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Montpellier champion de France 2012 : « Et d’un coup, Montpellier n’est plus une équipe de peintres »

Propos recueillis par Maxime Brigand, Julien Duez, Diren Fesli et Clément Gavard
Montpellier champion de France 2012 : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Et d’un coup, Montpellier n’est plus une équipe de peintres<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

En 2012, le Montpellier HSC devenait champion de France pour la première fois de son histoire, au bout d’une saison où le club de Loulou Nicollin était pourtant programmé pour jouer le maintien. Le triomphe d’une équipe de copains, celle d’Olivier Giroud, Younès Belhanda, Geoffrey Jourdren et tous les autres, faisant la nique au Paris Saint-Germain pour la première année de l’ère QSI. La saison d’une vie pour un club et pour des hommes entrés dans l’histoire du football français. Dix ans après, retour en témoignages et en deux chapitres sur l’épopée pailladine. Au menu de cette seconde partie : une gastro, des genoux qui tremblent, une apothéose et une fête mémorable.

La première partie ? C’est ici.

La CAN, Carlo et une gastro

René Girard : Quand tu es entraîneur, tu ne passes jamais de très bonnes vacances. Tu es là, tu fais le bilan, tu prévois la suite, tu ne penses qu’à la rentrée… Là, on reprend en allant passer quelques jours à Marbella et on doit anticiper parce que certains mecs partent à la CAN : Younès, Jamel, Souleymane…

Sur le moment, on est un peu emmerdé par les départs, mais on se dit que Rémy peut occuper le rôle de Younès et on a raison, parce qu’il s’éclate et prend le taureau par les cornes.

Jamel Saihi : On n’a pas trop envie de quitter le navire, on espère que l’équipe va tenir la cadence, on suit les résultats avec attention. On est au Gabon, ce n’est pas toujours simple de suivre les matchs en direct, mais on pense fort aux gars.

Souleymane Camara : Ce n’est pas facile de quitter le groupe au milieu de la saison, mais on a une grande confiance en l’équipe pour assurer. On sait que les remplaçants vont être au niveau. La preuve : ils ne vont pas perdre un match.

René Girard : Sur le moment, on est un peu emmerdé par les départs, mais on se dit que Rémy peut occuper le rôle de Younès et on a raison, parce qu’il s’éclate et prend le taureau par les cornes.

Rémy Cabella : À l’époque, ce qui est drôle, c’est qu’en général, quand on parle de moi, on parle de Benj’ (Stambouli, NDLR) et quand on parle de Benj’, on parle de moi. Sur la première partie de saison, on est tous les deux des jokers, et là, on se retrouve tous les deux titulaires pour remplacer Younès et Jamel. C’est aussi grâce à Loulou Nicollin, qui dit qu’il a confiance en nous, qu’il n’y a pas besoin de recruter. C’est d’ailleurs à ce moment-là que je lance un pari avec lui, et on n’a qu’une envie : finir ce championnat avec le sourire.

Benjamin Stambouli : Puis, à la mi-février, on va au Parc. C’est ce jour-là que je comprends qu’on va pouvoir lutter. Tout le monde annonce ce match comme un test, le PSG a viré Kombouaré pour mettre Ancelotti…

On a attendu cette revanche depuis le match aller, et les médias nous ont aidés. La France entière imagine qu’on va s’éteindre au Parc. Pas nous, et finalement, c’est plutôt le PSG qui a la pression cette nuit-là.

John Utaka : La veille, je ne suis pas bien. Je dis à René Girard que j’ai une gastro, que j’ai peur de faire un mauvais match… Il va voir Olivier Megel, le kiné, et lui dit de me donner un petit truc pour que ça se calme. À la dernière minute, il finit par me regarder : «  De toute façon, tu joues. Tu n’as pas le choix. » Et je fais plutôt un bon match. Ça arrive souvent quand tu doutes parce que tu fais plus attention aux détails, tu compenses par un peu plus d’efforts, d’attention…

Geoffrey Jourdren : À la base, pour nous, c’est « un match Coca-Cola » , un match vitrine, il n’y a aucun complexe à faire. Pourquoi avoir peur ?

Romain Pitau : Ce match, c’est d’abord l’insouciance des jeunes. Nous, les anciens, on est là pour tenir la baraque. On se dit aussi qu’on va jouer le coup, qu’on ne va pas se défiler. René nous le demande aussi : hors de question de se défiler devant qui que ce soit. Les gens attendent LE moment où Montpellier va flancher, et tout le monde se dit que le match au Parc peut être ce moment.

René Girard : Pour ce PSG-Montpellier, je fais comprendre aux garçons qu’ils ont le talent pour ce genre de matchs. Finalement, on fait 2-2, on nous regarde différemment, peut-être avec un peu plus de rigueur. D’un coup, Montpellier n’est plus une simple équipe de peintres. On vient de vraiment semer le trouble dans les têtes.

Laurent Nicollin : Toute la saison, on essaie d’imprégner un truc : on veut être difficile à bouger. Au Parc, l’extérieur prend conscience de nos qualités, mais je pense que nous aussi. On se demande si en fait, on ne peut pas faire un truc.

