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Parme la française
Italie-France à Parme, c'est avant tout un match symbole. Jamais depuis l'arrêt Bosman un club italien n'avait autant parlé français que le Parme AC. De Thuram à Biabiany, ils sont plus d'une dizaine à avoir porté le maillot parmesan. Il faut dire que la ville a un faible pour l'Hexagone.
À la fin des années 90, le Parme AC était un club à la mode. L’entreprise Parmalat dégueulait de pognon et assurait un confortable train de vie au club de football local. Une équipe où se côtoyaient trois types de joueurs. Les Italiens comme Gianluigi Buffon, Dino Baggio, Enrico Chiesa, Fabio Cannavaro. Les Argentins tels Hernan Crespo, Juan Sebastian Veron, Roberto Sensini ou encore Abel Balbo. Et les Français. De Lilian Thuram à Jonathan Biabiany en passant par Johan Micoud ou Ousmane Dabo, ils sont une grosse dizaine à avoir porté le maillot jaune et bleu depuis 1996. Hasard ou coïncidence ? Un peu des deux en fait. « C’est une ville qui est très attachée à la France. Notamment d’un point de vue historique » , se souvient Daniel Bravo qui a débarqué en Émilie-Romagne en 1996. Marie-Louise d’Autriche, qui était mariée à Napoléon, était duchesse de Parme. Dès lors, entre la Ville et la France, il y a toujours eu un lien très fort. Architecturalement, Parme ressemble un peu à Paris avec le Pô qui traverse la cité. C’était d’ailleurs son surnom : « Le petit Paris ». Même la langue locale a des expressions similaires avec le Français. »
Avec l’arrêt Bosman, une autre horde de Français débarque en Ville. Plus de Napoléon ou d’Empereur. Juste Lilan Thuram et Daniel Bravo pour commencer. Sabri Lamouchi, lui, est arrivé en 2000. « C’était ma première expérience à l’étranger. La chance que j’ai eue, c’est de pouvoir compter sur des compatriotes pour m’accueillir. À l’époque, il y avait Thuram, Boghossian et Micoud. Ça facilite ton intégration » , opine l’ancien milieu de terrain international. De la à dire que les dirigeants parmesans voulaient absolument leur Français, il y a un pas. « Les joueurs français s’exportaient bien à cette époque, on était connus pour notre professionnalisme et notre adaptabilité, étaye Lamouchi. Et je crois que ça correspondait au souhait des dirigeants italiens de l’époque. »
Lilian Thuram et son vélo
Surtout, entre Français, les aides sont précieuses. Dans quelle école scolariser les enfants ? Où se casser le ventre après les matchs ? Quels endroits faut-il visiter ? L’entraide fonctionne. Sans pour autant être clanique. « Que tu sois français ou estonien, quand tu arrives dans un club étranger, tu vas automatiquement vers les gens qui parlent la même langue que toi au départ, détaille Lamouchi. Mais il n’y avait pas de clans. Ça chambrait beaucoup par contre. Et comme on voyait des Français réussir là-bas, on savait qu’on n’allait pas tomber dans un endroit inconnu. C’était une sorte d’assurance. Après, il faut bien se rendre compte que Parme est une ville très particulière en Italie quand tu pratiques le football. Ici, les gens sont très respectueux. » Une anomalie transalpine qui a marqué le petit Prince Daniel Bravo. « On pouvait se balader en ville sans aucun souci. C’était différent de ce que l’on pouvait voir à Naples ou Rome. Les gens étaient toujours gentils. Pendant deux ans, j’allais à l’entraînement en scooter. Lilian Thuram, lui, se déplaçait en vélo. Et comme il habitait à 200 mètres du stade, il débarquait à pied les jours de match. Il n’a jamais eu d’emmerdes. Même au niveau des infrastructures, on était loin des grands clubs italiens de l’époque. Je suis arrivé la première année d’Ancelotti sur un banc de Serie A, en 1996. On devait même s’entraîner dans un parc central au milieu des manèges avec les petits vieux qui venaient nous voir jouer. On prenait un mini-van pour aller du centre au terrain de football. Le club commençait à peine à se structurer. »
Entre une victoire en Coupe de l’UEFA (1999) et des places de vice-champions d’Italie, le club devient une machine à gagner sur le plan national. Et les Français continuent d’arriver : Martin Djetou, Sébastien Frey, Ousmane Dabo, Reynald Pedros. Encore aujourd’hui, ils sont deux Français à squatter l’effectif : Biabiany et Benalouane. Une marque de fabrique. « On a réussi a médiatiser le club avec des bons résultats. On a commencé à s’intéresser à Parme, conclut Bravo. D’autant que niveau bouffe, c’est le paradis. C’est une région riche et qui aime bien manger. Tu as le siège de Barilla, c’est le fief du Parmesan, du jambon de Parme. En tant que Français, tu aimes forcément les bonnes choses de la vie. À Parme, tu avais tout ça. Tu te sentais comme en France. » D’ailleurs, quand Daniel Bravo a su que les Bleus allaient se coltiner un déplacement à Parme, il a décidé d’emmener sa femme pour trois jours dans cette ville qu’il connaît bien et dans laquelle il a gardé des amis. Un Français ne quitte jamais vraiment Parme.
Par Mathieu Faure