Euro 08 : Pas de bonne omelette suédoise sans casser des œufs…
Sur le papier, la Suède, c'est consistant. Sur le terrain, c'est parfois surprenant, mais trop souvent décevant. Par contre, dans les vestiaires et devant les journalistes, c'est la plupart du temps délirant.
La Suède, sérieux outsider ? Plus de dix ans que ça dure. À chaque année paire, on nous ressort le refrain de la génération exceptionnelle. Entre densité physique, solidité défensive, et grosses individualités, les Vikings possèdent à chaque fois les armes pour être LA révélation de l’Euro/Coupe du Monde. Un genre de running-gag quoi. Mais le plus drôle (ou le plus triste) dans cette histoire, c’est qu’elle est vraie.
Indéniablement, le sélectionneur Lars Lagerbäck possède une génération de footballeurs hors norme, pour un pays où il est plus facile de tâter le palet que le cuir. Concernant la densité physique, on les appelle « Vikings ». Tout est dit. Quant aux joueurs capables de faire la différence, leur attaquant vedette s’appelle Zlatan. Tout est dit là aussi.
Au vrai, cet Euro 2008 constituait l’ultime chance de transformer cette belle génération jaune en or. Henrik Larsson (36 ans), Niclas Alexandersson (36 ans), Marcus Allbäck (34 ans) devraient faire leurs adieux à la sélection nationale à l’issue de la compétition. Quant à Fredrik Ljungberg (31 ans) et Olof Mellberg (31 ans), la question se pose encore. Ljungberg a réalisé une belle saison à West Ham et Mellberg s’est engagé avec la Juventus Turin pour la saison prochaine. Tous deux semblent avoir encore quelques perspectives devant eux, mais pour combien de temps encore ?
Logiquement ces cadres (c’est le mot à la mode) devraient se serrer les coudes. Montrer l’exemple et tous tirer dans le même sens pour pouvoir refermer le chapitre comme il se doit. L’union sacrée quoi. Au lieu de ça, ils ne cessent de se tirer dans les pattes. Concernant Mellberg et Ljungberg, c’est une longue histoire qui remonte à la Coupe du Monde 2002. Deux joueurs aux antipodes l’un de l’autre. L’un avec sa gueule de bûcheron fan de NHL, et l’autre avec ses pubs en slibard. Lors d’un banal entrainement, Olof sèche durement Freddie, par derrière qui plus est. Ce dernier se relève et vient lui compter fleurette, histoire de monter que chez Calvin Klein, on n’est pas des tapettes. S’ensuit un mano à mano façon Jerry Springer Show, avec Zlatan et Larsson dans le rôle des deux molosses censés séparer la meute, sous l’œil impuissant du gros Tommy Söderberg (sélectionneur de l’époque en association avec Lagerbäck).
Nos deux apprentis ninjas ont ensuite remis ça dans les vestiaires, après le match nul concédé face aux touristes de Trinidad et Tobago lors du Mondial 2006, lorsque l’ex joueur d’Arsenal eut le malheur de critiquer les longs ballons à répétition que balançait la défense. Et aujourd’hui, c’est pour le capitanat que la discorde s’étend. Car à l’issue de ce mondial allemand, Mellberg, alors cap’taine de l’équipe, décide de prendre sa retraite internationale. Ljungberg hérite du brassard. Mais face à l’état de la défense jaune et bleue durant les premiers matchs des éliminatoires de l’Euro 2008, Olof fait du Lilian et reprend du service. Sauf que Freddie, le C sur son biceps c’est son rêve, et il n’est pas prêt à le lâcher.
Devant tant d’immaturité, Henrik Larsson fait figure de baobab. Plein de sagesse, il ne cesse de faire tourner le calumet de la paix, et ce même sans les dreadlocks. Véritable pompier du groupe, il n’en peut plus de dédramatiser les tensions internes, ou d’organiser des diners et autres réunions dans les vestiaires. Forcément, le doyen du groupe en a marre de ramer et aurait bien aimé pouvoir enfin tirer sa révérence avec le sentiment du travail accompli. Alors il se démultiplie, couvre tous les feux, mais rien n’y fait.
Surtout que depuis 2001, le vénérable Henrik doit composer avec un autre emmerdeur. Un crack celui-là, sans doute l’un des meilleurs attaquants au monde. Un type qui a les couilles de dire : « Je vais devenir le meilleur joueur du monde » . Ou mieux encore : « Je suis le prochain Maradona » . Un type capable d’aller se saouler en boîte durant un rassemblement des Vikings, ou plus récemment de déclarer lors d’une conférence de presse juste après le match face à la Grèce : « J’aime beaucoup Stoor, qui a un jeu plus international (sous-entendu ‘qu’Alexandersson’, habituel titulaire du poste) et Sebastian Larsson m’a impressionné. Il a fait une saison formidable avec son club, s’il joue, il réussira (pour rappel, Larsson est le concurrent direct de Ljungberg et Wilhelmsson sur les ailes…) » . Bref un type qui pèse. Putain de Zlatan.
Alors hier soir, à 20h45, inutile de dire que le game face aux Russes s’annonçait décisif. Objectif des Vikings : une place en quarts pour ensuite écraser les impitoyables Oranjes, et ainsi pouvoir enfin, quoi qu’il arrive, changer d’ère (d’air ?) en beauté. Verdict : Russie – Suède : 2 – 0. Les Suédois ont encore losé. Y’aurait donc manifestement encore quelques quiches à distribuer…
PS : Selon notre correcteur d’orthographe, en français « Zlatan » s’écrit « Platane ».
Par Paul Bemer et Lucas Duvernet-Coppola
Petit extrait, comme ça, juste pour déconner :
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