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Luis Figo, vénal et génial

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Luis Figo, vénal et génial

Luis Figo, indéniablement l'un des meilleurs joueurs des années 2000, raccroche définitivement les crampons au plus haut niveau. Retour sur la carrière d'un génie certes vénal, mais diablement doué. Portrait.

Il y a maintenant deux semaines, Luis Figo annonçait sa retraite à la fin d’un match contre Sienne. L’Inter, vainqueur du Scudetto pour la quatrième fois consécutive, sans même avoir à jouer, a donc profité du dernier match à domicile de la saison contre l’Udinese pour rendre hommage au meilleur joueur portugais des trente dernières années.

Pour ses dernières foulées au haut niveau, Figo a régalé par ses débordements, une conduite de balle encore superlative et une vision de jeu toujours aussi clairvoyante. C’est d’ailleurs sur son côté droit qu’est arrivé le premier but des Nerazzurri, œuvre de Muntari. Comme à ses débuts au Sporting Portugal il y a maintenant vingt ans, Figo a fait le taf, froidement, efficacement, sans vraiment se poser de questions. Lors de son remplacement, tous ses partenaires sont venus l’embrasser respectueusement. Même Mourinho a quitté son banc de touche pour venir rendre hommage au mythe. Figo, lui, n’a pas pleuré, tout juste s’est-il ému. Il est comme ça Luis… il a un cœur de pierre.

Élu Ballon d’Or en 2000, Luis Figo a été pendant plus d’une dizaine d’années le phare de la Selecçao lusitanienne, l’idole de Barcelone, le motif de satisfaction du Real, avant de devenir l’un des meilleurs jokers de luxe du monde à l’Inter. C’est simple, ce mec-là a tout gagné hormis avec sa sélection. Pas forcément un hasard. Le Portugais a par ailleurs enchaîné seize saisons à plus de trente matchs, sans jamais connaître de blessure grave, ni de baisse de régime importante. Malgré sa classe, sa régularité et son glamour tout en gel, Figo a pourtant tout foutu en l’air avec son goût prononcé pour l’argent.

Alors qu’il n’est que cadet au Sporting Lisbonne, Figo fait ainsi déjà parler de lui pour avoir signé un contrat avec l’ennemi benfiquiste. Finalement, le Lisboète achèvera sa formation au Sporting avant de resigner deux contrats quelques années plus tard et à quelques semaines d’intervalle avec Parme et la Juventus. Les dirigeants du Sporting arrivent à annuler la vente de leur plus belle pépite, argumentant que les Italiens ont directement négocié avec le joueur sans qu’ils en soient informés. Parme et la Juventus resteront sur leur faim et seront sanctionnés par l’UEFA. Interdit de rejoindre l’Italie pour une durée de deux ans, Figo jure pourtant qu’il attendra la levée de l’embargo pour investir la Botte : « Je jure amour éternel à l’Italie. Je veux jouer dans le Calcio et je suis prêt à attendre pour cela » . Quelques semaines plus tard, Figo rejoindra finalement le Barça pour un million d’euros… A cette époque, Figo est déjà comparé à un mercenaire sans scrupules. Des défauts pas très reluisants qu’il fera pourtant oublier très vite sous le maillot blaugrana…

Intenable sur son côté droit, gavé de feintes et diaboliquement percutant, Figo devient rapidement la star du club, l’idole des Catalans et le capitaine du Barça. Pendant cinq ans, Luis Figo va briller par ses dribbles et son professionnalisme en passant en revue tous les défenseurs de la Liga sans exception. Roberto Carlos lui-même finira par l’avouer honteusement un an avant que le Lusitanien ne rejoigne la Maison Blanche : « Figo est le meilleur joueur du championnat, le meilleur ailier du monde, et le cauchemar de mes nuits » . En 99, Figo une écharpe du Barça sur la tête, fête pourtant le doublé du FCB en insultant le Real Madrid : « Madrid Cabron ! Saluda al campeon ! » . En Catalogne, il est un dieu. Il va pourtant rapidement devenir le plus grand traître de l’histoire du club lorsque Perez lui fait signer un précontrat qui stipule qu’il devra rejoindre les Merengues s’il devient président du Real. Figo est loin de penser que Florentino Perez va accomplir son objectif. La seule chose qui lui importe vraiment se résume en un chiffre : les 36 millions d’euros qu’il risque d’empocher si Florentino ne devient pas président.

