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Silvio Berlusconi : le Cavalier surgit dans la nuit

Par Lucas Duvernet-Coppola et Stéphane Régy, avec Adrien Candau et Andrea Chazy

Décédé à l'âge de 86 ans ce lundi 12 juin, Silvio Berlusconi aura réussi à concentrer toute l’essence du football dans sa seule personne. Mais s'il avait remis le pied à l'étrier du côté de Monza depuis 2018, Il Cavaliere restera à jamais lié à l'histoire de l'AC Milan. Pour le meilleur et pour le pire.

Silvio Berlusconi Former President of the Council of Ministers of the Italian Republic, during the Forza Italia party event "Italy of the Future, the uniting force" which was held at the Palacongressi of the Mostra dOltremare in Naples. Napoli, Italy, 21 May 2022. (photo by Vincenzo Izzo/Sipa USA) - Photo by Icon sport
Silvio Berlusconi Former President of the Council of Ministers of the Italian Republic, during the Forza Italia party event "Italy of the Future, the uniting force" which was held at the Palacongressi of the Mostra dOltremare in Naples. Napoli, Italy, 21 May 2022. (photo by Vincenzo Izzo/Sipa USA) - Photo by Icon sport

C’était l’une des activités préférées de Silvio Berlusconi : la vantardise, la vie considérée comme un éternel jeu de celui qui pisse le plus loin. Le nombre de ses conquêtes, ses scores aux élections, sa maison plus grosse que toutes les autres, ses entreprises toujours plus riches et écrasantes. Mais il ne faut pas s’avancer beaucoup pour se dire que son chiffre préféré devait sans doute être celui-ci : 28. Vingt-huit, comme le nombre de trophées qu’il a apportés – ou que lui ont apporté, l’un n’allait pas sans l’autre – à l’AC Milan. Vingt-huit titres, dont huit de champion d’Italie, cinq coupes d’Europe des clubs champions, deux coupes intercontinentales. Vingt-huit titres, et sept Ballons d’or. Du jamais vu dans l’histoire du foot pour un président de club, Florentino Pérez excepté, et encore. De telle sorte que lorsqu’on l’avait interviewé il y a quelques années, Zvonimir Boban, l’un des joyaux de du Milan, n’avait trouvé aucun mal à résumer l’affaire: « Le club est peut-être centenaire, mais en vérité, c’est comme s’il avait été fondé par Berlusconi ».

Wagner, Rossi et un champion de karaté

Une série de liftings en moins, une poignée de cheveux en plus, voici Silvio Berlusconi le 1er mars 1986. Il enfile un costume croisé, un manteau bleu, une écharpe blanche, sort de chez lui et monte dans son hélicoptère direction Milanello, le centre d’entraînement du club lombard. Quelques minutes plus tard, le nouveau propriétaire de l’AC Milan entre dans le réfectoire où les joueurs sont en train de déjeuner. Applaudissements, tapes dans le dos. Berlusconi offre une coupe en argent à chaque membre de l’effectif, puis sort faire des sourires devant les photographes. Même s’il n’est pas encore officiellement président du club, il en profite pour signifier à la presse qu’il a déjà fait signer un joueur, le défenseur de la Roma Dario Bonetti. « Il m’est apparu comme un homme très mature. En effet, je ne veux pas seulement des joueurs doués techniquement. Je cherche des footballeurs dotés de qualités humaines », explique-t-il. Quelques mois plus tard, le 18 juillet, un Berlusconi cette fois intronisé présente son équipe au complet devant 6000 personnes au stade de l’Arena, en plein centre-ville : les joueurs descendent de trois hélicoptères sur fond de Wagner, au son de La Chevauchée des Walkyries. « Ce jour-là, je me suis dit : “Mais qu’est-ce que c’est que ce fou ?” », indique Alessandro Costacurta, alors tout jeune défenseur.

En arrivant, il m’a dit : “Tu seras notre porte-drapeau.” Et deux mois plus tard, il m’a revendu.

