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La dernière partition des Busby Babes

Par Maxime Brigand
La dernière partition des Busby Babes

Le 1er février 1958, cinq jours avant la catastrophe de Munich, la troupe de Matt Busby débarquait à Highbury pour étendre un peu plus sa domination sur le football anglais de l'époque. Le tout avec une victoire brillante et difficile (5-4) face aux Gunners, avec le dernier coup d'éclat du génial Duncan Edwards. Sans savoir qu'il disputait là le dernier match de sa carrière de footballeur. Et que Busby décrochait là l'un de ses derniers sourires d'homme.

Les cicatrices sont encore vives. Il faut le voir se déplacer dans le couloir qui le sépare de son bureau. Il tend ses bras, prend appui sur les murs et pousse son corps jusqu’à la table fine. Lui même le sait, il ne devrait pas être là. Au départ, il voulait tout arrêter, ranger son tableau noir, ses cahiers bourrés d’annotations et survivre sur la mémoire de « ses enfants disparus » . Il répétait ces mots : « La souffrance est toujours là. Bien au fond. Vous ne vous en débarrassez jamais. Elle fait partie de vous. Vous êtes seul et d’un coup, sans prévenir, elle revient. Alors, vous pleurez. »

Alors, l’homme s’est tourné vers la religion, la confession, la messe, quelques semaines après qu’un prêtre lui a administré les derniers sacrements dans un hôpital de Munich. Sur ce lit, Matt Busby ne souhaitait qu’une fin rapide. Puis il s’est relevé avec la volonté progressive de devenir « un homme meilleur » . Comme une promesse pour ne pas abandonner les morts. Sa femme lui demande alors : « Ce ne serait pas juste pour ceux qui ont perdu quelqu’un qu’ils aimaient. Je suis sûre que ceux qui sont partis auraient voulu que tu continues. » Pour construire une équipe, reconstruire un club et bâtir un groupe capable de vaincre le destin. Et honorer les vingt-trois disparus de ce jeudi 6 février 1958.

La machine

Ce jour-là fait partie des journées où chacun sait ce qu’il faisait au moment où il apprit la nouvelle. George Best, lui, n’avait que onze ans et restera marqué à vie par les titres du Belfast Telegraph : « Un désastre frappe la plus connue des équipes de football. L’avion qui transportait Manchester United s’écrase et prend feu. Les survivants toujours entre la vie et la mort. » Le club anglais venait d’assurer sa qualification pour la demi-finale de Coupe d’Europe des clubs champions après un nul à Belgrade contre l’Étoile rouge (3-3). Manchester United était alors une machine qui marchait sur l’Angleterre et rêvait de marcher sur l’Europe du foot. Mais ce jour-là, l’avion qui ramène l’équipe à Manchester ne décollera jamais, terminant sa course dans une maison lors d’un troisième essai fatal.

Une aile embrasera un réservoir de pétrole pour libérer une explosion destructrice et indélébile sur l’histoire du club britannique qui perdra huit joueurs dans l’accident. Huit Busby Babes : Duncan Edwards, Roger Byrne, David Pegg, Tommy Taylor, Eddie Colman, Billy Whelan, Mark Jones et Geoff Bent. Moyenne d’âge : 23 ans. Bobby Charlton sera l’un des miraculés et obtiendra la liste des victimes sur son lit à l’hôpital Rechts der Isar de Munich. Busby, l’entraîneur historique du groupe, aussi. Les images défileront pendant des jours, dans les cinémas, lors des journaux télévisés. Les supporters de Manchester United se réuniront à Old Trafford pendant de longues semaines jusqu’à la prise de parole de Matt Busby, crachée par les hauts-parleurs du Théâtre des Rêves. Il annoncera alors que la vie doit être plus forte. Pendant ce temps, Duncan Edwards, joueur considéré comme le plus talentueux de sa génération, est enterré à Dudley, où son père travaille la journée.

Arsenal, le loser élégant

Du souvenir commun reste un dernier match joué, tous ensemble. Best aimait répéter qu’il « détestait le dimanche parce qu’il n’y avait pas de football » . Le gamin vivait dans la passion de Manchester United, ne ratait aucun article, aucun résultat, aucune image. Ce 1er février 1958, soit cinq jours avant la catastrophe, les Red Devils étaient à Londres pour disputer une rencontre de championnat, à Highbury, face à Arsenal. Sans savoir qu’il s’agissait de leur dernière sortie ensemble sur les terres britanniques, les hommes de Busby offriront ce jour-là un feu d’artifice offensif et, pour certains, encore, l’un des plus beaux matchs de l’histoire du football anglais.

Face à plus de 63 000 personnes massées dans le vieil Highbury, les Busby Babes s’imposeront 5-4 avec un doublé de Tommy Taylor, un but de Charlton, un pétard de Duncan Edwards et un dernier de Dennis Viollet. L’ancien adjoint d’Arsène Wenger, Pat Rice, alors âgé de huit ans et fraîchement débarqué de Belfast, racontera au Daily Mail en 2008 avoir été « impressionné par la facilité et l’intelligence des joueurs de Manchester United face auloserélégant d’Arsenal » . Manchester United vient alors de remporter deux titres de champion d’Angleterre consécutifs et commence à globaliser l’amour qu’il génère, Rice expliquant que « la plupart des enfants irlandais étaient déjà à l’époque pour Manchester United, car ils en avaient les noms » .

Vidéo

L’artiste Duncan Edwards

La plupart des historiens du club cite en référence ce match d’Highbury comme symbole du cœur des Busby Babes, n’hésitant pas à parler d’une « partition d’artistes » selon Gary James. Le tout emporté par les cerveaux enfantins de Busby, Charlton et Edwards, et le talent montant du jeune Eddie Colman. Voir évoluer Bobby Charlton et Duncan Edwards ensemble était comparé à l’époque à aller au théâtre, tant le génie de Charlton était grand et le talent d’Edwards sans limite. Certains estiment encore aujourd’hui que le gamin, disparu à l’âge de 21 ans, aurait pu devenir l’un des meilleurs joueurs du monde.

Reste que ce jour-là, sur la pelouse londonienne, le Sunday Pictorial’s tombera dans les grandes largeurs sur sa responsabilité lors du quatrième but des Gunners : « Le jeu d’Edwards au cours de ce match à rebondissements ne peut pas impressionner le sélectionneur de l’équipe d’Angleterre, Walter Winterbottom, qui assistait au match. Sur le quatrième but d’Arsenal, il aurait dû dégager au lieu de jouer avec la balle. » Mais Edwards était à l’image de son Manchester United. Il était joueur, génial et déstabilisant. Le reflet d’un groupe unique, talentueux, appelé à asseoir son règne pendant de longues années sur l’Angleterre du foot. Il faudra attendre des mois, des années, en achetant à l’extérieur du club pour monter rapidement une équipe. Une unité qui remportera la première C1 de son histoire dix ans après Munich. George Best avait alors vingt-deux ans.

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