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John Hartson : « Je suis extrêmement chanceux d’être encore là »

Propos recueillis par Thomas Andrei
11 minutes
John Hartson : « Je suis extrêmement chanceux d’être encore là »

Été 2009, John Hartson, jeune retraité, apprend qu’il a un cancer des testicules. La maladie s’est rependue jusqu’au cerveau et se propage plus tard vers ses poumons. Pourtant, l’ancien buteur du Celtic est toujours debout. Mais ce dont il semble le plus fier, c’est une autre victoire, celle contre son addiction aux jeux. Alors il le répète souvent : il n’a pas placé un seul pari en six ans. Son autre fierté, c’est la maison qu’il a construit au sud d’Édimbourg pour se rapprocher de la famille de son épouse écossaise. C’est de là qu’il s’étale pendant une heure sur CreditFix, la société de recouvrement de dettes pour laquelle il travaille, mais aussi sur des sujets plus funky. Type vols de mouton et balades en hélico.

Salut John. Comment ça se fait que tu travailles pour CreditFix ?Ils m’ont approché parce que j’ai eu des difficultés financières dans ma vie. J’étais accroc aux jeux pendant vingt ans. Là, ça fait six ans que je n’ai même pas acheté un billet de loterie. Je vais toujours aux réunions de joueurs anonymes. CreditFix était intéressé par le fait que je sois sorti de mon addiction et aie comblé mes dettes. Ils ont pensé que je pourrais aider et inspirer d’autres gens. Je suis donc ambassadeur et je conseille des gens de se tourner vers CreditFix, qui ont des professionnels pour s’occuper de leurs dettes. Certains ont juste été mal conseillés, d’autres dépensent juste beaucoup trop. D’autres ont fait de mauvais placements immobiliers, ont divorcé. Il y a plein de manières de s’endetter…

C’était comment de grandir dans le quartier de Talycoopa, à Swansea ?J’ai eu une enfance fantastique, avec des parents très présents. J’ai grandi dans des logements sociaux, nous n’avions pas beaucoup d’argent, donc pas de Nike ou Adidas flambant neuves.

J’ai eu une enfance fantastique, avec des parents très présents. J’ai grandi dans des logements sociaux, nous n’avions pas beaucoup d’argent, donc pas de Nike ou Adidas flambant neuves.

On n’allait jamais à l’étranger, on partait en vacances dans un camping de caravanes pas très loin. Mes parents travaillaient très dur et ne gagnaient pas beaucoup d’argent. Ma mère était infirmière psychiatrique et mon père faisait tout ce qu’il pouvait pour rapporter de l’argent pour ses enfants. Un homme bien. Il réparait des enseignes, il travaillait sur des échafaudages. Mais nous étions une famille heureuse.

Tu aimais jouer aux cartes quand tu étais petit ?J’adorais jouer aux cartes ! Avec ma grand-mère, dans le bus de l’équipe, à la maison de quartier. Déjà, l’intérêt principal du jeu de cartes était le pari. C’est pour ça que je voulais gagner. Je voulais retourner cette carte qu’il fallait ! Toutes ces choses qui te conduisent à avoir une addiction. Addiction que j’ai toujours. Je serai toujours un accro qui va mieux. Petit, je jouais aux machines à sous. Je donnais un billet de cinq, on me donnait cinq pièces et ça partait. Puis quand tu grandis, tu commences à parier un peu plus gros. Puis tu ouvres des comptes en ligne. C’est ce que j’ai fait.

Ton père ou tes oncles aimaient le jeu ?Oui ! Ils aimaient parier, mais pas comme moi. Loin de là. Ça a forcément eu une petite influence. Mais ce n’est pas entièrement leur faute. J’ai un frère et une sœur qui n’ont aucun intérêt pour les jeux, par exemple. C’était juste moi. C’était quelque chose en moi qui voulais parier. Les gens me demandent : pourquoi y a-t-il tellement de footballeurs qui aiment les paris ? Je ne sais pas. Certains ne le font pas. Certains préfèrent boire, sortir en club ou draguer. Certains préfèrent les Ferrari ou les vêtements extravagants. D’autres préfèrent aller jouer au golf et voir des comptables. Certains sont très sages. Ils investissent, achètent des propriétés. Nous sommes tous différents.

Quand as-tu réalisé que tu avais un problème ?Il y a six ans. Tu dois être au fond du trou pour t’en rendre compte. Avant ça, je n’écoutais personne. « Laissez-moi tranquille ! Ça va aller. J’ai juste besoin d’un gros coup et ça ira. » Mais c’était hors de contrôle, même si je pensais que ça ne l’était pas. Un soir, ma femme avait fait sa valise et on a eu une conversation à cœur ouvert. Elle m’a dit que si je continuais, on ne pourrait plus être ensemble. C’est là que j’ai commencé à l’écouter. Je suis allé à ma première réunion, avant de faire des conférences où j’expliquais mon combat. Conseiller les autres, parler des mauvais côtés du jeu, ça m’a beaucoup aidé. Il fallait que ça sorte. Je me suis senti lavé.