Joris Marveaux : On a attendu cette revanche depuis le match aller et les médias nous ont aidés. La France entière imagine qu’on va s’éteindre au Parc. Pas nous et finalement, c’est plutôt le PSG qui a la pression cette nuit-là. Tous les signaux les envoient vainqueurs. Inconsciemment, ils doivent nous prendre de haut et sont surpris.

Souleymane Camara : Nous, à l’intérieur, on sait déjà qu’on peut battre tout le monde et on est à deux doigts de gagner contre le PSG chez lui. Sans ce but de Hoarau dans les dernières minutes…

***

« On a fait tous les tubes… »

Laurent Nicollin : En France, on aime le petit, le numéro 2, pas trop les gros, mais au bout du bout, pour les gens, Montpellier champion de France, c’est un anachronisme. Ça n’a rien de logique. Au début, c’est « un vent frais » , mais le champion, ça doit être le PSG, l’OM, Monaco ou Lyon, pas Montpellier. Il y a un côté : «  Bon, ils sont gentils, mais ils vont finir deuxièmes et ils seront contents… » Mais non, jusqu’au bout, on va faire chier tout le monde. On n’est pas plus cons que les autres, alors, pourquoi pas nous ?

Pendant longtemps, on ne s’occupe pas de nous. Dans Jour de foot, nos résumés durent 10 secondes. Le lundi, parfois, on en parle : « Tiens, on a eu une minute… »

Geoffrey Jourdren : Le week-end, ça me faisait rire. Pendant longtemps, on ne s’occupe pas de nous. Dans Jour de foot, nos résumés durent 10 secondes. Le lundi, parfois, on en parle : «  Tiens, on a eu une minute… »

Laurent Pionnier : Quand tu vois Montpellier en haut, qu’un projet se monte à Paris… Tu ne gênes pas, mais un peu quand même : ce n’est pas hyper sexy. Dans le récit post-match, tu le ressens aussi : on explique nos victoires en disant que l’adversaire a été mauvais. On ne passe pas trop de temps à dire pourquoi Montpellier a été bon.

René Girard : Finalement, on ne sort que rarement du podium. Ça veut dire quelque chose. Une victoire en Coupe, c’est du coup par coup, mais un championnat, c’est la vérité d’une équipe. Il n’y a pas de mensonge. Je me sers du regard des autres sur nous. «  Regardez, ils ne croient pas en vous. Ils vous prennent pour des charlots, ils disent que vous allez craquer !  » Sur la deuxième partie de saison, c’est un levier important. J’imprègne les gars de ça dans les causeries. Quand un entraîneur ou un joueur adverse dit : «  Ils ne devraient pas être là… » Je me sers de l’article, et ça peut faire 100000 paroles économisées. Ça aide à ne pas tomber dans la léthargie.

Henri Bedimo : On a fait tous les tubes : tube de l’été, tube de l’automne, tube de l’hiver, tube de printemps… Souleymane Camara : Sur certains moments, ce n’est pas non plus toujours le fameux « seul contre tous » . À l’extérieur, on voit que les gens sont derrière nous, qu’ils ont envie qu’on finisse devant le PSG, mais il y a un jeu avec la presse. Un exemple : à un moment, il y a des rumeurs de tensions. On fait un tennis-ballon où je suis face à Cyril Jeunechamp. On se prend la tête pour se chambrer, mais une photo est prise, et le lendemain, on lit dans le journal « Montpellier sous tension ». Quand l’article sort, je suis en train de dormir, on m’appelle pour me réveiller et me demander si je me suis battu avec Cyril. Heureusement, ça nous a fait plus rire qu’autre chose.

Cyril Jeunechamp : Sur le moment, la presse fait du grand n’importe quoi. On veut me faire passer pour celui qui se bat tout le temps, alors que Souley est l’un de mes meilleurs potes. C’est la limite du jeu médiatique, quand on tourne les choses pour faire du buzz ou attirer l’attention. Les semaines d’après, on s’est même moqués du journaliste en conférence de presse. Il s’est un peu senti honteux.

Mapou Yanga-Mbiwa : Et on a continué notre petit bonhomme de chemin, tranquilles, en restant pendant longtemps « les guignols » .

À certains moments, l’effervescence est assez incroyable. La Mosson devient bouillante. J’ai parfois des frissons en plein match, ça fait énormément de bruit.

Geoffrey Dernis : Le match de la bascule, pour moi, c’est la réception de Saint-Étienne, fin mars. On gagne 1-0, sur le gong, but d’Olivier. Ce soir-là, je me dis que si on ne fait pas trop les cons, il y a peut-être un truc extraordinaire qui nous attend. Le discours change un peu. Ça devient : «  Combien de joueurs vont faire une belle carrière sur plusieurs années, mais combien ont la chance d’être titrés ? Pas tant que ça. » Alors, autant ne pas avoir de regrets.

Souleymane Camara : Cette victoire arrive au bout d’un match très disputé. Avant qu’Olivier nous libère avec sa reprise de volée fantastique, tout ce qu’on tente est stoppé par Ruffier ou contré par un défenseur. Derrière, on gagne aussi à Marseille, où on ne gagne habituellement jamais…

Olivier Giroud : Au stade, en ville, dans les restaurants, à la plage, on sent un contexte positif. À certains moments, l’effervescence est assez incroyable. La Mosson devient bouillante. J’ai parfois des frissons en plein match, ça fait énormément de bruit.

