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Le jour où CR7 s’est fait les Bleuets

Avant de devenir la machine à buts du Real Madrid, Cristiano Ronaldo était ce jeune garçon aux mèches blondes, futur grand espoir du Portugal. Barragiste pour l'Euro 2004 Espoirs, l'ailier en avait profité pour montrer son talent face… à la France.
« On en avait déjà entendu parler. Il jouait au Sporting Portugal à ce moment, mais il avait déjà la cote un peu partout. Sans avoir joué contre lui, on connaissait sa réputation. Et sur le terrain, on a bien vu ses qualités. » Depuis la région de Pérouse où il effectue sa préparation d’avant-saison, Bernard Mendy garde en mémoire cette première fois où, le temps de deux matchs consécutifs, les jeunes coqs avaient eu le temps de se frotter à l’un des futurs meilleurs joueurs du monde. « Même si on voyait clairement qu’il avait des aptitudes pour devenir Ballon d’or, on savait qu’il ne serait pas le seul danger, détaille Mendy. Ils avaient aussi Quaresma, Heldér Postiga ou leur capitaine Ricardo Costa. Mais nous aussi, on était pas mal : Djibril Cissé et Philippe Mexès étaient redescendus des A pour nous filer un coup de main. » En somme, on assistait probablement à ce qu’il se faisait de mieux dans les deux pouponnières de chaque nation, le tout en match aller-retour. Grand artisan de la victoire des siens à Guimarães grâce à un doublé (2-1), le Djib’ place la France dans une position très confortable avant le match retour prévu le 17 novembre 2003, au stade Gabriel-Montpied, à Clermont-Ferrand. En réalité, c’est le début des emmerdes pour Cissé et sa bande.
Arbitrage foireux et provoc’ portugaise
Au cœur de l’Auvergne, la France joue donc sur ses terres la qualification pour le tournoi U21 en Allemagne. Enfin, officiellement. Grâce à une belle idée de la FFF, les Bleuets reçoivent dans une ville hôte de la 2e communauté portugaise de l’Hexagone. Résultat des courses : des sifflets pendant la Marseillaise pour un match qui n’avait pas besoin d’une pression supplémentaire. Dès le début de match, le blond peroxydé est bien cerné par l’arrière-garde lusitanienne. Milieu de terrain titulaire, Lionel Mathis raconte. « Les Portugais étaient attentifs et ils avaient raison après le match aller de Djibril, mais je n’ai pas vu de traitement de faveur particulier. En revanche, l’arbitrage était particulièrement mauvais. Et sur un match aussi important, ça fout vraiment les boules. » Avec malice, le Portugal parvient à tirer son épingle du jeu : Quaresma trouve CR7. D’une demi-volte, le prodige effectue une frappe en pivot pour surprendre Mexès au marquage et battre Nicolas Penneteau (29e). Le match est lancé.
« Cristiano Ronaldo et Quaresma permutaient beaucoup durant la partie, donc j’ai dû les avoir tous les deux au marquage, décrit Mendy. Ils avaient une vraie force offensive, mais on pouvait répondre à tout moment avec Djibril, Bamogo ou Sinama-Pongolle. » Pas faux, puisqu’avant la pause, Cissé égalise sur un centre de Mendy. 1-1, balle au centre, avant le premier tournant du match. Dans les secondes restantes avant le retour aux vestiaires, Djibril se chauffe avec Raúl Mereiles et Mario Sergio. Bousculé par ce dernier, Cissé explose et lui assène un coup de pied. Le joueur s’effondre, l’arbitre Robert Styles ne voit que le coup de Cissé : c’est le rouge. Pendant que l’Auxerrois vient de faire une croix sur l’Euro 2004 chez les A, l’atmosphère est lourde dans le vestiaire bleu. « Ce n’est pas un moment facile à gérer, avoue Mendy. Djibril, c’était un peu l’exemple à suivre pour nous les Espoirs, on souhaitait tous suivre ses traces. Raymond Domenech a pris la parole pour nous dire que même à 10 contre 11, on avait les capacités pour s’imposer, c’était de vraies paroles d’entraîneur. Il fallait tenir le coup mentalement pour aller chercher cette qualification. » En face, le Portugal est prêt à achever son œuvre.
« Des émissaires avaient trouvé des seringues à la sortie »
De nouveau sur la pelouse, la France cherche à sortir de cette spirale négative. Mais avec un joueur en moins, difficile de se créer des occasions. Toujours à l’affût, le Portugal accentue sa pression et tandis que Mexès protège son ballon, Postiga met lui aussi un coup de pied au défenseur. Et les protestations du grand blond envers Styles ne lui apporteront qu’un carton jaune. « Les Portugais se devaient d’être agressifs, vu qu’ils avaient perdu chez eux, explique Mathis. Mais je n’arrive toujours pas à comprendre que certains de leurs attentats n’aient pas été sifflés. » Par le biais de l’homme en noir, la température augmente lorsque, sur un corner, Quaresma trouve la tête de Bruno Alves pour emmener tout ce beau monde en prolongation.
Chaque équipe aura sa chance : Cristiano Ronaldo trouve le poteau, puis Sinama-Pongolle se voit refuser un but par le corps arbitral. À tort, histoire de boire le calice jusqu’à la lie. Tendu pour tendu, cela se jouera donc aux tirs au but. Chez les Bleuets, Mexès et Évra loupent leur tentative, quand dans la Selecção, Cristiano Ronaldo se charge du tir au but vainqueur. Mathis rumine encore : « On était très remontés envers l’arbitre, à se demander si ce n’était pas un cauchemar… Quand on revoit le match, c’est un pur scandale. » Pendant que certains Espoirs pleurent suite à la défaite, les Portugais se lâchent tous ensemble. « Après la rencontre, le vestiaire visiteur avait été complètement saccagé avec l’euphorie de la victoire, se souvient Mendy. Des émissaires avaient trouvé des seringues à la sortie, mais il n’y a pas eu d’analyses derrière pour prouver un quelconque dopage… » Sans confirmer la thèse, Mathis ajoute : « Les Portugais avaient refusé de se soumettre à un contrôle antidopage, car il n’était pas diligenté par l’UEFA. » De quoi rester amer.
Par Antoine Donnarieix