Qu’est-ce que tu aimais tant dans les jeux et les paris ?(Il souffle) Je ne sais pas.

Quand tu paries, ce qu’il y a de meilleur, c’est de perdre puis d’essayer de te refaire.

J’imagine que c’était l’excitation, l’adrénaline. Regarder deux golfeurs, du cricket, du billard. Je pariais sur tous les sports sauf le foot. C’est fantastique comme ça peut être excitant. Tu vois l’argent arriver sur ton compte… Mais beaucoup de gens disent que ce qu’il y a de meilleur, c’est de perdre puis d’essayer de te refaire. Perdre puis regagner ce que tu as perdu. Puis le double. C’est perdre qui te permet de revenir. Tu as deux fois plus à gagner. Souvent, j’ai gagné, puis je suis sorti. Mais si je perdais, je restais pour regagner tout mon argent.

Tu allais beaucoup au casino ? Tu en aimais un en particulier ?Oh, oui. Beaucoup de casinos. Londres, Glasgow, Birmingham. À celui de Swansea, je connaissais tout le monde. (Il ricane.) J’étais intime avec les croupiers, avec les mecs qui font le black jack, la roulette. On s’appelait par nos prénoms. Je connaissais le staff à l’entrée. J’arrivais et ils disaient : « John, tu veux manger quelque chose ? » Ils savaient que j’étais un habitué. Ce sont des gens très malins.

Tu aimais les courses de lévriers aussi ?Oui, j’avais des chiens : Code Hearts et Left Peg. J’avais aussi un cheval à Lambourn, un endroit connu dans le monde de l’entraînement de cheval, vers Reading. Il s’appelait Rashkin. Je pariais sur mes propres chevaux et chiens. Quand tu es parieur compulsif, tu vas partout où tu peux placer un pari.

Combien un footballeur professionnel peut-il perdre en paris ?Les chiffres ne sont pas importants. Si tu bosses sur un chantier et que tu gagnes 500 livres par semaine et perds 400, c’est pareil que si quelqu’un qui gagne 10 000 livres la semaine perd 8 000. Donc chez les joueurs anonymes, on ne parle pas de chiffres. David, qui vient depuis 20 ans à des réunions, ou Paul ou Alex ou Steven, ce sont tous des chauffeurs de taxi, des videurs, des comptables. Ils savent que j’ai perdu des milliers. Par respect, on ne donne pas de chiffres.

Certains de tes coéquipiers ou entraîneurs ont essayé de t’aider ? Tout le monde a essayé. Un jour, mon vieil agent Jonathan Barnett – l’agent de Gareth Bale – est venu chez moi et a dit qu’il allait commencer à gérer mon argent. Tous mes salaires étaient payés sur son compte. Il me donnait une sorte d’allocation pour la nourriture, les boissons, l’essence. Mais ça n’a pas marché. J’étais très têtu, j’avais la vingtaine et je ne voulais pas qu’on m’enlève mon argent. Alors il a dû abandonner.

Te souviens-tu de la première fois que tu as été vraiment saoul ?Oui. J’avais 16 ans. On était rentré de l’école chez un pote.

Quand on allait au pub avec Paul Merson ou Ian Wright, tout le monde trouvait ça normal. Tu étais tranquille, tu bavardais avec le serveur. Aujourd’hui, en 20 minutes, tu aurais 200 personnes qui seraient là à poster des photos sur Twitter.

Ses parents nous ont fait du thé, puis on a traversé la rue pour aller au pub. J’ai bu 4 Stella et j’étais malade comme un chien. Mais l’alcool n’a jamais été un problème. Je peux passer 6 mois sans un verre. Je dois amener mes enfants à l’école le matin, je ne vais pas être dehors toute la nuit. La plupart du temps, je suis au panaché. Et quand j’avais 20 ans, je ne buvais pas plus qu’un autre gamin de 20 ans. Ça semble juste beaucoup parce que les joueurs sont plus sages de nos jours. Ils savent qu’ils peuvent devenir multimillionnaires. Quand on allait au pub avec Paul Merson ou Ian Wright, tout le monde trouvait ça normal. Tu étais tranquille, tu bavardais avec le serveur. Aujourd’hui, en 20 minutes, tu aurais 200 personnes qui seraient là à poster des photos sur Twitter.

J’ai lu que tu buvais onze pintes dans l’après-midi parfois. Conneries ?C’est n’importe quoi. Si j’avais bu onze pintes dans l’après-midi, j’aurais dormi une semaine derrière. Oui, ce sont des conneries.

À ton époque, les plus grands joueurs buvaient. J’ai lu que Tony Adams…(Il coupe) Tony Adams était alcoolique. Il l’est toujours. Paul Merson avait aussi un problème avec l’alcool. Beaucoup de joueurs aimaient boire, et j’en faisais partie. On allait au pub et on buvait quelques bières. Parfois, on faisait des « déjeuners liquides » . C’était l’époque. C’était pareil à West Ham et Wimbledon. À Manchester United, quand Alex Ferguson est arrivé, il y avait une grosse culture de l’alcool. Bryan Robson, Paul McGrath, Mark Hughes. Ils buvaient tous. Sir Alex est arrivé et est parvenu à freiner ça.

