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France-Maroc, l’autre match politique

Par Nicolas Kssis-Martov
France-Maroc, l’autre match politique

France-Maroc, l’affiche inattendue des demi-finales de la Coupe du monde. Au-delà des considérations sportives, ce match n’a rien d’anodin et sa dimension symbolique, sur de nombreux plans, s’avère évidente. Il faudra qu’Emmanuel Macron, qui se rendra à Doha pour soutenir les Bleus et entretenir nos belles relations économiques avec l’émirat, en ait conscience. Oui, le foot est politique, et surtout entre ces deux pays.

Dans son histoire, la France a déjà rencontré sur un terrain de foot une sélection issue de feu son empire colonial. Le match amical France-Algérie, par exemple, a laissé un douloureux souvenir avec l’envahissement de la pelouse du Stade de France en lieu et place d’une belle réconciliation autour du ballon rond et de la figure de Zinédine Zidane. La défaite devant le Sénégal en 2002 lors de la Coupe du monde en Corée et au Japon avait elle aussi laissé un goût amer. Plus récemment, le 1-0 concédé par l’équipe B des Bleus face à une Tunisie déjà éliminée est plus anecdotique. Tous les passifs historiques ne se valent pas. Le Maroc n’était sur le papier qu’un protectorat et le processus de décolonisation s’est révélé moins long et sanguinaire qu’en Algérie (alors département de la République). La trace en demeure cependant prégnante dans les esprits et il serait erroné de limiter notre perception du colonialisme à la mémoire sélective que nous en conservons de ce côté de la Méditerranée. Après avoir fait tomber l’Espagne, les Lions de l’Atlas réaliseraient un doublé historique de ce point de vue en sortant la France, soit les deux anciennes puissances européennes qui l’avaient dominé et occupé.

Un climat politique tendu

Il existe un autre contexte qui surcharge ce choc inédit, d’actualité cette fois. Le Maroc ne joue pas que pour lui. Comme l’a résumé son sélectionneur Walid Regragui : « On a écrit l’histoire pour l’Afrique ! » Ce poids pèse lourd sur ses épaules et permet en même temps au royaume chérifien, ainsi qu’à Mohamed VI, d’acquérir une stature exceptionnelle. En Afrique, mais également dans le monde arabo-musulman, ce qui n’est pas sans implications profondes lors d’un Mondial se déroulant au Qatar (et c’était d’ailleurs l’argument massue pour justifier cette désignation surréaliste de la part de la FIFA). L’équipe de l’émirat a montré qu’elle était incapable d’assumer balle au pied pareille mission. Le Maroc a repris sa place (faute de pouvoir organiser un tel événement à domicile) de droit en se qualifiant pour les demi-finales. Les Marocains devront être dignes d’un tel honneur, surtout face à un représentant européen, d’une UEFA ultra-hégémonique dans le football, et qui plus est donc une ancienne puissance colonisatrice.

Enfin dernier point, et pas des moindres, le climat politique dans l’Hexagone. La France possède une importante communauté immigrée marocaine (un peu plus de 700 000) et de nombreux Français d’origine marocaine ont la double nationalité. Par ailleurs, la sélection marocaine a entraîné un syndrome « Maghreb United » , y compris chez les Algériens, par delà les rivalités entre les divers États. Au printemps, les candidat-es d’extrême droite à l’élection présidentielle ont rassemblé presque un tiers des votes exprimés au premier tour. Le gouvernement s’apprête à défendre une énième loi restrictive sur l’émigration. Les débats sur l’identité, le « grand remplacement » ou encore la laïcité contre l’islam monopolisent les discussions sur les plateaux de certaines émissions.

De fait, le climat autour et pendant ces 90 minutes sera forcément scruté et examiné sous cet angle polémique. Il fournira un bon baromètre de notre pays sur ces problématiques. Jusqu’alors, les célébrations dans la rue des Marocains de France se déroulaient de manière plutôt festive, et d’autres pays en étaient les victimes. Toutefois, l’instrumentalisation de certains débordements (drapeaux brûlés, etc.) en Belgique après le succès contre les Diables rouges laisse craindre que la moindre tension soit surinterprétée. Car toutes les doubles affiliations ne sont pas ressenties pareillement. On doute ainsi que la joie des supporters marocains en cas d’élimination des Bleus soit aussi bien acceptée que lorsque, par exemple, la communauté portugaise (sur quatre générations) avait transformé les rues de Paris en un Lisbonne bis un certain soir de juillet 2016. Il reste maintenant à parier sur un facteur X : l’intelligence des peuples.

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Par Nicolas Kssis-Martov

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