L’Angleterre en pleine Bérézina
Encore une fois, l'Angleterre déçoit ses supporters. Avec cette piteuse défaite en Russie, les hommes de McClaren ne sont désormais plus maîtres de leur destin et devraient selon toute vraisemblance regarder l'Euro 2008 à la télé...
C’est la troisième “McCalamité”. Après le nul 0-0, le 7 octobre 2006, à Old Trafford contre des Macédoniens pas végétatifs, et la défaite en Croatie, nette et sans bavures 2-0 le 11 octobre 2006, la fessée reçue à Moscou boucle le fiasco de ces éliminatoires pour l’Angleterre. Le tout sous les rires facétieux de Roman Abramovitch dans sa loge. Quelque part, c’est aussi un peu sa victoire, lui qui a foutu un beau bordel dans le football anglais depuis qu’il a mis le pied sur le sol britannique.
Les joueurs de Sa Majesté ne devraient logiquement pas – à moins d’une défaillance sensationnelle de la Russie – embarquer pour la Suisse l’été prochain. Poignardant une nouvelle fois un public qui souffre tant depuis la Coupe du Monde 66. 41 ans que le Royaume subit, ou s’inflige, de lourdes pénitences.
1970, en quarts du Mondial, les bévues du goal Peter Bonetti profitent à l’Allemagne qui l’emporte 3-2.
1973, le gardien polonais sort le match de sa vie, 1-1, et empêche les Anglais de participer à la Coupe du Monde 74.
1986, la main de Dieu dans ta face.
1988, les hommes de Bobby Robson se crashent en poules de l’Euro avec une sale défaite contre la République d’Irlande 1-0 en prime.
1990, les penaltys sourient à l’Allemagne en demi-finale, Gazza pleure.
Pas de World Cup 94.
Euro 1996, les potes de Klinsmann se hissent en finale en battant l’Angleterre.
1998, David Beckham est expulsé, l’Argentine gagne aux tirs au but.
2000, 2002, 2004, 2006 finissent d’achever une équipe qui ne fait plus peur.
Mercredi, dans la torpeur moscovite, c’est toute une formation qui s’est pris les pieds dans le tapis plastique. Le stade a vite pris des allures de goulag. Malgré une pépite de Rooney, contrôle poitrine volée enchaînée façon Van Basten, et un Sol Campbell qui retrouve de sa superbe ; Richards, Gerrard (auteur d’un loupé historique devant le but), Joe Cole étaient à des kilomètres de leur niveau, alors que les paris de McClaren, que sont Barry et Lescott, auraient mieux fait de louper l’avion. Puis Paul Robinson, qui avait pourtant bien débuté, puis l’arbitre…
Pour avoir échoué avec un tel groupe, puisque la qualif’ relève désormais du miracle, Steve McClaren est évidemment sur la sellette, la plèbe lui conseillant vivement un arrêt, définitif, au stand. Les bookmakers s’agitent pour deviner son successeur. Mourinho est favori, suivent Scolari, Capello et le bourreau de la semaine, Hiddink.
Économiquement, la déroute, si elle débouche sur une non-qualification, équivaut à un but contre son camp dans les derniers instants d’une finale. La perte sèche est d’ores et déjà estimée à 2 milliards d’euros pour les finances anglaises. Les pubs, l’alimentation à emporter, les brasseries, et les supermarchés, seraient les plus gros perdants. L’enseigne Tesco qui négociait pour être le « Supermarché officiel de l’Angleterre » , peut oublier ses rêves de promo spéciale “Euro” sur les boîtes de haricots à la tomate. Les vendeurs de télés, les compagnies aériennes et les agences de voyage s’apprêtent à revoir leurs espérances de chiffre d’affaires en 2008 également. Et Umbro, le sponsor, pourrait faire une croix sur, au minimum, 15 millions d’euros de profits.
Mercredi, dans les pubs d’Oxford Street, vers 18 heures, chaque client a au moins ruminé une fois : « If only Wilkinson played football » . Les Anglais ont bu 33 millions de pintes (véridique) pour célébrer la victoire du XV de la Rose samedi face aux Bleus. Et, sauf exploit des Israéliens face aux Russes, ils en absorberont autant pour la débâcle du onze de McClaren. Mais pour oublier.
Sylvester Stewart
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