Mapou Yanga-Mbiwa : Après la victoire contre Saint-Étienne, on prend la tête et on change un peu d’état d’esprit. Les jambes commencent aussi un peu à trembler. Je me dis d’ailleurs qu’heureusement qu’on ne prend la tête qu’à neuf journées de la fin, sinon, ça aurait été invivable. (Rires.) On n’est pas habitués à tenir toute cette pression. En plus, on sait jouer, mais on n’est pas le Barça non plus. Notre force, c’est surtout de savoir défendre, d’être solides, donc quand les équipes commencent à nous craindre, même si on a toujours ce petit truc en plus, ça ne nous facilite pas la vie.

Après ce match contre Évian, toute ma famille est chez moi. Je rentre à la maison et je dis à tout le monde de dégager. Je monte dans ma chambre et je ne fais que pleurer. Ma mère me dit de venir, que mes cousins sont là, mais je veux que tout le monde s’en aille.

Younès Belhanda : Puis, à quelques journées de la fin, il y a ce match contre Évian (match nul 2-2, et Montpellier termine à 9 contre 11, NDLR). Derrière, je réponds à une interview pour L’Équipe, dans laquelle j’allume Olivier. Je suis jeune, je ne le ferais pas aujourd’hui parce que je sais que ça peut déstabiliser un groupe, mais je lui reproche de ne pas avoir pris un penalty décisif dans les arrêts de jeu. Il y a de la frustration aussi parce que je me suis fait expulser, que je sais que je ne vais pas pouvoir jouer les trois derniers matchs, que ça peut niquer la fin de saison… Si ça part en vrille, je le prends pour moi direct. D’ailleurs, après ce match contre Évian, toute ma famille est chez moi. Je rentre à la maison et je dis à tout le monde de dégager. Je monte dans ma chambre et je ne fais que pleurer. Ma mère me dit de venir, que mes cousins sont là, mais je veux que tout le monde s’en aille.

Romain Pitau : Ce carton, ça peut être le grain de sable. Avec les anciens, on essaie de ramener de la tranquillité, de faire redescendre la pression. C’est là que notre rôle est important. Il n’y a pas de conseil des sages, mais c’est naturel. On entre dans un esprit à la Guy Roux, on prend les matchs les uns après les autres et on verra ce qu’il se passera dans le money time. C’est aussi un moyen de ne pas mettre la pression sur les jeunes.

Cyril Jeunechamp : La semaine qui suit le match d’Évian est très importante parce que tout peut partir en couilles. Chacun doit rester dans le projet. On n’en a jamais discuté, mais Olivier ne dit rien. En parlant un peu à tort et à travers, Younès a le défaut de sa jeunesse et il comprend ensuite que ça peut faire mal au groupe. Il y a deux ou trois jours de tension, où les deux ont campé sur leur position, puis on a discuté dans le vestiaire, et le coach a pris la parole. Même les dirigeants sentent que ça peut exploser à ce moment-là. Dans d’autres clubs, je pense que ça pète dans tous les sens. Pas là.

Pascal Baills : Ce n’est pas simple de gérer tout ça. On ne sait pas trop comment contrôler la pression extérieure. Heureusement, derrière le bazar d’Évian, où on a tout eu – l’expulsion de Younès, la baston, le penalty de Souley qui met quinze minutes à être tiré -, on va gagner 2-0 à Rennes.

Vitorino Hilton : Je suis très proche de Souleymane et je n’ai jamais vu quelqu’un d’aussi triste pendant une semaine après son penalty raté contre Évian. Le symbole, c’est que celui qui ouvre le score à Rennes, c’est lui. On est en mode finale et Lille arrive.

***

« Ce soir-là, le stade a tremblé »

Laurent Nicollin : Lille… C’est l’avant-dernière journée et tu peux être champion. Quand tu arrives au stade, tu comprends que tu ne peux pas perdre. C’est une ambiance comme on en voit tous les dix ans.

Dès qu’on entre dans le tunnel, les Lillois comprennent. On est chez nous, nos cerveaux sont verrouillés, prêts. Plus tôt, on est pourtant en train d’écouter la musique dans le vestiaire ou de faire une vanne au kiné. En trente secondes, on a cette capacité de se transformer en combattants impénétrables.

Geoffrey Jourdren : Ce Montpellier-Lille, c’est du quatre étoiles. C’est énorme. La Mosson est au bord de l’explosion. En entrant sur le terrain, je me dis que j’aurais bien aimé vivre ce moment en tant que supporter. Certains me raconteront plus tard que ce soir-là, le stade a tremblé.

Jamel Saihi : Jeune, j’ai fait toutes les tribunes de La Mosson, sauf la Butte Paillade. Je suis comme les personnes dans le public. On ne s’imagine jamais vivre un truc pareil un jour dans notre vie.

