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La FIFA, à qui perd gagne

Par Eric Carpentier
6 minutes
La FIFA, à qui perd gagne

Le 7 avril, la FIFA a annoncé des pertes annuelles de près de 350 millions d'euros. Un chiffre inhabituel expliqué par la situation interne actuelle, mais pas seulement. Et surtout, un résultat qui devrait être bien vite effacé.

369 millions de dollars. Le 7 avril, la FIFA rend public son dernier chiffre-clé et, pour une fois, il n’y est pas question de détournements, pots-de-vin et autres magouilles de la tentaculaire patronne du football mondial. Enfin, pas directement. Ces 369 millions de dollars, soit 347 millions d’euros, représentent les pertes nettes réalisées par l’organisation sur l’année 2016. Et si le rapport financier évoque en exergue « les enquêtes en cours portant sur d’anciens dirigeants de la FIFA » , Alejandro Domínguez, le patron de la Commission des finances, ne semble pas inquiet pour autant, car « l’instance a confirmé ses objectifs en matière de revenus » . Mais alors, la FIFA serait-elle subitement devenue une œuvre de charité distribuant son argent sans regarder à la dépense ? Non, évidemment. Au contraire même : en bonne gestionnaire de ses intérêts, elle sait qu’il faut parfois investir avant de pouvoir engranger les fruits de son effort. Mieux, c’est l’essence de l’activité de la Fédération internationale de football association.

Business model et affaires judiciaires

Le business model de la FIFA, Nathalie Henaff et Didier Primault le connaissent bien. C’est même un sujet d’étude privilégié pour les deux économistes du Centre de droit et d’économie du sport de Limoges, la référence française en la matière. Alors, lorsqu’il est question des comptes de la FIFA, Didier Primault n’hésite pas un instant : « C’est une année particulière, mais je ne suis pas inquiet pour le modèle économique de la FIFA ! (rires) » Et le directeur général du CDES de préciser sa pensée : « Comme beaucoup de fédérations internationales, et plus encore à la FIFA, plus de 80% des revenus viennent de la Coupe du monde. Si bien qu’il y a une grande saisonnalité des revenus, engrangés une année X alors que, les autres années, on dépense plutôt de l’argent. » Voilà pourquoi, malgré les pertes de l’exercice, le rapport financier peut avancer sans trop se risquer, que « le résultat net devrait être positif à la fin du cycle quadriennal (2015-2018, ndlr) et s’élever à environ cent millions de dollars » .

Mais le résultat annoncé en 2016 n’est pas anodin pour autant. Pour la première fois au XXIe siècle, la FIFA va connaître trois résultats opérationnels déficitaires de suite : 117 millions de dollars en 2015, 391 millions cette année, 489 millions annoncés pour 2017. Trois années qui correspondent au grand ménage en cours au sein de l’organisation, depuis l’interpellation le 27 mai 2015 de sept de ses dirigeants, la veille de son congrès annuel. « Avec les élections successives et les changements d’équipes, les mouvements au niveau du personnel, il y a des indemnités de départ, des frais engendrés » , confirme Didier Primault. De fait, en juin 2016, des soupçons d’enrichissement personnel se font jour, portant notamment sur les indemnités de départ de MM. Blatter, Valcke et Kattner, pour un montant total de 80 millions de dollars. Il a aussi fallu payer des frais juridiques, à hauteur de cinquante millions de dollars en 2016. Sans oublier l’amortissement de « certains investissements inconsidérés » pointés du doigt par la nouvelle direction (musée du football, hôtel Ascot acheté par la FIFA en 2014…). En bref, une période sombre de bout en bout pour l’institution.

« La FIFA prévoit une hausse continue de ses revenus »

Malgré tout, si la FIFA avance confiante, c’est parce qu’elle sait qu’elle a, normalement, mangé son pain noir. Après une année 2016 à organiser la Coupe du monde féminine U20 en Papouasie Nouvelle-Guinée, après une Coupe du monde de beach-soccer aux Bahamas en 2017, les choses sérieuses vont reprendre en 2018. D’après le rapport financier, « sur le cycle 2015-2018, la FIFA prévoit 5,656 milliards de dollars de recettes, dont 70,6% engendrés rien qu’en 2018 » . Plus loin, le rapport précise la répartition desdites recettes, par poste : « La vente des droits de retransmission télévisée constitue la principale source de revenus et contribuera au budget à hauteur de 53%, suivie par la vente des droits marketing (26%) et la vente des droits d’hospitalité et de la billetterie (10%)(…)et d’autres sources de revenus de moindre importance. » En France, où la dépendance de la Ligue 1 aux droits télé est régulièrement pointée du doigt, le chiffre interpelle. Mais pas l’économiste du sport : « Le schéma est différent, parce que sur un championnat national, vous avez une compétition qui se déroule sur une année entière, donc logiquement vous avez une activité qui engendre des revenus de stade, d’hospitalité, qui doivent être en termes relatifs plus importants que dans le cadre d’un évènement ponctuel. Là, les droits marketings et droits télé vont toujours être très nettement supérieurs à tout ce que vous pouvez engendrer. »

En outre, le football reste le roi des jeux et cette position lui confère un avantage certain, d’après Didier Primault : « Pour les événements sportifs de façon générale, la question est celle de l’évolution des marchés télévisuels dans l’avenir. C’est vrai que ce marché-là, pour le sport de façon générale, a sans doute vécu ses plus belles années, on voit déjà un certain nombre de mouvements qui font que les gens regardent moins la télévision et sont plus sur d’autres supports digitaux. Potentiellement, les droits télé pour beaucoup de spectacles sportifs vont baisser dans l’avenir. Mais ils vont aussi se concentrer sur les quelques événements qui font le plus d’audience, et c’est clair que la Coupe du monde fait partie de ceux-là. La FIFA devrait être encore à peu près tranquille pour les quinze ans à venir à ce niveau-là. » Soit le temps de prévoir l’avenir, à condition de ne pas faire n’importe quoi.

La petite entreprise FIFA

Car il existe un scénario du pire. Preuve en est, le bas de laine constitué depuis 2002 par la FIFA. Depuis cette année-là, les réserves de l’organisation à but non lucratif ont été constituées pour atteindre un record prévu de 1,65 milliard d’euros en 2018. Une idée venue du CIO, conscient qu’en cas de boycott ou d’annulation, pour une raison ou une autre, de sa compétition-phare, les revenus afférents s’envoleraient aussitôt. Mais pour Didier Primault, c’est plutôt de l’intérieur que peut venir le danger : « Si on allait encore un cran plus loin par rapport aux dérives et qu’on s’apercevait que les gens de la FIFA eux-mêmes vendent les matchs à des sociétés de pari, comme ce qui a pu se passer en Asie, ça commencerait à être très compliqué. Je prends cet exemple, car ça a tué le football professionnel dans certains pays asiatiques, vu que la compétion elle-même ne devenait plus crédible, puisque manipulée. Ça, ce serait le scénario noir. » In fine, c’est bien l’argument économique qui pourrait être à l’origine du retour de l’éthique au sein de la FIFA. La peur de tuer la poule aux œufs d’or, en somme. En attendant, il faut se serrer la ceinture : Gianni Infantino a réduit son salaire de 58% par rapport à son prédécesseur, soit un maigre 1,4 million d’euros. La FIFA connaît la crise, mais une crise bien à elle.

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