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Mais qui es-tu, le Rubin Kazan ?
Intimement lié à la république semi-autonome du Tatarstan, à l'est de Moscou, le Rubin Kazan cultive la discrétion et mise sur des valeurs simples pour s'imposer : discipline, sérieux, réalisme.
Dans un football appliqué à une cour de récréation, le Rubin Kazan serait un gamin passant inaperçu. Ni caïd ni bouc émissaire, ni beau gosse ni vilain, le genre pas très populaire mais respecté, évoluant à relative distance des discussions futiles. Mais attention, il ne faut pas trop l’emmerder, car sous des atours fades, dès qu’il y a bagarre, il se révèle élève coriace, le genre à toujours s’en sortir, quitte à devoir mettre quelques coups en douce. Dans la classe de Russie, il y a le groupe de Moscou (CSKA, Spartak, Loko, Dynamo, des valeurs sûres), le flamboyant Zenit Saint-Pétersbourg, le nouveau flambeur Anzhi Makhatchkala, le mauvais garçon Terek Grozny. Et donc ce Rubin Kazan mystérieux et solitaire, reculé dans son coin, loin des autres.
La performance barcelonaise
Fin de la métaphore. Kazan est la capitale du Tatarstan, province semi-autonome située à quelques centaines de kilomètres à l’est de Moscou. Une longue histoire de lutte et de domination par les Russes, un exil contraint d’une partie de sa population, une vie de besogne dans une région majoritairement industrielle, qui bénéficie d’honorables ressources en hydrocarbure. Dans ce contexte, le club de foot de la capitale Kazan est une fierté locale, un étendard. Les pouvoirs locaux l’ont vite compris. Le Rubin a d’abord été présidé par le maire de la ville, Kamil Ishakov, remplacé en 2006 par le vice-président de la province, l’influent Alexander Gusev, un ancien dirigeant du KGB. Durant le mandat du premier, le club monte en élite et découvre les joutes européennes. Durant le mandat du second, il ouvre son palmarès. Pas n’importe comment, décrochant deux fois de suite la Premier League russe en 2008 et 2009. Même en C1, il force sa nature timide et réussit la performance de battre le Barça chez lui (2-1) le 20 octobre 2009 dans le cadre de la phase de poules.
Depuis cette performance historique, le Rubin a relativement peu changé. Huit des onze titulaires du Camp Nou sont encore dans l’effectif, qui a tout de même déploré trois départs de taille : Alejandro Dominguez et Aleksander Boukharov, atouts offensifs principaux à l’époque, ainsi que le capitaine et régulateur du jeu Sergei Semak. Les deux derniers cités sont partis garnir les rangs pléthoriques du Zenit. Sinon l’ossature reste la même. Le dispositif tactique défensif à une seule pointe aussi, mis en place par l’entraîneur Kuban Berdyev, fidèle au poste depuis 10 ans. Réputé ultra-perfectionniste, il s’appuie d’abord sur un bloc défensif bien costaud, composé notamment du géant espagnol Cesar Navas, du prometteur argentin Cristian Ansaldi (tous deux forfaits) et de l’international italien Salvatore Bocchetti. Pour protéger encore un peu plus le gardien Sergei Ryzhikov des attaques adverses, l’Israélien Bibras Natkho est placé en sentinelle du milieu, tandis que l’Equatorien Christian Noboa et le Turque Gökdeniz Karadeniz ont la responsabilité d’animer le jeu et de le porter vers l’avant, en contres rapidement exécutés.
Des nouvelles d’Obafemi Martins
Jusqu’ici tout est en place, parfaitement huilé. C’est tout en haut de ce dispositif tactique que ça coince : les buteurs Aleksey Medvedev et Vladimir Dyadyun pèsent trop peu, cumulant à eux deux trois pauvres buts en 20 journées de championnat depuis le début de l’année. Le Rubin compte bien dans ses rangs un attaquant de renom, Obafemi Martins, recruté pour 17 millions d’euros il y a un an, mais ce dernier n’est jamais parvenu à s’intégrer depuis son arrivée au club. L’autre grosse folie financière, le milieu offensif brésilien Carlos Eduardo, venu dans la même période contre un chèque de 20 millions, est blessé à un genou et n’a pas joué de l’année. Nelson Valdez, ex-coéquipier de Trezeguet à Hercules, vient donc d’être enrôlé, mais il ne devrait pas être apte à jouer ce soir.
Cette présentation d’équipe appliquée à la première partie de saison des Tatars, ça donne une quatrième place en championnat (derrière le CSKA, le Zenit et le Dinamo, à huit points des premiers) et une qualif’ joliment obtenue au tour précédent de C1 face au Dynamo Kiev : victoire 2-0 en Ukraine, puis victoire 2-1 au Central’nyj Stadion de Kazan. Rien de bien fantastique, mais du solide, du sérieux, de la régularité. Une défense classée troisième du pays au nombre de buts encaissés, une attaque tout juste dans la moyenne et pas mal de matchs nuls, comme celui concédé samedi contre le leader CSKA (Kazan à 10 pendant près d’une demi-heure, égalisation adverse dans le temps additionnel).Au bon élève lyonnais de mater ce discret mais brillant Rubin Kazan.
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