Henri Bedimo : Dès qu’on entre dans le tunnel, les Lillois comprennent. On est chez nous, nos cerveaux sont verrouillés, prêts. J’en ai reparlé avec Aurélien Chedjou, et il me l’a confirmé : «  Henri, on a senti que c’était pesant, lourd… » Quelques minutes plus tôt, on est pourtant en train d’écouter la musique dans le vestiaire ou de faire une vanne au kiné. En trente secondes, on a cette capacité de se transformer en combattants impénétrables.

Vitorino Hilton : Lille, c’est la première et la dernière fois que j’ai vu une telle ambiance à La Mosson. En face, il y a une grosse équipe, championne de France en titre, avec Eden Hazard, qui nous pose pas mal de problèmes. On souffre, on subit, mais on tient… Puis, il y a ce ballon d’Utaka, Olive est encore lucide pour le contrôler et il patiente, patiente…

Laurent Pionnier : J’ai l’impression que le ballon de John touche les étoiles. Le contrôle d’Olivier est un contrôle de malade, et au centre, Karim Aït-Fana arrive alors que cinq secondes plus tôt, il est dans la surface pour défendre.

Cyril Jeunechamp : Je suis sur le bord, avec Geoffrey Dernis et Romain Pitau. On s’échauffe. Quand on voit le débordement d’Olive, Karim qui arrive, qui la met au fond, c’est une énorme explosion. Ce match nous propulse en Ligue des champions et nous rapproche d’un potentiel titre.

Olivier Giroud : Sur ce but, tu as tout : l’adversaire, le temps additionnel, la sueur… C’est à l’image de toute la saison, où rien ne nous tombe tout cuit dans le bec. C’est un énième 1-0. Notre bonheur, on l’arrache.

Souleymane Camara : Derrière, on saute tous sur Karim. Le stade est plein, la Comédie aussi…

Tu ne marques pas à la 10e minute, tu marques à la dernière seconde, sur un contre. Tu as l’impression que 100 000 personnes marquent avec Karim.

Rémy Cabella : Tout s’aligne : le monde au stade, le monde place de la Comédie, le but à la dernière seconde… Tu ne marques pas à la 10e minute, tu marques à la dernière seconde, sur un contre. Tu as l’impression que 100 000 personnes marquent avec Karim.

Laurent Pionnier : Finalement, après ce match fermé, où on peine à développer notre jeu, on se qualifie pour la Ligue des champions, un monde qu’on ne connaît que via la PlayStation.

Geoffrey Jourdren : Je suis ému, je pleure au micro de Paganelli, c’est trop bien… Quand ça se termine, je n’ai qu’une envie : rassembler tout le monde et recommencer.

Jamel Saihi : Tout est incroyable. Au coup de sifflet final, je ressasse le chemin parcouru, mais on se concentre aussi sur le dernier match. Dès le lendemain, on se remet au travail. On se doit de finir en beauté.

Vitorino Hilton : La Ligue des champions, c’est beau, mais on a une cerise sur le gâteau. Malgré l’euphorie de nos supporters à Grammont, on ne change rien à nos habitudes : la pinède, le tennis-ballon, les pizzas… Et on part à Auxerre.

***

Psychose, salade de fruits et apothéose

Romain Pitau : Quand on arrive, il faut gérer le contexte, mais on n’a pas le sentiment que le titre peut nous échapper. On est juste pressés que ça arrive.

Je commence à psychoter. Je me dis que des gens ont donné des dessous de table, que le PSG a payé des supporters auxerrois… Il y a tellement de films qui me passent par la tête parce qu’on ne connaît pas tout ça, nous. Honnêtement, à un moment… Je me fais un peu dessus.

Jamel Saihi : C’est forcément particulier. C’est une bonne pression. Le problème, c’est que les événements n’arrangent pas les choses : Auxerre ouvre le score au bout de 20 minutes, le match est interrompu… Mentalement, ce n’est pas un match évident à gérer.

Vitorino Hilton : Normalement, je suis le premier énervé quand on prend un but, mais là, ça ne me fait rien. Je prends le ballon, je sais qu’on va revenir, je suis serein.

Younès Belhanda : Et John égalise. Ça inverse la dynamique, mais on voit des rouleaux de papier toilette tomber des tribunes. Moi, je suis suspendu, j’ai peur qu’on se ramollisse, que le rythme soit cassé en deux.

Mapou Yanga-Mbiwa : Ce scénario, c’est trop, et je commence à psychoter. Je me dis que des gens ont donné des dessous de table, que le PSG a payé des supporters auxerrois… Il y a tellement de films qui me passent par la tête parce qu’on ne connaît pas tout ça, nous. Honnêtement, à un moment… Je me fais un peu dessus.

Geoffrey Jourdren : Dans mon but, j’ai tout reçu : des pommes, des bananes, tout. C’est une salade de fruits…

Vitorino Hilton : Le match est arrêté une deuxième fois. Il y a des balles de tennis sur le terrain. Tout le monde sait que le match du PSG est terminé. Sur le terrain, on se dit : «  On ne veut pas savoir le score !  » On veut se focaliser sur nous. Si on fait nul, on est champions. Mais bon… On entend tout le monde dire que Paris a gagné à Lorient, donc je vais voir Mapou : «  On ferme. On ne prend plus de but. Ils ne marquent pas. » Puis, John Utaka marque un deuxième but magnifique, et là, c’est l’apothéose.

