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Philippe Séguin, pourquoi as-tu ta tribune au Parc des Princes ?

Par Alexandre Doskov
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Philippe Séguin, pourquoi as-tu ta tribune au Parc des Princes ?

Si la voix ténébreuse de Philippe Séguin a plusieurs fois fait trembler les murs de l'Assemblée, elle a également résonné à d'innombrables reprises au Parc des Princes, que cet amoureux du PSG fréquentait très régulièrement. Une passion récompensée après sa mort par l'un des plus beaux cadeaux qu'une équipe puisse faire à un fan, lui offrir une tribune.

Nicolas Sarkozy, Manuel Valls accompagné de quelques ministres, Anne Hidalgo… Il est des soirs où la tribune présidentielle du Parc des Princes ressemble comme deux gouttes d’eau au plateau de Des Paroles et des Actes. Entre deux actions, l’ancien chef de l’État discute de sa Hard knock life avec Jay-Z, et l’actuel Premier ministre refait le monde avec Yannick Noah. Car quand le week-end arrive, la « Corbeille » du Parc devient l’endroit où il faut être. 155 places au milieu desquelles les caméras ne peuvent pas vous rater. Mais où étaient-ils il y a dix ans, lorsque le PSG squattait honteusement la deuxième partie de tableau, et que le Parc des Princes devait applaudir des passes de Jérémy Clément pour Amara Diané ? Nul ne le sait, mais un homme politique était déjà là. Pas pour se montrer, mais pour supporter. L’ogre Philippe Séguin devait sans doute se sentir seul, comme il en avait l’habitude, mais son stade préféré a fini par lui rendre hommage à peine un an après sa mort, en renommant la tribune officielle à son nom.

Le sauveur

En réalité, son histoire d’amour, Philippe Séguin ne la vivait pas qu’avec le club de la capitale, mais avec le football tout entier. Pigiste dans sa jeunesse pour les pages sports du journal Le Provençal, où il côtoya Eugène Saccomano, visiteur assidu des stades du Var où la famille de ce natif de Tunis a décidé de venir s’installer, il se fera remarquer une première fois dès 1973, alors qu’il n’a pas 30 ans et aucun mandat d’élu. Philippe Séguin n’est alors qu’un simple auditeur de la Cour des comptes, sorti de Sciences Po et de l’ENA, comme tant d’autres. Le football français est alors proche de la guerre sur fond de pratiques fiscales douteuses, et le syndicat des joueurs professionnels pousse le vice jusqu’à provoquer une grève à la moitié de la saison, qui conduira à l’annulation de certains matchs. Le secrétaire d’État aux Sports de l’époque, Joseph Comiti, cherche dans l’urgence un homme capable de calmer ce petit monde.

Philippe Séguin, 29 ans à l’époque, lève la main pour être désigné et se lance illico presto dans la rédaction d’un rapport censé réglementer les statuts du foot français. « Une Bible » , selon Fernand Sastre, président de la FFF à ce moment-là. « Il a inventé l’organisation du football en France pour le quart de siècle à venir » , ajoutera Eugène Saccomano. Mais s’il est un club que Philippe Séguin se met à aimer plus que les autres, c’est le PSG, et ce, dès sa fondation au début des années 70. Un attachement qui le conduit même à s’immiscer dans les affaires du club, lorsqu’au moment de l’affaire de la double billetterie du Parc à la fin des 70s, le président Daniel Hechter l’accuse d’avoir voulu l’éliminer, des rumeurs affirmant même que Sastre lui aurait proposé de prendre le PSG en main.

Aux grands hommes le Parc reconnaissant

Quelques années plus tard, certains prêteront même à Philippe Séguin l’ambition de présider la FFF. Mais Séguin a préféré le service de l’État, sans jamais oublier d’aider le monde du football comme il l’a fait en présidant la Commission Grands Stades, qui a aidé à la préparation de l’Euro 2016, ou encore la Fondation du Football. À sa mort le 7 janvier 2010, c’est donc la classe politique, mais aussi la planète ballon rond qui rend un dernier hommage à la plus belle voix de la Ve République. La FFF se fend d’un communiqué touchant : « La grande famille du football français perd l’un des siens » , tandis que le site du Paris Saint-Germain salue sa mémoire au nom de tous les fans.

Mais Bertrand Delanoë, maire de Paris, décide d’aller plus loin, et propose de donner le nom de Philipe Séguin à la tribune présidentielle : « C’est une idée que j’ai eu pour honorer sa mémoire. Il le méritait tellement. Donner son nom à la tribune présidentielle était logique. C’était un grand monsieur. (… ) Sa mort a été inattendue, il a fallu trouver une idée vite. Le PSG a été immédiatement d’accord. » Les élus de gauche aussi, même si Séguin avait créé plus d’une controverse dans leurs rangs et qu’il s’était présenté contre Delanoë à la mairie de Paris en 2001. L’adjoint aux Sports du maire de Paris à l’époque, le communiste Jean Vuillermoz, se souvient que l’opération s’est déroulée sans accrocs : « La politique n’a pas pris le dessus. »

Les ultras frondeurs

Le club, la mairie, la famille de Philippe Séguin, tout le monde a donc immédiatement validé l’idée, et l’inauguration officielle de la tribune peut avoir lieu en avril 2011 à l’occasion de la 29e journée. Toute la capitale est conquise. Toute ? Non, un petit village d’irréductibles rebelles résiste encore et toujours à l’autorité. Une partie des ultras, again and again, s’insurge contre cet affront fait à leur stade, comme l’expliquait l’un des leaders du groupe les Lutèce Falco à Streetpress : « On n’est pas affectés. (…) Je ne sais pas à quelle période il s’est affiché comme supporter du PSG. Mais il faudrait voir si ce n’est pas quand il s’est présenté à la mairie de Paris. Il ne nous a jamais rendu service. Je ne suis pas sûr que son avis sur les ultras aille dans notre sens. » Peu importe, la « corbeille » Philippe Séguin subsiste, mieux remplie que jamais.

Et Jean Vuillermoz se souvient du temps où il arpentait les travées du Parc avec l’ancien président de l’Assemblée nationale en oubliant leurs différences politiques, en en parlant presque comme d’un vieil ami : « J’étais président du groupe communiste au Conseil de Paris. Lui présidait le groupe RPR. On se fréquentait au Conseil de Paris, mais aussi au Parc des Princes, où on échangeait en fumant une Gauloise, car il fumait des Gauloises. » Les Qataris sont prévenus. S’ils achètent l’arène de la porte d’Auteuil, ils récupéreront un peu de la mémoire de Philippe Séguin. Un petit peu de l’écho de sa voix aussi, qui doit encore résonner dans certains coins du stade. Ainsi qu’une belle brochette de VIP qui, pour la plupart, ne se souviennent même pas que, pendant des années, un homme qui aurait pu être président de la République était à leur place à se farcir des mauvais matchs sans jamais se lasser.

Par Alexandre Doskov

Tous propos recueillis par AD, sauf mention

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