Paolo Rossi, champion du monde 1982

Dans une Italie habituée aux façons de faire des Agnelli, le cirque détonne. Il faut dire que tout oppose les propriétaires de la Juve et le nouveau boss rossonero. Aux premiers l’héritage, l’industrie automobile, le travail à la chaîne et la sobriété. Au second l’image de self-made-man, le secteur tertiaire, les créations de sociétés et le sens du spectacle. Berlusconi, c’est la fable du petit entrepreneur du nord de l’Italie, du miracle économique, celle du fils d’un employé de banque et d’une femme au foyer qui grandit en dormant sur le divan du salon, porte les vêtements usés de son père, monte son entreprise et devient immensément riche. Promotion immobilière et télévision sont les deux mamelles de la mythologie berlusconienne. Dans les années 1960, Il Cavaliere bâtit la première partie de sa fortune en faisant construire des quartiers entiers dans la région de Milan – qu’il appelle tout simplement Milano 2 et Milano 3. Puis il se diversifie en créant une petite chaîne de télévision câblée, Telemilano, qu’il transformera en empire médiatique. Tant et si bien que lorsqu’il rachète officiellement le Milan à 50 ans, il n’a plus grand-chose du petit entrepreneur local : c’est le principal homme d’affaires du pays, à la tête d’un groupe, Fininvest, dont les activités s’étendent des médias à l’édition, en passant par la publicité et les assurances. « Quand il s’est présenté pour racheter le club, je ne lui ai même pas demandé de dossier de reprise tant ses garanties bancaires étaient solides », se souvient Giuseppe “Giussy” Farina, son prédécesseur à la tête du club.

S’il fait le show devant les caméras, Berlusconi n’est pourtant pas venu dans la capitale lombarde uniquement pour faire le zouave. C’est même tout le contraire. « Billy » Costacurta se souvient de sa première rencontre avec son nouveau président : « Quand on s’est serré la main, je sortais de la douche et je ne m’étais même pas encore séché. “Tu préfères être titulaire ailleurs ou jouer quelques matchs de moins mais faire partie de ce qui va devenir la plus grande équipe du monde ?” » L’ambition semble d’autant plus folle que l’AC Milan, qui se relève tout juste de sa rétrogradation en Serie B suite au scandale du Totonero en 1980, traverse alors une sacrée mauvaise passe. Son dernier titre remonte à 1979 et, surtout, ses dettes s’élèvent à 10 milliards de lires. À cette époque, pour faire rentrer un peu de sous, Milanello est parfois loué pour des mariages, lors desquels les nouveaux époux peuvent se faire photographier en compagnie des joueurs. Berlusconi a un plan : gérer son Milan non pas comme une équipe, mais comme une filiale à part entière de son conglomérat. D’entrée, il promet que les joueurs qui donneront satisfaction pourront se reconvertir dans la Fininvest. « Nos footballeurs doivent se sentir comme faisant partie d’un groupe, et penser dès aujourd’hui aux débouchés qui les attendront après leur carrière », dit-il lors de sa première conférence de presse. Quant aux hommes dont il s’entoure, ce sont les plus fidèles d’entre les fidèles : Adriano Galliani, un entrepreneur de Monza qu’il a rencontré lors d’un dîner en 1979 et avec qui il a créé puis développé la chaîne Canale 5 ; l’ami de celui-ci, l’ancien footballeur Ariedo Braida ; ou encore Fabio Capello, un ancien joueur du cru dont il sent vite le potentiel et qu’il forme consciencieusement en l’envoyant suivre des cours de langue, de business et de ressources humaines. Au niveau infrastructurel, Berlusconi décide de moderniser Milanello. « Tous nos stages d’avant-saison se feront désormais ici, avec des systèmes révolutionnaires », déclare-t-il en 1987. Arrivent alors, entre autres, un médecin, un diététicien, un psychologue et un ancien champion de karaté, Bruno Demichelis, qui créera plus tard le Milan Lab. Résultat : jamais dans l’histoire du football les joueurs n’avaient été aussi bien pris en charge. « Quand tu signes à Milan, le club te met une personne à disposition. Que ta femme ait envie de s’acheter des meubles, que tu veuilles prendre un cours d’italien ou que tu aies besoin de quoi que ce soit d’autre, tu peux appeler à n’importe quelle heure. J’ai aussi joué à l’Inter et au Barça, mais ça, je ne l’ai vu qu’au Milan », révèle Francesco Coco, éphémère nouveau Paolo Maldini des années 90-2000.