Geoffrey Jourdren : Ça me fait plaisir parce que John fait une saison extraordinaire. Tout le monde parle de Giroud, de Belhanda, mais sur la saison 2011-2012, aucun arrière droit n’a réussi à arrêter Utaka. Aucun.

Cyril Jeunechamp : Ce match, c’est comme le premier de ma carrière : beaucoup de concentration, d’application, des choses simples… C’est à nous, les joueurs d’expérience, de tenir le calme. Au coup de sifflet final, je pense à mes filles, au travail effectué pour en arriver là. Tout revient dans la tête. Je ressens beaucoup de fierté d’avoir ramené un titre qui restera historique.

Quand ça se termine, je pars dans un autre monde, je ne me souviens de rien. Je suis complètement déconnecté. Tu as concentré tellement d’énergie sur cet objectif que quand vient le moment où tout ça se termine, tu as du mal à réaliser.

Benjamin Stambouli : Quand ça se termine, je pars dans un autre monde, mais un monde bizarre. Mon meilleur ami, qui habite Paris à l’époque, entre sur le terrain, avec mon frère et sa femme. Je les prends dans mes bras, mais je ne me souviens de rien. Je suis complètement déconnecté. Tu as concentré tellement d’énergie sur cet objectif que quand vient le moment où tout ça se termine, tu as du mal à réaliser. On te dit : «  Ça y est, tu peux kiffer… » Mais tu as du mal à comprendre. C’est sûr ou pas ? On peut y aller ?

Laurent Nicollin : C’est une soirée bizarre, le dénouement est long. En plus, c’est particulier, parce qu’on n’est pas chez nous, qu’on a envie de rentrer sur Montpellier…

Laurent Pionnier : Je te laisse imaginer les nerfs du boss, qui a dû vivre un match long de trois mi-temps. La sensation d’être champion, personne n’y est préparé, encore moins des joueurs comme nous. À la fin, on redevient tous des gamins, lui le premier. On essaie de lui faire les cheveux le soir du match à Auxerre. On a les bombes, tout est prêt, mais il ne veut pas parce qu’il veut faire ça bien, avec son coiffeur, parce que deux jours plus tard, il doit aller négocier des contrats et repartir au boulot.

Geoffrey Dernis : Il n’a pas poussé de grosses gueulantes lors de la saison, René s’en est très bien chargé. À Auxerre, il est sur le banc avec nous, et jusqu’au deuxième but, on se dit qu’il ne va pas tenir. Il est là, en stress, il respire fort. À chaque action, il se creuse la tête, il souffle, il met ses mains sur les genoux. Il te donne tellement qu’il mérite d’avoir ce titre.

René Girard : Autant je ne me suis jamais dit qu’on pouvait être champions de France, autant à Auxerre, je n’ai jamais pensé qu’on pouvait perdre le titre. Pour moi, le seul moment où on peut le perdre, c’est contre Lille. Auxerre, même si le scénario est épique, que ce n’est pas une fin de saison normale, je pense que notre destin est écrit…

Olivier Giroud : Dans le vestiaire, on retrouve Loulou. On ne sait pas s’il est en train de rêver ou quoi. Il est essoufflé. Il a l’air de se dire : «  Bordel, mais qu’est-ce qu’on vient de faire ?  » Il est en transe, trempé. C’est du pur bonheur.

***

La fête des héros

Rémy Cabella : Être champion, ça n’arrive qu’à certaines personnes. Avec Loulou, on se chambre pas mal, et il y a donc ce pari : en cas de titre, il doit se teindre les cheveux et me rembourser la peinture de ma voiture que j’ai fait peindre en orange. Ça coûte super cher. (Rires.) Je lui amène la facture, mais je suis jeune, donc je la gonfle un peu, sauf qu’il y a une chose à laquelle je ne pense pas : Loulou, c’est un businessman, tu ne l’arnaques pas ! Il arrive : «  Oh Cabella, tu m’as pris pour un con, c’est pas ça le prix de ta peinture !  » Finalement, il m’a quand même donné les sous. (Rires.) Et il y a cette photo, la première qui me vient à l’esprit, où on le voit tirer la langue. On dirait Albert Einstein !

On va au Heat Club. Quand on arrive, il y a des caméras, ce qui n’est quand même pas commun. Certains, comme Olivier et Benjamin, restent jusqu’à la fermeture. On a rendez-vous le lendemain matin à 9h, avec toute une fatigue physique, mentale… La journée est longue, la nuit est courte.

Benjamin Stambouli : Quand on rentre à Montpellier, on comprend qu’il se passe quelque chose. La semaine d’avant, déjà, un écran géant avait été installé sur la Comédie pour le match contre Lille. On regardait les images, on se disait : «  Attends, mais c’est plein comme ça la Comédie ?!  »

Jamel Saihi : À l’aéroport, il y a des fumigènes de partout, les joueurs sont sur le toit du bus, c’est le retour des héros. On finit en boîte. On va au Heat Club. Quand on arrive, il y a des caméras, ce qui n’est quand même pas commun. (Rires.) Certains, comme Olivier et Benjamin, restent jusqu’à la fermeture. On a rendez-vous le lendemain matin, à 9h, avec toute une fatigue physique, mentale… La journée est longue, la nuit est courte.

