League (2004). Voilà, c’est fait…
Sauf que l’époque a changé. En cinq ans, le fossé entre grands clubs continentaux (GB, Espagne, Italie) et clubs de second rang s’est considérablement creusé. Cette année un Porto magnifique n’a pas fait le poids face à Manchester sur deux manches… La Dèche ne disposera pas vraiment des mêmes moyens financiers qu’à l’époque du Monaco encore un peu prodigue de Jean-Louis Campora. L’effet de surprise d’une ASM méprisée en C1 par Chelsea et le Real ne jouera plus en 2009-2010 avec l’OM, pas plus qu’un prêt providentiel d’un joueur de la trempe de Morientès. Aujourd’hui, un Real averti ajouterait une clause de non-participation sur le contrat de Van Nistelrooy, si ce dernier était éventuellement prêté à l’OM et qu’il devrait affronter son ancien club madrilène. Ceci dit, vu que l’OM va disputer la C1 et encaisser un pactole de l’UEFA, en plus sûrement d’une « dotation exceptionnelle » de Robert Louis-Dreyfus, Deschamps pourrait avoir les moyens d’un recrutement moins comique que celui de l’OL, ces deux dernières saisons.
Reste que le pari est ultra risqué. Deschamps à Marseille, c’est comme Jésus à Nazareth : des miracles et des titres tout de suite, sinon c’est la croix sur le Golgotha… On sait l’homme au caractère trempé très jaloux de ses prérogatives, peu partageux de ses pouvoirs. A Monaco, il avait fini par avoir la peau de quelques crocos plutôt coriaces : Simone, Panucci, Gallardo et même l’indéboulonnable Campora. Voilà Louis-Dreyfus, Diouf et Anigo prévenus ! DD avait déjà failli arriver à l’OM en 2006, pour succéder à Jean Fernandez, parti à Auxerre. Mais faute d’accord, notamment sur l’étendue de ses pouvoirs plus que sur sa rémunération, il avait finalement opté pour la Juventus Turin.
Mauvaise pioche, comme prévu, vu qu’il a été viré au bout d’un an, comme il aurait dû s’en douter. Mais l’épisode malheureux à la Juve qu’il a fait remonter en Serie A au bout d’un an (saison 2006-07) a achevé d’éradiquer en lui les derniers restes de naïveté.
Traduction : à 40 ans, il n’est pas l’homme aux compromis tordus. Auquel cas, comme avec l’ASM progressivement décimée l’année d’après la finale de C1 et après les tracasseries sans fin des dirigeants, il préférera démissionner comme il l’a fait à Monaco en septembre 2005.
Deschamps a signé pour deux ans. Mais si les circonstances propres au « contexte marseillais » se révélaient trop défavorables, l’opportunité de rebondir à la tête des Bleus ne serait pas impossible : le bail de Ray Strange en Équipe de France prend fin au Mondial sud-africain (2010)…
Saluons quand même la sagesse de Deschamps et de Blanc, tous les deux désireux à terme de coacher l’Équipe de France. Au lieu d’attendre dans leur coin qu’un complot pas très net les désigne, ils ont eu le courage de descendre d’abord dans l’arène d’une L1 pas évidente pour montrer ce qu’ils sont capables de faire. Chapeau. Et time will tell…
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