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Lille est vilaine

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Lille est vilaine

Troisième de Ligue 1, encore dans la course au titre et en UEFA, Lille peine toujours à intéresser public et médias. Esquisses d'explications d'un faible pouvoir d'attraction.

Si le foot, ce n’était que des résultats, le LOSC devrait passionner la France, presque autant que Marseille, et bien davantage que Paris. Car depuis une décade, les Dogues se placent régulièrement dans le top 5 de Ligue 1, avec trois qualifs en Ligue des Champions à la clé. De quoi braquer les spots sur cette nouvelle place forte du football français, placée à un heure de train de Paris. Un atout non négligeable en France centralisatrice. Mais c’est comme si rien n’y faisait, Lille n’attire pas. En se laissant aller, on pourrait même dire que Lille emmerde.

Son style de jeu serait peut-être en cause. Pas cette année cependant, où l’équipe a enfilé les cartons à plus de trois buts de moyenne pour se propulser vers les cimes du championnat, avec des individualités attrayantes comme Gervinho, Mavuba, Obraniak. Déjà, la saison dernière, le LOSC proposait du jeu comme peu. Ou alors s’agit-il de l’héritage hermétique Vahid-Puel ? A force de serrer à double-tour, le Bosniaque et le Monégasque ont peut-être enfermé le LOSC dans une image de rigidité intransigeante, ou au moins posé un marqueur identitaire fort de l’entité nordiste.

Le manque de stars pourrait également être en cause dans cette réputation, qui comme toute n’est pas forcément justifiée. Sous Vahid, aucune tête ne dépassait, si ce n’est celle de l’Argentin Fernando D’Amico, entouré de Johnny Ecker, Philippe Brunel ou Grégory Tafforeau. Des noms à prendre froid. Mieux que personne, le dernier cité symbolise la terne façade nordiste des années Vahid-Puel. Cheveux ras, tête carrée, visage rentré, compétences sûres mais sévèrement bornées, un porte-parole aussi charismatique qu’un panneau “Stop”. Cette saison, à Lille, il y a pourtant Eden Hazard, le C.Ronaldo belge. Mais il n’est employé qu’à mi-temps.

Lille, en plus d’une image anti-glamour, paye peut-être aussi le contexte de sa réussite. Quand le LOSC flambe, c’est souvent que la L1 flanche, à l’image de la première moitié de saison médiocre voire plus de Marseille, Lyon et Paris. Le pas est alors vite franchi de rapprocher la médiocrité nationale de l’ascension nordiste. Se souvenir notamment que Lille termina troisième en 2001, quand Nantes était champion, Sedan cinquième, Monaco onzième, et Marseille premier non relégable. En 2003-2004, le championnat le plus disputé du règne lyonnais, avec Paris et Monaco dans le trio de tête, Lille végétait en revanche à la 10e place. Ne peut-on être Lillois et entouré de paillettes ? Comment ça, Martine Aubry et Pierre Mauroy ne sont pas glamour ?

Tata Martine pourrait toutefois trouver la solution. Un grand stade. Déjà, un vrai stade. Car non seulement, le club paie cher en termes budgétaires de ne plus disposer d’une enceinte digne de ce nom, mais aussi en déficit de popularité. Car même au chaud devant son écran, se taper un match à Villeneuve d’Ascq et son public fantôme, repoussé au bord du hors-champ par la piste d’athlétisme, tient de l’effort de bonne volonté. Sans sortir de l’échelon local, comment rivaliser avec un Bollaert bariolé de sang et d’or, couleurs vives, haleines houblonnées et odeur de graillon palpables ?

A Lorient, on sent le chalut, à Saint-Étienne, la ferveur sépia, à Bordeaux, l’exigence bourgeoise, à Sochaux, les chaînes Peugeot, à Paris, l’arrogante agressivité de la capitale, à Marseille, le bouillonnement populiste, à Valenciennes, l’humilité locale… Lille, avec Nancy et Toulouse, font, eux, partie de cette classe de clubs dont on peine à tisser le lien avec leur ville. Des sortes d’entité hors-sol avec maillots pas plus stylés que ceux de l’équipe corpo de la COGIREP. A Lille, le boss de la boîte se nomme Michel Seydoux. Quand on voit sa moustache surmontée de ses lunettes de comptable, on pense à des tableaux avec des chiffres, des bilans d’exploitation. On s’ennuie.

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