Olivier Giroud : J’ai des amis avec qui j’ai été formé à Grenoble qui connaissaient pas mal de monde à Montpellier. J’ai été bien intégré dans la région. Comme je suis très sociable, ouvert, ça a été vite, et en boîte, il y a cette photo de moi avec le cigare à la bouche. On peut se permettre tous les écarts, on est sur le toit de la France.

Geoffrey Dernis : Olivier, c’est notre tête d’affiche, donc à l’époque, quand on a besoin de quelque chose, on le lui demande. Quand il appelle et dit «  Allô, c’est Olivier Giroud  », personne ne refuse.

Joris Marveaux : C’est marrant de voir le staff à une table, dans ces conditions. On voit le coach danser, ça nous fait rigoler. On a beaucoup chambré René.

La boîte, ça a été un super moment. Peut-être que si on ne raconte pas tout, c’est parce qu’on ne se souvient pas de tout !

Romain Pitau : La boîte, ça a été un super moment. Peut-être que si on ne raconte pas tout, c’est parce qu’on ne se souvient pas de tout !

Rémy Cabella : Avec Benjamin, on a quand même essayé d’être raisonnables parce qu’on devait rejoindre les Espoirs. Ce qu’Olivier ne dit pas, c’est qu’il a aussi failli faire tomber le trophée…

Mapou Yanga-Mbiwa : Cette nuit-là, on veut tout faire, on ne veut pas dormir. Tout le monde est dans les bras de tout le monde…

Vitorino Hilton : Des fois, on se dit qu’on n’a pas assez fêté ce titre. Moi, je ne suis pas allé en boîte. Je suis rentré à la maison, à 2 heures du matin. Je veux être avec ma femme, mes enfants. Ils ont collé des dessins sur le mur à l’entrée de chez moi. Je suis l’homme le plus heureux du monde. Cyril Jeunechamp : C’est vrai qu’on a peu de souvenirs, c’est assez brouillon, mais finalement, la boîte, ce n’est même pas le moment que j’ai le plus apprécié. C’est plutôt le lendemain, quand on se retrouve avec nos familles au Mas, chez le président, que la parade sur la Comédie se prépare…

Geoffrey Jourdren : On mange et derrière, on part. On monte dans le bus à impériale, on se met en haut, mais on ne fait pas attention que chez monsieur Nicollin, il y a beaucoup d’arbres. Sur la route, on entend : «  Attention arbres !  » Certains n’ont pas le temps de se baisser, donc si tu vois plusieurs gars avec des griffures sur les photos du titre, tu as désormais l’explication.

Laurent Nicollin : Cette journée, c’est la finalité. On met une éternité à arriver jusqu’à la Comédie, il y a un monde fou…

Geoffrey Dernis : Ce jour-là, il pleut. On est trempé. C’est fou : il fait toujours beau à Montpellier, mais le jour où tu fais la fête dans un bus à impériale, il pleut. Bref. On pense arriver calmement à la Comédie, on ne s’attend pas à une telle liesse. En plus, on a pris de quoi boire dans le bus, donc certains sont un peu chaud patate.

Olivier Giroud : Malgré le temps, on chante : «  Ici, ici, c’est la Paillade !  »

Sur la place de la Comédie, on commence quand même à réaliser. Peu de sports peuvent réunir autant de monde. Quand on est en haut du théâtre, on se dit qu’ils sont là parce qu’on a fait quelque chose d’exceptionnel, quelque chose de grand.

Geoffrey Jourdren : Le choc émotionnel est énorme. Tu joues au foot pour ça. J’ai un frère qui a été champion de France de full-contact, et là, je me dis : « Putain, toi aussi t’es champion de France de ton sport. T’es champion de France de football ! » Pour moi, c’est un sommet. Ce titre, c’est comme une finale de Coupe du monde. La ville explose, les gens sont sur les ronds-points…

Laurent Nicollin : C’est à la fois surprenant et réconfortant. On ne peut pas oublier cette communion avec notre public, où il y a des supporters, mais aussi des personnes plus détachées, des gens de la ville ou de la région, qui sont fières de nous. On a créé une unité grâce à ce titre.

Laurent Pionnier : Ce titre, c’est l’aboutissement d’efforts, de sacrifices, mais à la fin, tu ne vois que des gens heureux : des dirigeants heureux, des joueurs heureux, un peuple heureux.

Cyril Jeunechamp : Sur la place de la Comédie, on commence quand même à réaliser. Peu de sports peuvent réunir autant de monde. Quand on est en haut du théâtre, on se dit qu’ils sont là parce qu’on a fait quelque chose d’exceptionnel, quelque chose de grand.

***

« C’est l’anti-foot business, c’est le foot de potes »

Joris Marveaux : Aujourd’hui encore, il y a des moments où je ne réalise pas trop. On n’était pas prêts pour ce qui s’est passé. Pour beaucoup, gagner une coupe fait partie d’un plan de carrière. Nous, ce n’est vraiment pas le cas… Sauf qu’aujourd’hui, on a une ligne sur notre palmarès. On a su rivaliser avec les plus gros, et même ceux qui ne suivaient pas le foot ont entendu parler de notre titre.