Le 24 Juillet 2000, Figo est finalement présenté en grande pompe aux socios merengues et devient du coup le premier Galactico d’une longue série, pour la modique somme de 75 millions d’euros. Le Real Madrid a frappé fort. Le Barça est touché, et aura du mal à s’en remettre pendant des années. Figo, lui, ne s’embarrasse pas de sentiments : « Je voulais rester au Barça, mais les dirigeants n’ont jamais tenu leurs promesses. A Madrid, j’ai trouvé des gens qui savaient réellement apprécier mon travail » .

Figo en a toujours voulu plus. Plus d’argent, plus de titres, plus de reconnaissance aussi. Il n’a pourtant jamais su rendre l’affection que les socios blaugranas lui avaient témoignée durant de longues années. Beaucoup de joueurs catalans sont partis rejoindre l’éternel ennemi mais peu sont ceux qui ont à ce point subi l’ire du Camp Nou. L’image de Figo se bouchant les oreilles pour son retour à Can Barça aura été saisissante, mais beaucoup moins que la tête de cochon rôti et les faux billets verts imprimés à l’effigie du “Pesetero” (celui qui aime la Peseta, ancienne monnaie espagnole). La haine que lui vouent encore les Barcelonais est au moins proportionnelle à l’amour qu’ils portaient au Portugais. Il faut dire que son départ a été plutôt mal digéré. Et c’est un euphémisme : Alfonso, Dutruel, Geovanni, Christanval, Coco, Zenden, Rochemback, Petit ou encore Overmars n’ont jamais su faire oublier l’étoile capricieuse. Jamais le départ d’un joueur ne s’était fait autant ressentir dans l’histoire d’un club. Pourtant, Figo n’a jamais éprouvé le moindre remords.

Sur le terrain, il était aussi comme ça en même temps. Lorsqu’en 2005 il fracture la jambe du joueur de Saragosse César, Figo file doit au vestiaire sans se retourner. César, lui, ne rejouera plus jamais au football et n’hésite pas, dès qu’il le peut, à cracher sur son bourreau : « Figo est peut-être un grand footballeur, mais en tant qu’homme, c’est une vermine. Il ne s’est jamais excusé ; il n’a même pas pris la peine de prendre de mes nouvelles. Il a tout simplement ruiné ma carrière et une partie de ma vie » . Quelques mois après son geste fou, le Portugais abandonnera le Real Madrid pour l’Inter. Non sans lancer une petite pique à Vanderlei Luxemburgo : « Je ne l’aime pas, il ne m’aime pas mais je suis serein : le temps finit toujours par remettre chacun à sa place » .

Luis Figo avait sans doute raison à propos de l’entraîneur brésilien. Le destin a pourtant voulu qu’il raccroche ses crampons la même année que Paolo Maldini. Pour lui rendre hommage, le Milan AC a décidé de retirer à jamais le mythique numéro 3 de la circulation. Paolo, fidèle entre les fidèles, ne sait toujours pas ce qu’il va faire de son futur. En revanche, tout le monde connaît déjà les plans de reconversion de la Figue. On sait déjà que son numéro de maillot ne sera jamais retiré dans les différents clubs dans lesquels il est passé. Luis Figo s’en fout sûrement. Il a désormais d’autres chats à fouetter, notamment dans la construction (des hôtels) et dans ses nombreux bars au Portugal. Avant de devenir définitivement un homme d’affaires, Luis Figo assurera quand même une dernière petite pige juteuse dans un pays exotique, histoire de finir sa carrière avec quelques dollars de plus sur son compte en banque. Il est comme ça, Luis. Il a d’ailleurs toujours été comme ça et c’est bien dommage…

Pardon d’avoir douté, Rayan Cherki

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