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Comment Madrid se prépare au match du siècle

Par Cristian Pereira et Pierre Boisson, à Madrid
Comment Madrid se prépare au match du siècle

Événement spécial à Madrid : une rencontre de football un peu particulière, à savoir la finale retour de Copa Libertadores opposant River Plate à Boca Juniors, s'apprête à s'y dérouler. Et ça devrait faire du bruit...

La vie de Rodrigo ne souffrait d’aucune turbulence. Né à Lomas de Zamora, dans la banlieue Sud de Buenos Aires, il avait eu la chance d’aller à l’université et de trouver un emploi à peine diplômé. Au fil du temps, il s’était mis à rénover une petite maison pas loin de celle de ses parents. Où il pouvait vivre à son aise, inviter ses amis à boire quelques Fernet les soirs d’été tout en continuant à manger les empanadas de sa mère. Dernièrement, il lui avait même présenté une collègue de travail, devenue sa petite amie, dont il lui disait qu’elle serait peut-être la bonne. En pleine crise économique argentine, les deux avaient la chance d’avoir conservé leurs emplois. Il y a un mois, Rodrigo était à la Bombonera pour le match aller du grand Superclásico. « Le match du siècle » , affirme-t-il. Il regrette encore cette dernière action de Dario Benedetto qui aurait pu donner la victoire à Boca. Le club de son grand-père. De son père. Son club. Et, espère-t-il, celui de ses enfants.

Le retour, il avait prévu de le regarder chez lui. Seul, la boule au ventre. Et puis, tout a changé. Le bus de Boca a été canardé à coups de pierres, le match retour reporté, annulé, déplacé. Quand il a été officiellement annoncé que le dernier round du match le plus long de l’histoire aurait lieu à Madrid, au Bernabéu, Rodrigo n’a pas hésité une seule seconde. Il a balancé sa vie dans le vide. « J’économisais depuis deux ans pour m’acheter une voiture pour aller au travail, parce que je n’en pouvais plus de faire deux heures de bus tous les matins, raconte-t-il. J’ai pris tout cet argent et psssshhhhit, j’ai acheté une place pour le stade, des billets d’avion, j’ai fait mon sac et me voici. » Rodrigo est dans l’avion entre Paris et Madrid. Le prix des billets ayant flambé, il a dû avant cela passer par São Paulo, Miami, Amsterdam. Il ne sait même plus quand il est parti, ni depuis combien d’heures il n’a pas dormi. Il demande simplement : « Tu sais comment on va de l’aéroport au Bernabéu ? »

Passion et économie

Dans cet avion – et dans tous les autres qui atterrissent à Madrid depuis trois jours – se trouvent des centaines et des milliers d’Argentins qui, comme Rodrigo, ont décidé que cette finale valait tous les sacrifices. Qu’ils viennent d’Argentine, des États-Unis, de France, d’Allemagne ou d’Angleterre, la municipalité de Madrid se prépare, selon les chiffres du conseiller à l’économie, à accueillir entre 20 000 et 40 000 supporters au total. La ville devrait en tirer entre 52,6 et 107 millions d’euros de revenu grâce aux dépenses sur place, aux nuits d’hôtel et aux vols opérés par Iberia ou Air Europa.

Sans compter les bénéfices indirects des projecteurs qui sont braqués sur la ville depuis quelques jours, et des 200 millions de personnes qui devraient regarder le match ce dimanche. Toujours selon la mairie, les hôtels sont occupés à 95% pour une nuitée moyenne de 210 euros : il n’y a plus une chambre libre en ville. La police, elle, se prépare à recevoir « 500 supporters spécialement violents » , selon le délégué du gouvernement à Madrid José Manuel Rodríguez Uribes. Alors que 2000 policiers environ sont mobilisés pour un Real-Atlético, ce sont 4000 agents qui seront dans les rues ce dimanche pour éviter les affrontements entre supporters.

Dépenses « normales »

Sur la Plaza del Sol, un stand du Samu a été installé et quelques policiers veillent au grain. Depuis la bouche de métro résonne un bruit étrange, différent de d’habitude dans ce quartier animé de la capitale. Le « El que no salta abandono » ( « Qui ne saute pas a abandonné » ) de quelques centaines de supporters de River Plate attire l’attention des locaux et des touristes. Tous ici répètent en boucle le même discours : ils jurent contre la CONMEBOL et considèrent que le match aurait dû se jouer au Monumental. Ou, dans le pire de cas, dans un stade argentin avec les socios et les hinchas de tous les dimanches. Ils ont beau cracher sur la décision, sur Boca, sur son président Angelici et sur le sort, ils n’ont pas hésité une seconde à faire le déplacement. Il était hors de question de rater le match, explique Adrian Gleizer, venu de Miami. Lui était déjà à Buenos Aires il y a deux semaines, où il avait craqué 1500 dollars pour un billet acheté au marché noir et donc parti en fumée.

En tout, il a dépensé plus de 4000 euros pour espérer voir le match du siècle. « Nous les Argentins, on aime le foot. Que veux-tu !, justifie-t-il. Hier, on est allé voir le match de l’Atlético. Et si Vallecano jouait à domicile, on serait aussi allé les voir. » C’est ce que répètent tous les Argentins qui se promènent dans les rues de Madrid ces derniers jours, maillots sur le dos, écharpes autour du cou, coques de téléphone portable aux couleurs de leur équipe. « C’est horrible de jouer la finale de la Libertadores de América chez lesConquistadores, affirme Cristian, venu quant à lui de Paris avec quinze autres membres du groupe officiel des supporters de River. Bon, c’est sûr que pour nous, c’est une énorme opportunité, mais j’essaye de faire la distinction entre ma chance individuelle et le collectif. Ce match n’aurait pas dû se jouer là, mais maintenant qu’on est à Madrid, il nous reste plus qu’à en revenir vainqueurs. »

Insulte et jet de canette

Pas loin de là, un groupe de hinchas venus de Houston et de Milan craignent les débordements. Marcelo Pinti, qui habite aux États-Unis depuis plus de vingt ans, confirme l’avis de ses potes : « Nous, on est plus calme parce qu’on vit à l’étranger. Mais si des tarés viennent d’Argentine, ça pourrait partir en couille. » Dans les derniers jours, la police espagnole a renvoyé chez eux des leaders des barras bravas de Boca et de River. « On est en alerte maximale, confie un agent de la police madrilène. Il faudra faire très attention aujourd’hui, les contrôles seront beaucoup plus poussés que d’habitude parce qu’on craint des débordements avec certains hinchas. »

Alors que les rideaux des bars tombaient dans la nuit de la capitale espagnole samedi soir, quelques supporters de Boca chambraient des rivaux de River Plate installés à la fenêtre d’un appartement au premier étage. « Allez, descends,puto » , lance une baraque jaune et bleu. Une canette de bière vole contre la façade, sans doute lancée par un type déjà nostalgique de son pays. Aujourd’hui, les bus de Boca et de River seront escortés par la police espagnole et toutes les rues de la capitale bloquées à la circulation. Alors, peut-être, le match du siècle pourra enfin se jouer.

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Par Cristian Pereira et Pierre Boisson, à Madrid

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