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L’incroyable aventure bolivienne de Julien Benhaim

Par Thomas Allain
L’incroyable aventure bolivienne de Julien Benhaim

À 23 ans, Julien Benhaim avait décidé d’offrir une nouvelle trajectoire à sa carrière. Le joueur de Furiani-Agliani (N3), formé au SC Bastia, a pris tout le monde de cours en acceptant il y a quelques mois un défi fou : quitter son île pour rejoindre l’Altiplano bolivien. Sur place, tout ne s’est pas passé comme prévu. Arrivé fin janvier dans un club en crise, le joueur a été contraint de quitter la ville en raison de la pandémie. Finalement, il est rentré ce dimanche en France après avoir passé trois mois en Bolivie, sans jouer, et sans avoir reçu un centime. Malgré les difficultés rencontrées dans le pays andin, le Corse referme cette parenthèse bolivienne avec beaucoup d’affection. Il raconte.

On dit souvent que certains trains ne passent qu’une fois. Allez dire ça à Julien Benhaim. Lorsque l’opportunité de renouer avec le monde du football professionnel s’est présentée, en janvier, le Corse n’a pas hésité longtemps. « J’étais resté en contact avec quelqu’un depuis mon expérience en Andorre, raconte le joueur. Comme je lui avais rendu un grand service en allant jouer là-bas, il m’a toujours dit qu’il me serait redevable. Il a montré des vidéos de moi à San José, c’est comme ça que ça s’est fait. » En quelques jours le milieu de terrain de Furiani Agliani quitte le ventre mou du championnat de National 3 Corse-Méditerranée pour rejoindre la Bolivie et le club de San José, alors en pleine préparation d’une double confrontation en Copa Libertadores. Fou, mais tellement excitant. « Dès que je suis arrivé, je suis allé au stade voir le match de Copa Libertadores face au Club Guaraní. L’ambiance était géniale », se souvient-il.

J’ai dit au président que tant que je n’avais pas l’équivalent des frais que j’avais avancés, je ne sortirais pas du bureau. Il m’a dit qu’il me paierait avec l’argent de la recette du match suivant. On a signé un compromis. Les jours sont passés, je n’avais pas de nouvelles…

En cherchant à donner un second souffle à sa carrière, Benhaim a été servi. Le club de San José est basé dans la ville d’Oruro, célèbre pour son carnaval et perchée sur l’Altiplano, à 3 700 mètres au-dessus du niveau de la mer. S’il reconnaît avoir eu besoin de temps pour s’adapter à l’altitude, le joueur assure s’être bien acclimaté à son nouvel environnement. « Les deux premières semaines ont été dures au niveau du cardio, mais rapidement j’ai pris le rythme, je pouvais m’entraîner comme les autres. » Arrivé le 22 janvier, le Corse pose pour la première fois les pieds sur le continent sud-américain, partagé entre le désir de vivre une nouvelle expérience et l’ambition de percer en Amérique latine. Pas venu pour courir après l’argent, il sait que du temps de jeu et de bonnes prestations pourraient lui permettre de taper dans l’œil d’une plus grosse écurie bolivienne, voire sud-américaine. L’intéressé le reconnaît : son objectif initial était de « tout donner pour pouvoir finir dans un plus gros championnat, que ce soit en Argentine, au Brésil ou au Mexique… » Rien à perdre, ou plutôt tout à gagner, donc.

Un club en crise

Mais sur les hauts plateaux andins, les espoirs du Français se dissipent très vite : San José traverse une grave crise financière. Le champion de Bolivie 2018 avait déjà été sanctionné de six points, puis privé de recrutement à l’été 2019 pour ne pas avoir réglé la totalité des salaires d’anciens joueurs. Julien Benhaim le reconnaît : « Je n’étais pas au courant de la situation… J’en veux un peu aux personnes qui m’ont emmené dans ce club. » Sur place, il prend conscience que son contrat ne sera jamais homologué par les instances internationales. La faute au club, mauvais élève du championnat bolivien, qui ne peut pas recruter tant qu’il n’a pas réglé ses dettes. Malgré tout, il préfère garder un esprit positif. « Quand j’arrivais à l’entraînement, je m’y consacrais à 100 %, souffle-t-il. Je positivais, j’essayais de ne pas penser aux choses négatives. » Sans ressource, San José doit réaliser une bonne recette lors de ses matchs à domicile pour pouvoir payer son effectif. Lorsque le président du club propose au Corse de lui verser dix jours de salaire au lieu des quinze attendus, il refuse. « Je lui ai dit que tant que je n’avais pas l’équivalent des frais que j’avais avancés, je ne sortirais pas du bureau. » Les promesses se succèdent, et le natif de Bastia, déterminé à récupérer son dû, insiste et ne lâche rien. « Il m’a dit qu’il me paierait avec l’argent de la recette du match suivant. On a signé un compromis. Les jours sont passés, je n’avais pas de nouvelles… », regrette le joueur. Désabusé, il prend conscience qu’il n’aura pas son argent et décide de joindre l’UNFP et la FIFA. Les deux instances lui conseillent de rester sur place deux mois, après quoi il pourra engager une procédure pour toucher son année de contrat. Forcé de patienter jusqu’à la fin mars, le joueur se met en tête de profiter un maximum de cette expérience et reçoit le soutien des spectateurs qu’il croise dans les tribunes à chaque match. « On m’appelait « El Francès ». Au stade, il y avait un groupe de fans qui venait me faire la bise, me serrer la main, prendre des photos, c’était très agréable. Les gens étaient très gentils. »