J’allais te demander si c’était vrai que Tony Adams buvait dans les vestiaires. Je n’ai jamais vu ça. On s’est bu des pintes au pub ou au restaurant, mais je n’ai jamais vu personne boire dans les vestiaires.

L’alcool, c’est mauvais pour la santé, mais ça peut aussi te faire faire des choses très drôles. C’est vrai que tu as un jour volé un mouton ? Oh, oui, une fois. Mais j’étais très jeune ! Et ce n’était pas mon idée, mais celle de mes potes de Swansea qui étaient là avec moi. Je me souviens de m’être réveillé le matin et d’avoir vu un mouton dans mon jardin. (Il rit.) On a dû se dépêcher pour aller le remettre en place. Je crois que les gars se souvenaient où c’était. On l’a mis à l’arrière de la voiture. J’avais un Range Rover à l’époque, donc ça rentrait sans problème. Puis je crois qu’on l’a déposé dans le bon champ. J’espère, en tout cas. On ne lui a rien fait de mal.

Tu as une meilleure histoire que ça ou c’est imbattable ? Un samedi, on est allé au Grand National (course hippique de steeple chase mythique, qui se tient à Aintree, ndlr). L’une des personnes avec qui j’étais a gagné beaucoup d’argent. On avait bu quelques verres de vin et on a décidé de louer un hélicoptère. De voler de Aintree, près de Liverpool, jusqu’à Londres pour atterrir en plein milieu des pistes de chiens à Walthamstow. Pour continuer à parier. On avait déjà commandé notre repas, donc c’était prêt quand on est arrivé. On a continué à parier sur les chiens toute la nuit. C’était 12 000 livres l’hélicoptère, mais cette personne venait de gagner beaucoup d’argent, donc ce n’était pas tant que ça. On a bien rigolé. Mais ce n’est pas si différent de ce que font les joueurs maintenant. Tu as des joueurs de Chelsea ou d’Arsenal qui descendent à Monaco au Grand Prix. Je suis sûr que Thierry Henry, Jamie Redknapp utilisent l’hélicoptère de Sky.

C’est vrai que tes coéquipiers de Wimbledon ont mis le feu à tes habits pour ton premier jour ?Oui, c’était normal. Je m’en suis bien sorti, c’était soft. Mon costume était en feu et ils m’ont fait rentrer à la maison en sous-vêtements. C’était Wimbledon, on les appelait le Crazy Gang et ils adoraient ce nom. Le président et le manager encourageaient ça. Je m’y attendais, ça ne m’a pas dérangé. Tu devais l’accepter, parce que comme ça tu rentrais dans le gang.

Ton cancer est totalement guéri ?Ce n’est jamais totalement fini. N’importe qui peut avoir un cancer à n’importe quel moment. Là, je regarde par ma fenêtre et il y a trois mecs qui passent en vélo à côté d’un champ. Ils pourraient avoir un cancer demain. Mon cancer peut revenir demain. Ou dans 15 ans. Ou jamais. Mais je suis clean. J’ai fait la chimiothérapie, j’ai eu deux opérations au cerveau. J’ai une cicatrice. (Il touche un trou sur la base de son crâne avec son index.) J’espère que ça ne reviendra pas…

Tu peux me parler du jour où tu as su que tu avais ce cancer ?C’était horrible. Je ne souhaite ça à personne. J’étais sur un parking à Swansea et je me suis mis à pleurer. Je n’ai pas honte de le dire.

Mon traitement était très lourd. Les gens qui font l’effort de venir, ça veut dire beaucoup. Tu as besoin de beaucoup de force. Tu passes par beaucoup d’émotions. Tu penses aux gens que tu aimes, à l’impact que ta mort aurait sur tes enfants, ta famille.

Peu de gens survivent à un cancer des testicules qui se repend aux poumons puis au cerveau. Je pensais que j’allais mourir. C’est un cancer, pas un rhume ou la grippe. Ça tue les gens. Le mot est horrible. J’ai pleuré pendant trois heures. C’est le temps qu’il m’a fallu pour comprendre que j’avais un cancer. Puis je suis rentré et je l’ai dit à mes proches. On l’a combattu ensemble. Le monde du football m’a beaucoup soutenu aussi. J’ai eu des cartes de soutien des joueurs de Swansea. De ceux d’Arsenal et d’Arsène Wenger. John Toshack est venu me voir avec son fils Cameron, mais je ne pouvais pas vraiment parler. Je me souviens seulement de le voir au bord de mon lit d’hôpital avec mes parents. Mon traitement était très lourd. Les gens qui font l’effort de venir, ça veut dire beaucoup. Tu as besoin de beaucoup de force. Tu passes par beaucoup d’émotions. Tu penses aux gens que tu aimes, à l’impact que ta mort aurait sur tes enfants, ta famille. Mais ils ont fait des miracles. Je suis extrêmement chanceux d’être encore là et de pouvoir voir mes enfants grandir.

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