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Mais qui es-tu, le buisson de Clairefontaine ?

Par Mathieu Rollinger, à Jardiland
Mais qui es-tu, le buisson de Clairefontaine ?

Cannes a son tapis rouge, l’Élysée son perron et ses graviers, Clairefontaine a son arbuste. Pour les joueurs qui répondent aux convocations de Didier Deschamps, se frayer un chemin au milieu de ces denses feuillages verts est un passage obligé. Portrait d’une belle plante.

Enraciné dans le château de la Fédération française de football, présent à chaque rassemblement d’une sélection dont il a vu passer chaque membre depuis 1983, le buisson justifie jour après jour son statut de vieille branche à Clairefontaine. Au milieu des quinze hectares d’espaces verts du Centre national du football, on ne voit que lui. Pourtant, qui peut s’enorgueillir de s’être déjà intéressé à son histoire ? Pour les botanistes et les férus de jardinage, il s’agit d’une variété plutôt commune sous nos latitudes puisqu’il s’agit d’un laurier-palme, ou prunus caucasica de sa désignation binomale. À ne pas confondre avec son cousin méditerranéen, le laurus nobilis, comestible lui. « C’est un arbuste persistant souvent utilisé en haie car résistant à des températures de -10°C à -15°C » , assure Céline, conseillère chez Truffaut.

Cherchez le buisson

Si dans la nature, la plante est considérée comme « invasive » , dans un parc, elle ne requiert pas plus d’attention que celle portée à la barbe d’Olivier Giroud. « Il pousse de 40 à 50 centimètres par an et ça fait vite du gros bois, avertit la pépiniériste. Mais il suffit de le tailler une fois au printemps et une fois à l’automne. » Ses grosses feuilles allongées au bout rond restent donc vertes et luisantes pendant de longues années.

« Le laurier peut tenir très longtemps, tant qu’on le taille correctement et qu’il est dans de bonnes conditions de température, d’eau et d’ensoleillement » . Chose à laquelle s’affairent les cinq jardiniers de l’entreprise Sparfel, le prestataire du CNF concernant l’entretien de ses espaces verts. Et malgré une exposition nord, le bougre est toujours là, les pieds bien plantés dans le sol du domaine de Montjoye, à l’origine un pavillon de chasse construit par la famille Groscot de la Chapelle autour de 1830.

« Passer devant ce buisson, ça veut dire que tu as réussi »

Un rapide coup d’œil sur l’arbre généalogique dudit laurier permet de remarquer sa présence au début du XXe siècle, une fois les extensions du bâtiment terminées par Lord Henry Standish. Suffisamment ancien pour supposer que celui qui a planté les premières boutures de la légende locale repose aujourd’hui aussi profond que ses racines. Depuis, le végétal a vu passer les blessés et les gueules cassées de la Grande Guerre ou pu observer le banquier André Lazard partir à la chasse. Mais personne n’a songé ne serait-ce qu’un instant à mettre un coup de tronçonneuse à cet harmonieux bosquet. Pas même la Fédération française de football, propriétaire des lieux depuis 1983. Aujourd’hui, le châtelain se nomme Didier Deschamps, et les joueurs appelés à le rejoindre sous le drapeau tricolore sont amenés à effleurer le vénérable arbuste à chaque rassemblement.

Pour beaucoup, atteindre ce buisson symbolise inconsciemment un aboutissement. « Tu grandis avec cette image-là, confirme avec enthousiasme Habib Bellaïd, ancien pensionnaire de l’INF Clairefontaine. Passer par cet escalier et devant ce buisson, ça veut dire que tu as réussi à aller jusque-là-haut. » Témoin privilégié de ce cérémonial, Dave Winter est photographe pour l’agence Icon Sport. Et d’après lui, cette haie est devenue une star bien malgré elle.

« Si elle apparaît sur la plupart des photos faites le jour du rassemblement, c’est parce que c’est l’emplacement qui nous est réservé, explique le Britannique. Moi, j’arrive souvent le premier et je me place au plus proche du château pour avoir suffisamment de recul au moment où les taxis déposent les joueurs. C’est le meilleur moyen pour avoir des portraits en pied des joueurs, et d’avoir une vue d’ensemble sur des tenues improbables. Ensuite, les joueurs montent par l’escalier et le buisson est forcément devant. » Un protocole qui date d’il y a quatre ou cinq ans seulement, les banques d’images privilégiant auparavant les photos de l’entraînement ou de la conférence de presse.

Les mégots de Fabien Barthez

Si on s’en tient aux déclarations des professionnels de l’image, ce bosquet serait donc un spécialiste du photo-bombing. « En général, ce n’est pas vraiment un inconvénient et cela reste même intéressant esthétiquement, continue Dave Winter. Sauf une fois. J’avais trop mal aux genoux à cause de l’arthrose et j’avais pris un siège pliable pour pouvoir mieux supporter les deux heures d’attente. Et quand Mathieu Valbuena est arrivé, il a disparu dans le buisson qui était plus haut que lui. » Mais la vie autour du buisson ne se résume pas à un défilé de mode, les jeunes pousses du centre de formation comme les internationaux le croisant à chaque sortie. Pourtant, si les murs ont des oreilles, le buisson fait mine d’être dur de la feuille quand il est question de ses secrets les plus inavouables.

« Ce qui se passe à Clairefontaine reste à Clairefontaine, jure Habib Bellaïd. Mais je ne pense pas qu’il se soit passé grand-chose dans ces lauriers, surtout qu’ils sont situés à un endroit où il y a du passage 24 heures sur 24. Après, si on prend Fabien Barthez par exemple, il fumait à la vue de tout le monde. Il n’en avait rien à foutre de planquer ses mégots dans le buisson. » À Clairefontaine, cet arbuste n’est donc pas le meilleur allié pour faire l’école buissonnière. « On n’avait pas besoin d’aller se planquer là-bas pour faire nos conneries, confesse l’ex-international espoir. Pour aller voir des gonzesses, on allait dans les bois. » La preuve irréfutable qu’il existe une classe d’écart entre les bonnes feuilles et celles qui collent.

Prendre le maquis

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