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« Je dînais au resto avec Puskás et Álbert »

Propos recueillis par Joël Le Pavous
« Je dînais au resto avec Puskás et Álbert<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Géza Mészöly a une belle gueule, des yeux azur et un nom qui claque en Hongrie. Celui de son paternel, Kálmán, pilier du onze magyar dans les sixties et entraîneur ensuite. Plutôt que de tuer le père qu’il a souvent suivi et copié du gazon au banc, Mészöly junior s’est taillé une jolie carte de visite internationale (Corée du Sud, Chypre, Israël) où l’on retrouve le HAC et le LOSC époque Sibierski-Boutoille.

Les Mészöly ont le foot dans l’ADN comme les Maldini. Ton père, Kálmán, a deux quarts de Coupe du monde (62, 66) et une troisième place à l’Euro 64 sur le CV. Il t’a transmis facilement le virus ?Il n’a même pas eu besoin ! (rires) J’ai commencé à huit ans, mais j’insistais déjà pour le suivre aux entraînements quand j’étais à la maternelle et il acceptait. C’était au temps où Rudolf Illovsky coachait le Vasas (la période 74-77, l’une des sept entre 1957 et 1995, ndlr). Malheureusement, je ne l’ai pas énormément vu en pro sur le terrain puisqu’il a arrêté sa carrière très tôt. J’avais à peu près cinq ans. Grâce à lui, j’ai pu rencontrer Flórián Álbert et Ferenc Puskás lorsqu’ils se retrouvaient sur des matchs de vétérans. Je voyageais en bus avec eux, j’étais dans les vestiaires avec eux, je dînais au resto avec ces grandes légendes. C’était fantastique. L’amour du football a coulé en moi comme le lait maternel.

Le Vasas est d’ailleurs ton club de cœur. L’une des plus prestigieuses écuries hongroises qui jongle entre D1 et D2 depuis quinze ans alors qu’elle affrontait les meilleurs d’Europe dans les sixties. Tu as imité papa en te formant là-bas et en occupant le banc. La situation doit te foutre le cafard… Absolument. Je vibrais comme un gamin en regardant et en jouant les derbys où le Ferencváros, l’Újpesti-Dózsa, le Honvéd et le Vasas se défiaient à tour de rôle. On appelle ça le « kettős rangadó » en Hongrie, c’est vraiment quelque chose ici. Évidemment, c’est d’autant plus difficile d’affronter le Vasas en tant qu’entraîneur d’une équipe adverse. J’ai ressenti ça aussi bien à Újpest qu’avec le Haladás maintenant, mais il faut savoir rester concentré malgré la peine. Bon, cette saison, on leur a donné quatre points avec Szombathely en concédant le nul à l’aller et en perdant au retour. Je dis ça en blaguant, mais c’est vraiment terrible ce qui leur arrive. J’espère qu’ils se remettront vite sur pieds.

J’ai dû m’habituer à la nourriture française. La femme de Piveteau donnait des cours de cuisine à la mienne. Elle lui montrait comment préparer le poisson.

Tu découvres la France au Havre en 1993. Tes camarades du HAC s’appellent Piveteau, Bertin, Ba, Tiéhi et Dhorasoo. Ta période Ciel et Marine t’a plu ? Et qu’est-ce qui t’a conduit en Normandie ?Mon agent de l’époque avait de bons contacts avec Jean-Pierre Hureau (patron du HAC de 1979 à 2000, ndlr) et Guy David, qui venait d’arriver sur le banc du Havre. Il a mis mon nom sur la table et ça s’est fait comme ça. Les trois premiers mois ont été durs. Je ne parlais pas un mot de français. J’ai appris sur le tas. Le style de jeu différait de la Hongrie. Chez nous, on se servait des libéros et là-bas, la défense en zone à quatre dominait. J’ai dû m’habituer à ça et à la nourriture aussi. La femme de Piveteau donnait des cours de cuisine à la mienne. Elle lui montrait comment préparer le poisson. J’étais pote avec Fabien et Jean-Pierre Delaunay. On m’a donné ma chance rapidement, et France Football m’a nommé deuxième meilleur joueur étranger 93-94 derrière Scifo. Une super expérience.