À la rigueur de l’industriel, Berlusconi ajoute l’imagination de l’entrepreneur compulsif. Très vite, il comprend que son projet doit s’appuyer sur des hommes neufs. « Lorsqu’il est arrivé, il est venu me voir et m’a dit : “Tu seras notre porte-drapeau.” Et deux mois plus tard, il m’a revendu », s’amusait Paolo Rossi. Le meilleur buteur du mondial espagnol et Ballon d’or 1982, disparu en 2020, n’en gardait pas rancune. Au contraire. « Pour être honnête, c’était une preuve d’intelligence. Je sortais d’une mauvaise saison, j’étais en fin de carrière, je n’aurais pas pu apporter grand-chose. » Autre ancienne gloire locale, l’entraîneur Nils Liedholm est débarqué dès les premiers mois. Pour reprendre le poste, le nouveau patron rossonero a l’embarras du choix : Fabio Capello, qui a assuré l’intérim lors de la fin de saison 86-87, a donné satisfaction ; Giovanni Trapattoni, alors le coach le plus coté du marché, est libre après dix ans à la Juventus, où il a tout gagné. Sauf que Berlusconi a une autre idée en tête. Il a repéré un jeune technicien inconnu, Arrigo Sacchi. Le 31 août 1986, son équipe de Parme, tout juste promue en Serie B, était venue battre en Coupe d’Italie le Milan à San Siro (1-0) en proposant un jeu inédit, fait de pressing et d’offensives. Le premier entretien d’embauche entre les deux hommes se déroule dans la villa du patron, à Arcore, de 20h30 à 3h du matin. Plus de cinq heures à refaire le football et à dessiner des schémas sur la nappe. À minuit, alors que Sacchi se lève pour aller aux toilettes, Il Cavaliere se tourne vers son confident Ettore Rognoni, journaliste de sa chaîne Mediaset : « C’est mon homme. »

« Quand j’ai lu l’interview de Silvio, j’ai su que c’était fini pour moi »

C’est peu de le dire. Avec lui, le Diavolo gagnera le scudetto à l’issue de sa première année sur le banc et embrayera avec deux coupes des champions de suite (1989 et 1990). Le tout avec un jeu révolutionnaire. En coulisses, Berlusconi assure l’ambiance –il aime prendre ses repas avec les joueurs et leur raconter des blagues– comme le stylisme: « Quand j’ai débuté, j’avais les cheveux longs. Il me tannait pour que je les coupe. Alors un jour, il m’a pris par la main, m’a mis dans une baignoire, et m’a lui-même coupé ma tignasse », se marre Coco. À l’époque, le Milanais gère aussi et surtout le mercato. À l’automne 1986, pendant que les Rossoneri se font étriller sur le terrain de la Sampdoria (3-0), Berlusconi et Galliani partent mener une opération coup double aux Pays-Bas. En une nuit, Gullit et Van Basten s’engagent à rallier le Milan l’été suivant. Parallèlement, le boss comprend vingt ans avant le Barça de Laporta que pour plaire au public, une équipe ne peut pas se contenter d’accumuler les stars, mais doit s’appuyer sur des joueurs du cru. Ces derniers s’appellent Franco Baresi, Alessandro Costacurta, Demetrio Albertini, Paolo Maldini, Filippo Galli. Tous nés en Lombardie, tous formés au club, tous amoureux du blason, et tous titulaires. « Mon but était de “milaniser” le Milan, c’est-à-dire d’apporter dans ce club l’état d’esprit d’initiative, de sérieux, d’entrepreneuriat et d’imagination qui caractérise notre ville », déclare-t-il au Corriere della Sera le soir de son premier titre. Ce mélange des genres – professionnalisme, prise de risques et enracinement local – donne naissance à une marque internationale : le Grande Milan.

