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Gekas, l’antiquité

Par Adrien Rodriguez Ares
4 minutes
Gekas, l’antiquité

Il ne ressemble à rien. Il n’est pas académique. Il a conquis l’Allemagne. Et il est le premier Grec à jouer en Turquie. Lui, c’est Gekas. Portrait d’un sanguin qui ne porte pas la culotte.

« Il n’est pas bon de la tête, il n’est pas très costaud et sa frappe de balle est très moyenne. » La présentation est signée Ioannis Amanatidis, ancien concurrent en sélection au poste d’attaquant. On pourrait croire à une vacherie même si, pour être complet, il aurait dû ajouter un couplet sur l’implantation capillaire étrange de Gekas. Un drôle de bonhomme, ce Theofanis. Joueur promis au ventre mou et à l’anonymat, il est devenu la pointe hellène sur les cendres de 2004 à force de volonté et de ruse. Formé à Larissa, Gekas ne manque pas de piquant.

À l’issue du Mondial sud-africain, le teigneux avait fait une croix sur une équipe nationale minée par les conflits internes, avant de se dédire un an plus tard : « Les erreurs sont humaines et il faut avoir le courage de les reconnaître. Il est l’heure de dire que quitter la sélection était une erreur, je m’excuse auprès de tous, mon coach, ma fédération et surtout mes équipiers. » Une décision qu’il a sans doute mûrement réfléchie aux côtés de Madame Gekas, très présente dans la carrière de son mari : « Ses critiques sont les pires. Ma femme m’engueule quand je rate une occasion. Elle regarde tous les matchs à la télé. Et quand je joue mal, elle n’y va pas par quatre chemins. »

« Ne pas jouer régulièrement dans mon club me pousse à tout donner en sélection »

Le carafon de l’animal avait fait résonner les murs du Panathinaïkos lorsque le président souhaitait encaisser un chèque allemand. Sans résultat. En 2006, il débarque au VFL Bochum. Le début d’une belle histoire. À lui seul, il parvient à maintenir le club à flot et finit meilleur buteur de Bundesliga avec 20 buts et presque autant d’airs de sirtaki balancés par le speaker à chaque réalisation. L’entraîneur d’alors, Marcel Koller, le surnomme l’ « assurance-vie » , tandis que les supporters donnent du « dieu grec » . De son côté, Gekas se la joue humble : « Franchement, je dois avouer que je ne pensais pas trouver mes marques si vite. » Trois ans après la mode grecque, le Bayer Leverkusen succombe et l’enrôle. Son premier match restera le meilleur : un septuplé en amical pour un 15-1 final.

Il ne trouvera jamais complètement ses marques au Bayer et perdra sa place de titulaire dès sa seconde saison : « C’est compliqué pour moi et dur pour mon moral de rester sur le banc. Ne pas jouer régulièrement en club me pousse à tout donner en sélection. » À mesure que son temps de jeu se réduit, il flambe en Grèce jusqu’à finir meilleur buteur européen en phase de qualification pour la Coupe du monde. Au nez et à la barbe de Rooney, Ibrahimović & co. D’excellentes performances qu’il doit en partie à son prêt à Portsmouth en 2009. Désiré par Tony Adams, il n’entre pas dans les plans du successeur Paul Hart. La Premier League goûtera au fighting spirit de Gekas le temps d’une soixante de secondes. Le Grec explose : « Il devrait me donner ma chance d’abord et après, si j’échoue, il pourra me juger. » Face au mal-être de Fanis, la réponse de Hart se voudra psychanalytique : « Je comprends sa frustration, mais beaucoup de gens sont frustrés dans la vie. »

« Je suis payé pour mettre des buts. Pas pour parler »

Retour en Bundesliga. À peine le temps de sous-louer son appart’ de Leverkusen, qu’il file en prêt au Hertha Berlin, puis définitivement à l’Eintracht Francfort. Deux relégations et des critiques. La plus mémorable restant celle du légendaire gardien Egon Loy : « Je me demande encore comment on peut passer cinq ans dans un pays sans en apprendre la langue. » Réponse du tac-au-tac, au silencieux façon barbouze : « Je suis payé pour mettre des buts. Pas pour parler. » On ne pardonne rien aux Grecs sous Merkel. En conséquence, Gekas met les bouts. Bafouant les règles élémentaires de géopolitique, il s’installe en Süper Lig où il devient le premier joueur grec à traîner ses crampons. En terres ottomanes, il facilite les formalités d’adoption en gratifiant les supporters du Samsunspor d’un triplé face à l’ogre Fenerbahçe. De bonnes performances, à rendre la tête brûlée euphorique : « Mon passage en Turquie est sans doute le meilleur moment de ma carrière. » Et si, en vrai, le meilleur arrivait en « Polukraine » ?

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Par Adrien Rodriguez Ares

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