Tu rejoins le LOSC et la brigade nordiste du cru Sibierski-Cygan-Boutoille au mercato d’été 95. Les Dogues luttent à l’époque pour le maintien et leur survie financiere. Ces difficultés t’ont marqué ?À la base, j’étais sincèrement ravi d’aller à Lille. La ville me plaisait, le niveau était un peu plus fort qu’au Havre, et Jean Fernandez me désirait dans son effectif. Après cinq ou six matchs, Jean-Michel Cavalli l’a remplacé et m’a mis sur la touche. J’étais frustré professionnellement, mais j’ai quand même vécu un immense bonheur en dehors du foot puisque ma femme a accouché de Fanny en 1995 à Villeneuve d’Ascq. Et puis au LOSC, le président Lecomte m’appréciait. Je m’entendais bien avec Sibierski et Amara Simba qui enchaînait les blagues. Thierry Rabat était un bon mec, aussi. Mon épouse adorait la vie à la française. Elle voulait rester dans le Nord. Je lui ai dit que je devais changer de route.

Justement hors de l’Hexagone, tu t’es aventuré une saison en Corée du Sud (Posco Atoms), une à Chypre (Limassol) et une en Israël (Maccabi Ironi Ashdod). Ça t’a apporté quoi de bouger autant ?La possibilité de travailler avec mon père, d’abord. J’ai choisi Chypre parce qu’il coachait Limassol en 97-98 et parce que j’avais déjà en tête ma reconversion comme entraîneur. Le président voulait me débaucher avant ma deuxième saison à Lille, mais j’ai décliné l’offre, car ma femme ne souhaitait pas partir. La Corée, c’est assez marrant à raconter. En gros, un businessman lié aux Atoms s’est pointé en Hongrie et la personne avec laquelle il traitait m’a expliqué que le gars voulait me ramener dans ses bagages. Ce Coréen m’a vu jouer avec le Vasas et aimait le fait que je sois haut perché et blond. Il disait que ça le changeait des petits aux cheveux noirs ! (rires) J’étais relativement jeune et j’en avais déjà marre qu’on attribue ma réussite à l’influence de mon père. Je voulais relever le défi et faire taire les critiques. En plus, j’ai pu acheter mon premier appartement et une voiture avec mes salaires de là-bas.

J’admirais Cantona. Je l’ai suivi de ses débuts jusqu’à Manchester depuis la France et je n’arrivais pas à croire qu’il était en face de moi, en 1990, sur la pelouse. Naturellement, j’ai échangé mon maillot avec lui à la fin du match.

Ton passage à Ashdod (98-99) coïncide avec la montée des tensions ayant conduit à la Seconde Intifada (29/09/2000). Tu voyais que ça allait péter ou c’était secure, y compris dans les stades ? J’ai pas vraiment vu les tensions, même si on n’habitait qu’à une soixantaine de kilomètres de Gaza. En revanche, les contrôles étaient omniprésents. On savait pertinemment que la situation était en train de se détériorer en Cisjordanie. C’était pas forcément facile de jouer au football dans ces conditions, même si 8000 supporters en moyenne faisaient le déplacement à Ashdod. Mes camarades israéliens me rassuraient et me disaient que ça ne servait à rien d’avoir peur. J’étais l’un des deux Magyars de l’équipe avec Tibor Balog (37 capes nationales, ndlr). D’autres compatriotes comme István Pisont ou István Sallói se sont plutôt bien débrouillés dans ce championnat particulier que j’ai quand même aimé.

Le 28 mars 1990, les Bleus de Platini sont venus défier la Hongrie à Budapest 72 heures après les premières élections libres depuis 1945. Tu jouais titulaire ce soir-là. L’ambiance devait être dingue !Plus que l’ambiance, c’était surtout un rêve qui se réalisait. J’admirais Cantona. Je l’ai suivi de ses débuts jusqu’à Manchester depuis la France et je n’arrivais pas à croire qu’il était en face de moi sur la pelouse. Naturellement, j’ai échangé mon maillot avec lui à la fin du match. Il n’y avait pas énormément de spectateurs au Népstadion, mais on souhaitait s’impliquer à fond dans la rencontre, d’autant plus vu le changement de régime, la fin du communisme. Mon père (sélectionneur de la Hongrie à ce moment-là, ndlr) refusait que je passe pour le chouchou de l’équipe et me donnait des consignes extrêmement difficiles. Genre marquer Cantona ! (rires) Il était dur, certes, mais c’était pour mon bien.

