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La Tot’ dans les nuages

Par Théo Denmat
La Tot’ dans les nuages

Insensé, impensable, inexplicable. En se qualifiant pour les demi-finales de Ligue des champions pour la première fois, Tottenham n'a pas seulement écrit son histoire. Les londoniens ont également exorcisé les démons de leur passé. Les losers ne sont plus.

« La vérité, l’âpre vérité. » En littérature, l’épigraphe est une phrase en prose ou en vers placée en tête d’un ouvrage ou d’un chapitre, pour en annoncer ou résumer le contenu, ou pour éclairer sur les intentions de l’auteur. Parmi les plus célèbres, donc, ces quelques mots de Danton avant même les toutes premières lignes du Rouge et le Noir de Stendhal. Au moment de refermer le conte de Tottenham, que ce soit le 7 mai ou le 6 juin prochain, il conviendra de relire l’épigraphe inscrite tout en haut du chapitre nommé « C1 » de la saison 2018-2019 des Spurs : « Aux confrontations directes. »

Car pour parvenir à appréhender la qualification insensée des hommes de Mauricio Pochettino, il faut se souvenir quel en fut le point de départ : une qualification sur la dernière journée de poule B, à la faveur d’un nul 1-1 au Camp Nou et d’un faux pas de l’Inter contre le PSV Eindhoven. Tottenham était alors passé en huitièmes à la faveur des confrontations directes contre les italiens, et d’un tout petit but inscrit par Christian Eriksen au Giuseppe-Meazza. Un but. Et aujourd’hui, une demi-finale historique, la première en C1 pour les Spurs depuis 1961. Insensé.

Lose yourself

Il y a quelques jours, un type au sourire béat livrait son analyse sur le retour infernal qui attendait les Londoniens à l’Etihad, privés en plus de leur maître à jouer Harry Kane. « Pourquoi les Spurs ne pourraient-ils pas gagner la Ligue des champions ? Parce qu’ils n’ont pas d’expérience dans cette compétition ou parce qu’ils ne l’ont jamais gagnée auparavant ? » Double constat froid, mais censé, surtout sorti de cette bouche-là. Car quand Ronaldinho pose une question, on l’écoute. Le Brésilien, dans la foulée, plaçait les hommes de son ancien coéquipier parisien Pochettino comme outsiders plus que sérieux à la victoire finale, une phrase qui avait arraché quelques gloussements sur place : Tottenham ne peut pas gagner la C1, pour la simple et bonne raison que Tottenham ne gagne jamais rien. La France a le Stade rennais, l’Angleterre a Tottenham, c’est ainsi. Pour s’en convaincre, il n’y avait qu’à voir le scénario des huitièmes de finale de l’an dernier face à la Juventus, où la Vieille Dame avait courbé l’échine à l’aller (2-2), avant de subir pendant une heure à Wembley et empocher la victoire grâce à Higuaín et Dybala (1-2). Sur quatre périodes, la Juve n’en avait réussi qu’une, et était passée. « Tellement Juventus » , disait-on à l’époque. « Tellement Tottenham » , oubliait-on d’ajouter.

Cette fois, pourtant, il y avait quelque chose de différent dans l’air. Un rêve fou, une utopie. Celle perchée au-dessus du crâne ingénu de Lucas Moura comme de son club, d’enfin savoir quel goût cache une qualification dans le dernier carré de la Ligue des champions. Est-ce acide ? Sucré ? L’avantage, c’est que City n’en n’avait plus qu’une idée édulcorée, en plus de la fâcheuse tendance à chevroter des guiboles quand la pression dépasse les deux bars et demi. Le début de match, en ce sens, donnait raison aux faiseurs de miracles : un doublé de Son pour répondre à l’ouverture du score de Sterling, un rythme fou, et déjà deux buts inscrits à l’extérieur, City devant en coller deux de plus. Puis la machine s’est emballée, encore plus vite, encore plus fort, Wanyama a livré le match de sa vie, Trippier a été plus chien que d’habitude, Dele Alli étonnamment consistant, Lloris rassurant quand il pouvait l’être, décisif quand les frappes adverses lui laissaient une chance, et Tottenham est passé. Miraculeusement. L’intervention divine du vidéo-arbitrage tient de la rédemption, du surnaturel, et a probablement atteint ce soir son acmé émotionnelle depuis le jour de son introduction.

Un club « normal » touché par la grâce

« Mon meilleur moment en tant qu’entraîneur, c’est quand j’ai réussi à sauver l’Espanyol à Almería, glissait Pochettino après la rencontre. Ce soir ça n’atteint pas ce niveau-là, mais presque. » Pep Guardiola peut soutenir que Fernando Llorente a marqué le but de la qualification de la main, il n’en est rien. C’est un pion de la hanche, un des plus moches de sa carrière, et à la fois le plus beau. Ce but-ci se joue d’ailleurs probablement à autant de centimètres que le hors-jeu d’Agüero un peu plus tard, comme un clin d’œil à ces détails qui ont longtemps fait défaut aux Spurs en Europe.

Des types qui, peut-être, retourneront les avis sur leur statut, après que le club a été le premier vainqueur britannique de la Coupe des coupes, en 1963, et le premier vainqueur de la « C3 » , la Coupe de l’UEFA 1972. Un club qui, en février dernier, faisait dire à Zlatan Ibrahimović qu’Harry Kane devait songer à son avenir, en partant dans un plus grand « pour gagner des trophées » . Il avait terminé son intervention en qualifiant Tottenham de club « normal » . Ce qui s’est passé ce soir à Manchester était tout sauf normal. En revanche, voir Moussa Sissoko et Lucas Moura soulever une C1 que n’aura jamais touchée le Z, ça, ce serait un juste retour des choses. « La vérité, l’âpre vérité. »

Par Théo Denmat

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