« J’ai dormi quatre jours chez mon chauffeur »

La situation du club bolivien pourrait en effrayer plus d’un. Pour Julien Benhaim, elle a surtout un air de déjà-vu. Pur produit du centre de formation bastiais, le milieu de terrain a vu ses rêves de professionnalisme lui filer entre les pieds à l’issue de la saison 2016-2017, moment où le SC Bastia est relégué administrativement en cinquième division. Après un passage en Andorre, il rebondit en National 1, et ses bonnes performances avec le club de Marignane Gignac lui ouvrent les portes du Maccabi Haïfa, en Israël. Là-bas, tout ne se passe pas comme prévu, déjà. « Les dirigeants m’avaient fait venir, mais l’entraîneur n’était pas d’accord. Je devais m’entraîner seul, au bout de deux semaines j’ai dit stop, je suis rentré », explique le baroudeur.

Après mon passage à Marignane, certaines personnes m’envoyaient en Ligue 2, mais mes agents m’ont lâché. En Bolivie, je pense qu’un an aurait suffi pour me propulser.

Sans contrat à la fin du mois d’août 2019, le milieu de terrain revient en Corse pour signer dans le club familial de Furiani Agliani (National 3), jusqu’à l’arrivée de la proposition bolivienne. « Après mon passage à Marignane, certaines personnes m’envoyaient en Ligue 2, mais mes agents m’ont lâché. En Bolivie, je pense qu’un an aurait suffi pour me propulser. » Dans l’impossibilité d’évoluer sous le maillot de San José, le milieu de terrain ne perd pas son optimisme et s’intègre parfaitement à l’effectif, où l’atmosphère lui rappelle son passage en Andorre. « Dans le vestiaire, ça boit du maté, ça écoute du reggaeton, ça discute beaucoup…. Ça me plaisait, il y avait une bonne ambiance. Après, une fois qu’on arrivait sur le terrain, ça devenait très sérieux. D’ailleurs, j’ai été agréablement surpris par la qualité des joueurs, certains pourraient facilement jouer en Ligue 2 ou National… »

Le milieu de terrain découvre un groupe soudé qui se côtoie beaucoup en dehors du terrain. « On jouait au ping-pong ou on faisait du futsal juste entre nous, sur des terrains de quartier, avec des buts de hand. On changeait les postes, j’allais au but… On rigolait beaucoup », s’amuse-t-il. En parallèle, Julien Benhaim se lie d’amitié avec le chauffeur de taxi mis à sa disposition par le club. Un matin, le Français apprend par le gérant de son hôtel que le club ne paie plus sa chambre. Sans hésiter, le chauffeur lui tend la main et l’invite chez lui. Benhaim est gêné, mais accepte. « J’ai dormi quatre jours chez mon chauffeur de taxi », sourit-il. Sur place, il partage le logement avec une dizaine de membres de la famille du chauffeur. « On jouait au foot ensemble, c’était plus sérieux que les matchs avec les joueurs du club. C’était supporters contre supporters. »

Objectif Sporting

Mi-mars, un premier cas de coronavirus apparaît en Bolivie, à Oruro, forcément. La ville est immédiatement placée en quarantaine, et Julien Benhaim doit se rendre à La Paz, pour y attendre tranquillement un avion le rapatriant en France. « C’est le pays qui a le moins de cas en Amérique du Sud. Ils ont pris des précautions très rapidement, les gens respectent énormément le confinement. C’est très bien géré », juge le milieu de terrain. De retour en France ce dimanche, le joueur, qui a invité ses anciens coéquipiers à venir passer leurs vacances sur l’Île de Beauté, préfère mettre en avant les bons souvenirs plutôt que ses mésaventures. « Il ne faut pas être déçu, il y a toujours du positif. Franchement, je suis très content. J’étais triste de partir parce que je me sentais bien, c’était génial. Si je prends du négatif, je ne vais jamais m’en sortir. » S’il assure que venir en Bolivie peut être une très bonne expérience, Julien Benhaim rêve désormais de stabilité et de prendre une « revanche sur [sa] malchance ». D’ailleurs, il n’hésite pas à clamer son amour pour son club formateur : « Même si ça me semble compliqué, j’aimerais retourner à Bastia. » Prendre de la hauteur sur les plateaux andins pour atteindre le sommet du football corse : et si c’était le bon moyen de faire décoller sa carrière ?

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