Une famille unie que tous les employés sont priés de respecter. Ainsi, lorsqu’il accueille son nouveau coach Óscar Tabárez en 1996, Berlusconi lui remet une lettre comportant les dix commandements du club. Parmi ceux-ci : le fait que les joueurs ont le droit de connaître à l’avance les décisions de leur entraîneur. Le pire, c’est que ça marche. Dans un pays capable de créer une polémique à partir d’un simple éternuement, le Milan devient ce club où tout coule sans jamais provoquer de crise. « Tout est tellement bien organisé, hiérarchisé que les problèmes sont résolus avant même qu’ils n’éclatent. Quand tu arrives au club, tu as tout simplement envie de défendre ses couleurs », confie ainsi Boban. D’autant que ceux qui travaillent bien sont vite récompensés. Ainsi, en 1991, Il Cavaliere ne se cache même pas de placer son ancien entraîneur au poste de sélectionneur. « On sortait de deux résultats pas terribles, un nul et une défaite, se remémorait Azeglio Vicini, le coach de la Nazionale alors en fonction. Quand j’ai lu une interview de Berlusconi dans laquelle il disait que Sacchi ferait un bon sélectionneur, j’ai compris que c’était fini pour moi… »

Comptes offshore et loge maçonnique

Et les recoins sombres ? Patience: les voilà. Il faut bien avouer que Berlusconi n’offre pas le profil le plus clair de son époque. Ainsi, la police fiscale accusera le club d’avoir payé ses employés au black à travers trois sociétés offshore, et affirmera que l’AC Milan, de 1991 à 1997, a remporté quatre championnats auxquels il n’aurait pas dû prendre part, selon les exigences économiques et financières prévues par la fédération. Exemple parmi d’autres, celui d’Óscar Tabárez : quelques mois avant sa venue sur le banc, l’Uruguayen avait reçu sur son compte, à Montevideo, un virement de 250 000 dollars opéré via une banque des Bahamas. Là encore, l Cavaliere niera en bloc : « Cette histoire a été inventée par les magistrats pour m’éliminer politiquement ». Et puis, bien sûr, il y a le Calciopoli de l’été 2006. Un immense scandale qui éclaboussera essentiellement la Juventus de Luciano Moggi, mais dans lequel l’AC Milan n’est pas blanc comme neige. Selon les enquêteurs, Leonardo Meani, employé du club rossonero, était en effet chargé de “piloter” la désignation des arbitres de touche pour les matchs du Diavolo. Une charge assez sérieuse pour que l’équipe milanaise démarre le championnat 2006-2007 avec huit points de malus. La défense de Berlusconi ? « Le Milan est une victime. La Juventus étant le club comptant le plus de tifosi en Italie, il était normal que 50% des arbitres aient le cœur juventino. » En revanche, le patron milanais n’a jamais répondu à cette autre question : comment a-t-il donc fait, dans les années 70, pour financer ses premières opérations immobilières ? Des rumeurs, encore elles, font état de capitaux illégalement expatriés en Suisse.

Rien n’a été prouvé ni infirmé, mais il est clair que Berlusconi a souvent pu bénéficier d’appuis haut placés. Comme celui de la loge P2, ce « lobby » franc-maçonnique dirigé par l’ancien fasciste Licio Gelli, dont le patron du Milan fut le membre numéro 1816. Ou comme celui de Bettino Craxi, l’ancien président du Conseil, mort en exil en 2000, à qui Silvio a versé, sur un compte en Suisse, 22 milliards de lires, et dont il a pistonné le fils dans l’organigramme du Diavolo. Autant d’amitiés qui expliquent aussi pourquoi l’entrepreneur a pu “s’offrir” le club sans dépenser un seul kopeck, en attendant que celui-ci soit déclaré en faillite, alors que d’autres repreneurs potentiels proposaient dans le même temps plus de 25 milliards de lires. « J’avais quelqu’un d’autre, mais on m’a fait comprendre qu’au plus haut sommet, on ne voulait pas que ça se passe comme ça, confessera à So Foot Giussy Farina. Berlusconi ne m’a pas racheté le Milan, il me l’a pris. »