Deux jours avant le France-Italie du coup de boule, tu disais qu’être footballeur chez nous signifie plus qu’en Hongrie, notamment en ce qui concerne la formation. Même diagnostic aujourd’hui ?Quand mon père était pro dans les années 50-60, les observateurs considéraient les Hongrois comme les meilleurs de la planète. On craignait les Magyars, on les respectait, on les estimait. Après notre dernier Mondial (Mexique 86, ndlr), ça s’est sérieusement corsé pour la sélection. L’eau a coulé sous les ponts et maintenant, notre Premier ministre Viktor Orbán, qui adore le ballon rond comme chacun sait, investit énormément d’argent dans la construction de nouveaux stades ou dans l’académie Puskás. Tout le monde attendait que le « Nemzeti 11 » se qualifie pour l’Euro, et l’objectif a été rempli. Ça fait du bien au foot hongrois. Regarde, on a résisté aux Croates (en amical en mars dernier, 1-1 ndlr), qui nous sont largement supérieurs, puis égalisé en seconde mi-temps. La situation s’est améliorée, c’est certain, mais y a encore du boulot.

Király n’a pas l’intention de ralentir malgré son âge et souhaite continuer minimum deux, trois, quatre saisons chez nous, au Haladás.

Tu as mené Újpest deux fois sur le podium du championnat magyar (2005, 2006) et à un 6-0 historique (11/09/2010) infligé à l’éternel rival Ferencváros dont le fanzine du club tire son nom. Puis Duchâtelet est arrivé. Tu trouves que l’UTE va dans le bon sens avec Roderick aux manettes ?Je le pense et j’espère que ça va continuer ainsi. Duchâtelet veut le meilleur pour Újpest, je m’en suis rendu compte en discutant avec lui. Ses ambitions sont bénéfiques et les « Lilák » font le job. D’ailleurs, on essaie de monter un partenariat entre mon école de foot (cinq établissements et huit cents élèves de 5 à 21 ans, ndlr) et le club par le biais de Péter Vig, qui était mon adjoint durant la saison 2010-2011. J’aimerais qu’il devienne directeur de l’académie Mészöly, et l’idée d’associer l’UTE à la démarche a l’air de séduire Roderick. Je n’ai pas envie de retourner sur le banc d’Újpest, mais former les gamins avec le soutien du team serait un projet extrêmement intéressant à développer à long terme. On verra.

Tu coaches actuellement le Szombathelyi Haládas avec Gábor Király et son jogging dans les cages. L’Euro est sa première compétition internationale à 40 piges. Tu le sens confiant ? Motivé ?Tout à fait. Quand on a commencé la préparation l’été dernier au Haladás, il avait l’Euro dans la tête. Et en même temps, il tenait à réaliser une vraie performance en club. C’est un grand professionnel. Il joue un rôle considérable, que ce soit sur le terrain ou au sein du vestiaire. C’est mon bras droit. Il m’aide à gérer les petits jeunes comme un deuxième patron. J’ai passé quatre ans en France et lui douze en Allemagne. Je sais à quel point, c’est compliqué d’évoluer à l’étranger et lui, il a assuré. Chapeau ! Il n’a pas l’intention de ralentir malgré son âge. Il souhaite continuer minimum deux, trois, quatre saisons chez nous. Le Haladás aura un nouveau stade en 2017 et fêtera son centenaire en 2019. Gabi veut être au rendez-vous. On a organisé une super soirée pour son anniversaire (le 1er avril, ndlr).

Tu t’es chargé des U18, puis des U19 magyars (2012-2014). Ton père a dirigé trois fois la sélection nationale. Ça te tenterait pas de succéder à Storck si son contrat n’est pas renouvelé après 2018 ?Bien sûr ! Pour tout coach qui se respecte, la sélection, c’est LE palier ultime. Mais tu sais, je n’ai pas envie de perturber Storck et ses troupes dans un rendez-vous aussi important que l’Euro. Je suis en bons termes avec lui, il fait du bon boulot avec Andi Möller comme Dárdai qui l’a précédé. Bernd est venu à Szombathely, on a bien discuté. Je lui ai donné quelques conseils, mais après, c’est lui le boss. J’ai vu comment son équipe était unie et déterminée avant le barrage contre la Norvège. Gabi (Király) me l’a confirmé. Ils étaient au point contre les Croates malgré le nul. Et le début de l’Euro a confirmé tout ça. Pour l’instant, je me concentre sur le Haladás. Si on me propose, j’accepterai sans hésiter, tu t’en doutes. Si rien ne vient, ainsi soit-il.

L’addition salée de Szalai
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Propos recueillis par Joël Le Pavous

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