Benjamin Stambouli : On ne l’a tellement pas vu venir… Derrière, j’ai été champion avec le PSG, avec qui j’ai aussi gagné des matchs au couteau, mais la dynamique n’a pas été la même. En plus, c’est notre club, celui que l’on a été supporté en tribunes quand il y avait Lafourcade, Moullec…

Younès Belhanda : Des mecs à qui j’avais honte de demander une photo. Un pro, ça me faisait peur. (Rires.)

C’est toujours réconfortant de voir un club pouvoir être champion de France comme ça. Ça rappelle les titres d’Auxerre ou Lens. Montpellier, c’est un champion « humain », quoi. Ça donne peut-être plus de valeur à notre titre, même si ça, tout le monde s’en branle probablement.

Laurent Nicollin : Ce titre a fait grandir le club. D’un coup, on a changé de planète. On a pu acheter notre siège, renforcer nos infrastructures, notre centre de formation… Aujourd’hui, on a des choses qui nous appartiennent. On a bâti notre patrimoine. On a essayé d’être intelligents et de pérenniser le club.

Younès Belhanda : Un champion comme nous aujourd’hui, ce serait qui ? Brest ? Montpellier, ça sort de nulle part. Même Rennes a un milliardaire à sa tête. Nous, le club a été monté par un mec qui a tout fait par lui-même. C’est beau. C’est l’anti-foot business, c’est le foot de potes…

Benjamin Stambouli : C’est toujours réconfortant de voir un club pouvoir être champion de France comme ça. Ça rappelle les titres d’Auxerre ou Lens. Montpellier, c’est un champion « humain » , quoi. Ça donne peut-être plus de valeur à notre titre, même si ça, tout le monde s’en branle probablement.

Romain Pitau : La différence avec mon titre de 1998 avec Lens, c’est que je passe d’une extrême à l’autre. À Lens, j’ai 21 ans, je suis remplaçant, je suis globalement dans la découverte. Montpellier, c’est 14 ans plus tard, je suis un peu, en quelque sorte, le Jean-Guy Wallemme du MHSC sur ce titre. Je suis dans la transmission et inconsciemment, je pense que je me suis servi de ce que j’ai appris avec les cadres du Racing pour transmettre certains messages.

Jamel Saihi : On se dit que ça passe vite, le temps. On n’a pas vu les dix dernières années passer. J’ai l’impression que c’était hier. Un Montpellier champion, ça arrive pourtant tous les 100 ans.

Il n’y a pas un mois où je ne vais pas sur YouTube. Des fois, monsieur Nicollin me manque, donc je regarde des vidéos. Tu as des super montages de la saison du titre, avec des musiques tristes. J’ai limite la larmette. Ça me bouscule.

René Girard : J’ai été champion de France en tant que joueur, mais avec Bordeaux, la référence de son époque. Le faire avec Montpellier… Impensable, mais on n’a jamais caracolé en tête, avec 10-15 points d’avance. Ça a toujours été un match, puis l’autre, sur la corde raide, impossible de lâcher… C’est d’autant plus beau. Quand tu es coach, tu n’as pas trop de temps pour le superflu : tu ne penses qu’au match qui vient de se finir, tu passes ton temps à compter, à prévoir… Mais là, je savoure.

Geoffrey Dernis : Quand tu parles avec les gens du coin, tu sens qu’on a laissé une trace, qu’on a créé des images. Ils nous disent : «  On était heureux, vous n’imaginez même pas… » Mais si, on imagine très bien, parce qu’on l’était autant que vous ! Un titre, c’est intense émotionnellement. De l’extérieur, les gens estiment que les joueurs doivent juste donner des émotions, mais on en ressent aussi. Et quand on a repris quelques semaines plus tard, on était encore dans les images, les émotions, l’intensité du titre… Le plus dur, c’est de repartir après ça, même si à 32 ans, je savais que je ne pouvais plus faire mieux.

Olivier Giroud : Il m’arrive souvent de repenser à tout ça. J’en ai même encore parlé récemment avec mes coéquipiers au Milan. Parfois, je revois des buts, des actions, des photos. À chaque fois, ça me fout les frissons. L’autre jour, par exemple, j’ai revu le but de fou de Younès au Vélodrome.

Geoffrey Jourdren : Il n’y a pas un mois où je ne vais pas sur YouTube. Des fois, monsieur Nicollin me manque, donc je regarde des vidéos. Tu as des super montages de la saison du titre, avec des musiques tristes. J’ai limite la larmette. Ça me bouscule.

Laurent Pionnier : On a noué un lien pour la vie. On est tous des « champions 2012 ». C’est comme ça.

***

La petite musique de fin

Geoffrey Jourdren : Contrairement à d’autres, j’ai été content que ça s’estompe. J’ai vite eu envie de retrouver le silence, la discrétion. Je n’aime pas être connu. Je suis timide. J’aime bien être dans mon coin.