Il faut cadrer en priorité nos joueurs les plus grands et les plus beaux, comme Maldini et Bonetti. Ceux qui plaisent aux femmes. Les autres, les petits comme Galderisi, cadrez-les de loin

Silvio à ses cameramen

Une bien belle opération que cette reprise, en réalité. Car si Silvio Berlusconi a souvent parlé de son admiration de toujours pour l’AC Milan et narré ses dimanches passés à San Siro en compagnie de son père lorsqu’il était enfant, il aurait d’abord pensé à investir chez le voisin honni, l’Inter. C’était au début des années 1980, le magnat avait tâté le terrain auprès de la légende intériste Sandro Mazzola pour savoir si club était à vendre. Manière de dire qu’il n’y a pas que l’amour du sport qui l’a motivé à se lancer dans le football. Quoi donc, alors ? L’argent, bien sûr. Fort de son empire audiovisuel, l’entrepreneur comprend très vite tout le parti qu’il peut tirer d’un club de foot compétitif : plus le Milan gagnera, plus il passera à la télévision. Les retombées économiques, sous forme de droits télé et de revenus publicitaires, seront alors gigantesques. Pas pour rien que Silvio ordonne un jour à ses cameramen de « cadrer en priorité nos joueurs les plus grands et les plus beaux, comme Maldini et Bonetti. Ceux qui plaisent aux femmes. Les autres, les petits comme Galderisi, cadrez-les de loin ». C’est aussi l’époque où le président de l’AC Milan, en compagnie de son ami Ramon Mendoza, son homologue du Real Madrid, met sur pied un drôle de projet censé satisfaire son appât du gain : une ébauche de superligue européenne réservée aux meilleurs clubs du continent. Alex Fynn, alors patron de l’agence de publicité Saatchi & Saatchi, est chargé du dossier. Il se souvient : « J’étais dans mon bureau, à Londres, quand j’ai reçu un coup de fil de notre responsable de l’antenne de Milan. Il m’a dit : “Alex, j’ai une mission pour toi : Berlusconi veut qu’on lui présente une idée de superligue.” J’ai rendu mon travail quelques semaines plus tard. Il s’agissait d’un championnat à seize équipes, avec des relégations et des promotions. Mais Berlusconi ne voulait pas qu’un club puisse descendre. Il voulait s’assurer que les meilleures écuries joueraient chaque mercredi à la télé. » Autre lubie tristement visionnaire : plusieurs années avant l’arrêt Bosman, Berlusconi propose en juin 1989 de porter à cinq le nombre de joueurs étrangers pouvant évoluer dans la même équipe.

