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Inter, il s’agirait de grandir

Par Adrien Candau
4 minutes
Inter, il s’agirait de grandir

Sur le papier, elle a peu ou prou tout pour elle. Un entraîneur compétent, un effectif fourni, où presque tous les postes sont doublés, et une vraie solidité défensive. Mais surtout, un pouvoir économique considérable. Et si, à court ou à moyen terme, c'était l'Inter qui avait les clés de cette fameuse équation anti-Juve que cherche depuis si longtemps l'Italie du football ? Une question qui fait cogiter pas mal de monde, alors que les Nerazzurri se déplacent à Turin ce vendredi soir.

À force de se voir poser cette question encore et encore, Luciano Spalletti a fini par s’agacer un tantinet. « L’anti-Juve ? Nous ne sommes pas l’anti-Juve. Juste l’Inter et basta. » Fin de l’histoire ? Non, car au moment de se mesurer les tours de bras, de se sortir le pognon des poches et de jeter un œil aux comptes de résultat, un seul club en Italie peut avoir à terme la prétention de côtoyer la même réalité économique que la Juventus. Un club qui s’appelle l’Inter. Et qui voudra peut-être sonner un début de révolte lors du derby d’Italie, ce vendredi.

Le fric, c’est chic

Quelques chiffres pour débuter. Selon le cabinet d’audit Deloitte, avec 405 millions de chiffre d’affaires en 2016-2017, la Vieille Dame devance actuellement largement les Nerazzurri, loin derrière avec 262 millions de revenus annuels. Avec une légère nuance à prendre en compte : depuis que le club lombard est devenu propriété du géant de l’électroménager chinois Suning en 2016, on constate une hausse de ses revenus commerciaux, qui atteignent 127,4 millions d’euros. Soit une augmentation de 137% par rapport à l’année précédente. De quoi faire de l’Inter le second mastodonte économique de la Botte, loin devant le Napoli et ses 200 millions de chiffre d’affaires. Une quasi-injustice sur le plan sportif, tant les Interisti ont cumulé les exercices inconséquents ces dernières saisons, là où les Azzurri ont été d’une régularité exemplaire en Serie A. Oui, depuis que Suning a pointé le bout de son museau en Italie, l’Inter a du fric. Beaucoup. C’est forcément le cas quand on est propriété d’un groupe qui tourne autour de 60 milliards de revenus annuels.

À côté de ça, le business cinématographique du président napolitain Aurelio De Laurentiis passerait presque pour une PME de province, quand l’AC Milan, désormais sous la coupe d’un fonds Elliott qui voudra sans doute à terme vendre le club, ne sait pas de quoi demain sera fait. Comme la Juve, propriété du groupe Exor dont les recettes annuelles culminent à 140 milliards d’euros en 2017, l’Inter peut voir venir. Même si les Nerrazzurri, eux aussi menacés par le FPF après des années de transferts foireux et de gestion approximative, ne peuvent pas se permettre de dépenser n’importe comment. Ça tombe bien, à l’Inter, on n’a pas que de l’argent. Mais aussi, enfin, des idées.

22, revoilà Marotta

Une forme de renouveau symbolisé par un homme, Luciano Spalletti, qui semble pour l’instant faire profiter le club autant de ses qualités que de ses défauts de manager. Côté pile, le divin chauve a su redonner une vraie solidité aux Milanais, qui affichent la seconde meilleure défense de Serie A (douze buts encaissés) derrière la Juve cette saison. Les Lombards ont aussi retrouvé la Ligue des champions cette année, après six ans d’absence. Enfin, la cellule de recrutement du club milanais a su conduire un mercato estival à la fois probant et plutôt bon marché, à l’image des transferts de Stefan de Vrij et Kwadwo Asamoah, tous les deux en fin de contrat et acquis pour zéro euro.

Deux joueurs qui sont par ailleurs des éléments fondamentaux de la défense à quatre de Spalletti. Et qui contribuent à renforcer un effectif fort d’une densité pas vue depuis plusieurs saisons, alors que l’ex-gourou de la Roma dispose de plusieurs options séduisantes aussi bien dans l’axe de sa défense (Miranda-Škriniar-De Vrij) qu’au milieu (Brozović, Vecino, Nainggolan, Borja Valero voire Gagliardini), ou sur les ailes de son attaque (Perišić, Politano, Baldé, Candreva). L’Inter, qui va prochainement engager l’ancien directeur général de la Juve Giuseppe Marotta, souvent cité comme une des références absolues du métier, ne compte par ailleurs sans doute pas s’arrêter en si bon chemin pour les saisons à venir.

Le poids de l’histoire

Côté face, les tifosi n’ont pas manqué de remarquer que l’Inter n’affiche pas non plus de progrès édifiants dans le jeu, alors que Mauro Icardi continue d’être l’arbre qui cache la forêt d’une animation offensive parfois poussive. L’équipe manque même à l’occasion cruellement d’ambition, à l’image du match sans allant ni saveur que les Nerazzurri ont livré lors de la cinquième journée de la phase de groupes de C1, face à Tottenham fin novembre. De l’ambition, c’est pourtant bien ce qu’il faudra aux Lombards s’ils veulent s’imposer à l’Allianz Stadium ce vendredi. Un succès qui servirait à envoyer un message pour les saisons à venir, alors que la Juve, qui compte déjà onze points d’avance sur les Interisti, semble encore hors d’atteinte lors de l’exercice en cours. Un succès, aussi, pour peut-être valider les prédictions d’Arrigo Sacchi, pour qui la fin du règne de la Vieille Dame passera forcément par Milan : « C’est dur d’être toujours au top niveau, mais l’Inter investit énormément… Le futur du Milan est encore inconnu, mais ces deux clubs ont une immense histoire et ce sont les seuls à pouvoir contrer la Juventus. Sans eux, c’est difficile : Naples et la Roma n’ont pas d’histoire comparé à ces clubs-là. Et l’histoire, ça compte énormément. »

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