Lille-PSG : Paris, la boule au ventre
A égalité de points, Lille et Paris partagent la même ambition, mais leurs dispositions d'esprit sont aux antipodes. Si le LOSC a tout à gagner, le PSG a peur de tout perdre.
A force de vouloir préserver ses chances, tout va-t-il finir par filer entre les doigts du PSG ? Dimanche, une défaite de Paris à Lille et la perspective d’une qualif’ pour la Ligue des Champions s’éloignerait sensiblement. Quant au titre, il paraît déjà inaccessible : d’un point de vue comptable, tout est encore jouable, mais la justesse de l’effectif parisien le rend trop vulnérable à la moindre absence de marque. C’est qu’en osmose avec son temps, Paris vit en économie de crise. Et Paul le Guen, bon gestionnaire à défaut d’être grand entraîneur, se fait un devoir de gérer la pénurie en minimisant les risques.
Comment expliquer autrement ce dernier quart d’heure de Coupe d’Europe, où PLG osa associer en pointe un improbable duo, composé de Jean-Eudes Maurice, zéro match en pro, et Mateja Kezman, pour ses quinze minutes mens(tr)uelles de compétition ? N’était-ce pourtant pas l’heure de marquer ce petit but qui aurait rendu le voyage en Ukraine moins anxiogène ? Pourquoi sortir Guillaume Hoarau ? Un quart d’heure supplémentaire allait-il vraiment lasser ses grandes jambes au point qu’il ne puisse gambader sur la piste, euh …, sur la pelouse, de Villeneuve d’Ascq ? Et Giuly, le faire débrider sa mobylette en deuxième mi-temps allait-il l’exténuer au point de plus pouvoir accélérer dimanche ?
Pour les distraits qui n’auraient pas écouté ses causeries ou ses conférences de presse, le message adressé par Le Guen à ses joueurs était limpide : les gas, la priorité, c’est le championnat ! Ce qui se tient : une qualif’ en Ligue des Champions rapporte davantage qu’une demi-finale de Coupe, elle permet de retenir des joueurs (Sessegnon ?), d’en attirer d’autres, tout ça, tout ça … Sauf que Kiev était sans doute davantage prenable jeudi que Lille le sera dimanche. Les calculs d’épicier ont rarement été le ferment des grandes conquêtes. L’ambition en bandoulière, l’équipe de Rudi Garcia l’a bien compris.
Une équipe qui a battu deux fois Lyon en trois jours et reste sur une série de quatre victoires consécutives en championnat. Une équipe qui s’est remise de son épuisante élimination à Toulouse sans laisser apparaître la moindre marque d’usure, ce, malgré les injustes suspensions pour deux matches d’Obraniak et Cabaye, deux des pièces essentielles de l’infernal pentagone du milieu lillois (avec Mavuba, Balmont et Bastos). Une équipe dont le mental inoxydable rappelle celui des Toulousains, les derniers bourreaux du PSG. Une équipe, enfin, qui ressemble à une version améliorée de l’édifice bâti par Claude Puel, ce maçon.
Le changement est là : désormais, Lille ennuie ses adversaires sans ennuyer la France. Libéré de ses chaînes par Rudi Garcia, ce vieux punk qui ose penser qu’il « est plus intéressant d’essayer de poser des problèmes à l’adversaire que de se contenter de le contenir » , le LOSC est un équipe qui allie fierté ouvrière (on sait se retrousser les manches) et leitmotiv émancipateur (créer plutôt que reproduire), avec Michel Bastos comme joueur symbole de la parfaite symbiose opérée par son coach. Jamais avare d’efforts dans le repli défensif, le Brésilien figure dans le quintet de tête du classement des buteurs et des passeurs. Partout mais jamais nulle part le Michel.
La remarquable évolution des Dogues conduit à se demander si le problème de la Ligue 1 ne serait pas avant tout celui de ses coachs à la frilosité contagieuse ? Avec Garcia comme exception et Puel comme parangon. Si dimanche vers 23 h, Paris se trouve à flanc de falaise, on pourrait poser la question à Paul le Guen …
Par