Ballons d’or, schémas tactiques et Fiat Uno

Il est vrai que le principe de l’équité sportive ne préoccupe pas vraiment le club rossonero. Dans la hiérarchie mondiale, l’équipe lombarde représente alors ce qui se fait de mieux, et de loin. Une véritable machine de guerre capable de faire signer n’importe quelle star du monde, à n’importe quelle condition. À l’été 1992 débarquent par exemple Jean-Pierre Papin et Dejan Savicevic, les deux joueurs qui ont terminé l’année précédente aux deux premières places du Ballon d’or. « J’avais des offres de la Juve et de la Roma. Galliani et Braida sont venus me voir après un match de supercoupe entre l’Étoile rouge de Belgrade et Manchester United. J’ai dit oui tout de suite, parce que c’était le plus grand club du monde », avoue le Monténégrin. En fait, même ceux qui ne veulent pas venir viennent quand même. Ainsi Gianluigi Lentini. Né à Turin et formé au Torino, le grand espoir du football italien serait bien resté dans le Piémont toute sa vie. Comme les autres, il ira s’entraîner à Milanello. « C’était en 1992. Le Torino avait besoin de liquidités, mais moi, je ne voulais pas vraiment partir. Et puis un jour, j’ai reçu un coup de téléphone de Berlusconi. Il m’a dit qu’il voulait me parler, mais de visu. Alors il m’a envoyé un hélicoptère. Je suis arrivé chez lui à l’heure du repas, et il m’a convaincu en une heure », raconte l’ancien ailier. Comment le boss arrive-t-il à ses fins ? En payant très cher, certes, mais il n’y a pas que ça. Avant toute chose, celui qui fut chanteur pour dames dans sa jeunesse dispose d’un pouvoir de persuasion sans pareil. C’est simple : s’il existe des gens qui entrent sceptiques dans sa villa d’Arcore, une magnifique maison évaluée à 1700 millions de lires, tous en sortent le sourire aux lèvres. Berlusconi a un mot gentil pour tout le monde. Y compris pour ses adversaires : lorsque son défenseur Mauro Tassotti blesse gravement Davide Zannoni, Il Cavaliere console le joueur de Parme en lui offrant une Fiat Uno. « Un simple geste de sympathie », déclare-t-il sur le coup. Ou une manière comme une autre de soigner sa cote de popularité…

On parle toujours du “Milan de Sacchi”, du “Milan de Capello” ou du “Milan d’Ancelotti”. Alors qu’on devrait plutôt parler du “Milan de Berlusconi”.

Silvio Tout-Puissant

En réalité, football, médias et gloire personnelle ont toujours dansé main dans la main dans l’esprit du magnat italien. « Chez lui, il n’existe aucune frontière entre les trois », pointe le politologue italien Ilvo Diamanti. Un, Berlusconi utilise le Milan au profit de la télévision. Deux, il utilise la télévision au profit du Milan – dès sa première saison, il diffuse sur ses canaux un spot de publicité vantant les mérites d’un abonnement à San Siro. Et trois, donc, il utilise le club et le petit écran pour lui-même. Pendant dix ans, chaque victoire télévisée de son équipe sera ainsi une pierre de plus pour la cathédrale égotique qu’il se construit avec détermination. D’autant que l’homme d’affaires aime s’attribuer les mérites des miracles qui ont lieu sur le rectangle vert. « Avec moi, ce n’est pas : le président dépense et ensuite l’entraîneur fait ce qu’il veut. Je vois ce dernier comme le directeur d’un journal (…). Il doit suivre la ligne éditoriale dictée par son éditeur. » Depuis 1986, l’un de ses sports favoris consiste ainsi à laisser croire que c’est son éminence qui fait l’équipe. « On parle toujours du “Milan de Sacchi”, du “Milan de Capello”, du “Milan de Zaccheroni” ou du “Milan d’Ancelotti”. Alors que tout le monde sait que c’est moi qui suis derrière les succès de cette équipe. On devrait plutôt parler du “Milan de Berlusconi” », se vante-t-il un jour au Corriere della Sera. Après avoir raflé la C1 en 2003 contre la Juve, il publie d’ailleurs, dans un livre d’entretiens, plusieurs schémas tactiques ayant trait à la finale, dans lequel il précise que « les changements à effectuer lors de la partie ont été pris d’un commun accord entre Carlo et moi ». Quelques mois plus tard, l’actuel coach du Real dévoilera le pot aux roses : « Je lui ai donné mes schémas pour qu’il ait l’impression de participer à mon travail… »