Olivier rêvait d’Arsenal. Ça a été un crève-cœur, mais on n’allait pas l’empêcher de vivre son rêve. Dans notre malheur, il a accepté d’augmenter sa clause pour qu’Arsenal paie un peu plus cher. Ça, ils ne l’ont jamais su. On a récupéré deux millions d’euros de plus.

Laurent Nicollin : Après un titre, soit tu veux maintenir ton club en haut, ce qu’a réussi à faire Lille après son titre de 2011, soit tu te plantes. Tu ne dois pas mettre en péril ton club. Tu dois assurer une transition. La chance qu’on a eue, c’est que tous les gars ont voulu faire la Ligue des champions avec Montpellier. On a fait des ajustements financiers, on a notamment hissé le salaire de Younès à sa juste valeur. Le seul « échec » , c’est Olivier, puisqu’il a vite donné son accord à Arsenal. Il en rêvait. Ça a été un crève-cœur, mais on n’allait pas l’empêcher de vivre son rêve. Dans notre malheur, il a accepté d’augmenter sa clause pour qu’Arsenal paie un peu plus cher. Ça, ils ne l’ont jamais su. (Rires.) On a récupéré deux millions d’euros de plus.

Laurent Pionnier : En Ligue des champions, on a ensuite fait ce qu’on a pu avec ce qu’on avait. Il y a des petits détails qu’on n’a pas su maîtriser par manque d’expérience. Je me souviens aussi des petits changements avec le protocole, d’avoir notamment dû faire changer mes gants à la veille d’un match parce que le Uhlsport était écrit en trop gros.

Geoffrey Jourdren : Ça reste aussi de grands souvenirs. Je me souviens d’une organisation millimétrée, d’ambiances de dingue, de la petite musique. Parfois, je regardais : « Wow, le stade de Schalke, c’est grand… Il y a tellement de monde… »

Laurent Nicollin : La C1 à Montpellier, c’est un peu irréel. Même si on a pris que deux points, on n’a pas été ridicules. On a même fait un super match contre Arsenal à La Mosson. Les deux seuls points qu’on prend, c’est contre Schalke, qui termine premier de la poule… On a simplement manqué d’un peu d’expérience. Ça fait aussi partie de l’apprentissage.

Je garde en mémoire le tirage de la Ligue des champions. J’y suis allé avec Carlo Ancelotti. Avant, il y a toujours une journée réservée aux entraîneurs. J’ai mangé avec lui et Antonio Conte. Carlo n’avait aucune rancœur, il a été d’une grande gentillesse avec moi. Un vrai gentleman. Moi, j’étais là, comme un bleu, lui avait l’habitude, mais on a passé un bon moment.

Romain Pitau : Jouer la Ligue des champions, je ne l’aurais jamais cru. Pour l’anecdote, je me fais expulser lors du match contre Gyor en Ligue Europa, l’année après la cinquième place. À ce moment-là je me dis que la Coupe d’Europe, c’est fini pour moi. Là, je joue finalement la Ligue des champions. C’est un super bonus. On ne se bat pas avec les mêmes armes que les autres, mais ce que tu gagnes en un an en Ligue des champions, il te faut trois ou quatre saisons de Ligue 1 pour l’acquérir. Il y a notamment ce match contre Schalke, où je ne sais toujours pas ce qu’il s’est passé : René me fait entrer à la mi-temps et tout ce que je tente fonctionne. C’est exceptionnel. Je marche sur l’eau. Je suis en fin de carrière, je sais qu’il ne me reste plus beaucoup de matchs, donc je me dis que je ne vais pas calculer et me faire plaisir.

Souleymane Camara : On pourra dire à nos enfants qu’on a pu jouer la Ligue des champions. Rien que pour la petite musique, c’est très sympa.

Vitorino Hilton : Moi, je connaissais la compétition, mais on a joué que contre des grosses équipes. L’aventure a quand même été belle. En plus, on a retrouvé Olivier en jouant contre Arsenal.

Cyril Jeunechamp : Même du banc, ça te prend aux tripes. On ne voyait ça qu’à la télé. J’étais comme un gamin… On a pris des leçons d’efficacité, mais ça a sûrement profité aux jeunes qui s’en sont servis pour plus tard.

René Girard : Je garde en mémoire le tirage de la Ligue des champions. J’y suis allé avec Carlo Ancelotti. Avant, il y a toujours une journée réservée aux entraîneurs. J’ai mangé avec lui et Antonio Conte. Carlo n’avait aucune rancœur, il a été d’une grande gentillesse avec moi. Un vrai gentleman. Moi, j’étais là, comme un bleu, lui avait l’habitude, mais on a passé un bon moment. Derrière, la saison se fait, et en juin 2013, ça s’arrête. J’ai peut-être eu une phrase maladroite. Le président a sûrement voulu une réponse un peu plus rapide de ma part, mais c’est comme ça. Beaucoup m’avaient dit que ça ne durerait pas avec le président Nicollin, mais on a quand même passé un peu de temps ensemble… C’est même le président avec qui je me suis le plus entendu dans le foot. C’est la personne la plus droite : il te serre la main, c’est réglé. Pendant quatre ans, ça n’a été que du bonheur.

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Propos recueillis par Maxime Brigand, Julien Duez, Diren Fesli et Clément Gavard

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