Très vite, la stratégie de Berlusconi est validée. Au tournant des années 1990, un sondage le désigne « dirigeant de football préféré des sportifs » avec 35 % des voix. Le grand public, lui aussi, adhère. Un jour qu’il est en compagnie de son grand ami l’homme politique Bettino Craxi, c’est lui que l’on arrête pour signer des autographes. Alors le « Caïman » commence à s’immiscer sur le terrain politique, où sa vision du monde héritée de la guerre froide pourra pleinement s’exprimer. Le 24 mai 1989, le Milan s’apprête à défier le Steaua Bucarest en finale de coupe d’Europe des clubs champions. Le président lombard s’adresse à 530 journalistes, auxquels il présente la joute à venir comme un choc des civilisations : « Le Milan est une équipe qui représente le capitalisme, parce que nous sommes riches et que nous avons des joueurs payés des milliards. Nos adversaires, au contraire, viennent de l’Europe de l’Est. Leur régime de vie est plus sévère, et leurs champions ne sont pas aussi bien rétribués. » 90 minutes plus tard, le Milan s’imposera 4-0. Un soulagement pour celui qui voue une haine farouche aux communistes depuis que l’enfant qu’il était s’est fait corriger par des militants rouges alors qu’il était en train de coller des affiches proclamant : « Dans l’isoloir, Dieu te voit, Staline, non ».

« Si on pouvait voter directement pour toi, ce serait encore mieux »

Difficile aujourd’hui de savoir si le Cavaliere a dès l’origine eu pour but d’utiliser l’AC Milan pour préparer son entrée dans l’arène politique. Sans doute pas. Mais il serait drôlement naïf de croire qu’il n’y a jamais pensé. Dès le 27 juillet 1986, alors que sa nouvelle équipe reprend l’entraînement devant 3000 personnes, il déclare que ses supporters « ne forment pas un public, mais un parti ». En 1988, alors que le Milan vient de gagner le premier scudetto de son ère, un tifoso se met en travers de la voiture de son président. « Silvio, si tu veux, nous sommes prêts à donner nos huit millions de voix au parti de ton choix. Et si on pouvait voter directement pour toi, ce serait encore mieux. » Berlusconi fait arrêter le véhicule, ouvre la portière. « Merci mon ami. D’ailleurs, tu sais que je pense sérieusement à fonder un parti rien qu’à moi ? » C’est finalement en 1994 qu’il fera le grand saut. La période est propice : quatre ans après la chute du mur de Berlin, l’Italie vit une crise politique sans précédent. « Ce moment correspond à la fin des deux grandes idéologies politiques qui régissaient le pays depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale : la démocratie chrétienne et le communisme », recontextualise Ilvo Diamanti. Une dépression accentuée par les effets de l’opération “Mains propres”. Lancée en 1992, cette vaste enquête sur la corruption discrédite une grande partie du personnel politique en place. Les responsables finissent en prison, les partis impliqués disparaissent les uns après les autres : le « Caïman » se voit offrir un boulevard.

Il s’y engouffre d’autant plus volontiers que lui aussi risque de se faire éclabousser par l’opération de justice : la Fininvest est alors endettée à hauteur de 5000 milliards de lires, et les soutiens politiques traditionnels du Cavaliere sont au plus mal. À commencer par Bettino Craxi, condamné pour corruption. Alors, en janvier 1994, le capo réunit ses joueurs et leur annonce ce que tout le monde sait qu’il prépare depuis au moins deux ans. « Nous étions au restaurant de Milanello. Berlusconi s’est montré préoccupé parce que l’Italie risquait de “tomber entre les mains des communistes” et que cela représentait un danger pour la démocratie. Il nous a dit qu’il devait faire quelque chose pour le bien commun », relate Costacurta. Le 26 janvier, l’homme d’affaires officialise son dessein politique via une intervention diffusée dans tous les JT : « L’Italie est le pays que j’aime. C’est ici que j’ai mes racines, mes espérances, mes horizons. C’est ici que j’ai appris de mon père et de la vie le métier d’entrepreneur. C’est ici que j’ai appris à aimer la liberté. J’ai décidé de descendre sur le terrain et de m’occuper de la chose publique. » La métaphore footballistique du « terrain » est bien sûr tout sauf anecdotique. Dans son nouveau combat, il n’aura de cesse de multiplier les clins d’œil au football. Il nomme son parti Forza Italia, référence au cri des supporters de l’équipe nationale ; demande qu’on surnomme ses membres les Azzurri, comme les joueurs de la Nazionale ; parle des candidats de son parti comme des « avants-centres », des « liberos » et des « milieux de terrain ».

Je suis prêt à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour aider Berlusconi sur le terrain de la politique. Je crois en lui, en son honnêteté et en ses capacités.

Franco Baresi, porte-parole

Même s’ils s’en défendront tous plus ou moins par la suite, ses joueurs de l’époque sont évidemment partie prenante de la nouvelle aventure. Interrogé par la presse en 1993, Franco Baresi n’y va pas par quatre chemins : « Je suis prêt à faire tout ce qui est en mon pouvoir pour aider Berlusconi sur le terrain de la politique. Je crois en lui, en son honnêteté et en ses capacités. L’Italie a touché le fond. Nous devons nous retrousser les manches. Il y a le problème de la corruption, celui du chômage, et puis les impôts. Tous ces impôts ! » D’autres joueurs, comme Filippo Galli ou Daniele Massaro, se baladent avec des badges Forza Italia accrochés à la veste. Difficile de perdre avec de tels appuis… Et, de fait, Il Cavaliere gagne : les élections du 27 et 28 mars 1994 consacrent le parti du président rossonero, qui emporte la chambre des députés avec 21 % des suffrages exprimés en sa faveur. Ironie du sort, il demande la confiance du Sénat le 18 mai 1994, au moment même où son équipe est en train de ridiculiser le Barça de Cruyff en finale de la Ligue des champions à Athènes. Treize ans plus tard, avant que son équipe n’affronte, toujours à Athènes et toujours en période électorale, Liverpool en finale de la ligue des champions 2007, le Premier ministre profite d’une visite à Milanello pour livrer le fond de sa pensée à ses ouailles : « Nous allons mener une grande campagne en vue de l’élection : faire gagner la Ligue des champions par une équipe italienne. Une victoire pourrait convaincre beaucoup de Milanistes d’aller voter. » Jamais, tout au long de sa carrière politique, Berlusconi n’oubliera le profit qu’il peut tirer d’un supporter heureux. Qu’il soit milaniste ou non. En visite à Messine en novembre 2005 pour soutenir le candidat de centre droit engagé dans la course à la mairie, le Premier ministre se fend d’un mot doux pour l’équipe locale, alors dernière de Serie A. « Je n’aime pas la position de Messine au classement. Dès demain, je vais appeler mon directeur sportif Braida afin qu’on vous envoie des renforts. »

Crise des subprimes et Rubygate

En quelle année acter symboliquement la fin du Grande Milan bâti par l’omnipotent Silvio ? Probablement en 2009, lors de la vente de Kaká au Real Madrid. Le transfert – tout comme ceux de Thiago Silva et Ibrahimovic au PSG en 2012 – prouve que le “Caïman” a désormais changé de priorités. Jamais, en effet, un Berlusconi investi dans son club n’aurait laissé partir son meilleur joueur. Mais voilà : à mesure que ses ambitions de pouvoir grandissaient, Il Cavaliere n’a cessé de s’éloigner de son jouet. « À partir du moment où Berlusconi est entré en politique, c’est comme s’il avait rencontré une nouvelle femme. Et quand on rencontre une nouvelle femme, on pense moins à celle d’avant », illustre Boban. De fait, celui qui s’occupait de tout se montre de moins en moins. Et forcément, l’ambiance au club chute d’un coup. « Moins d’énergie, moins d’enthousiasme, moins de blagues », appuie Costacurta. Les rigolades, le président du Conseil italien les réserve dorénavant aux caméras de télévision. Le 12 septembre 2010, il explique ainsi la défaite de son équipe sur le terrain du promu Cesena par le fait que « Milan a rencontré des arbitres de gauche ». Puis, lancé, il se sent d’y aller d’une bonne blague : « Les partisans d’Hitler le supplient de revenir au pouvoir après avoir découvert qu’il est toujours en vie. Après avoir résisté, il répond : “Je reviendrai, mais à une condition… La prochaine fois, je serai vraiment méchant.” » Berlusconi est en pleine décadence, à l’image de la politique de transferts de son club : alors que le Milan, de 1986 jusqu’au début des années 2000, avait fait sa renommée en lançant de jeunes joueurs, il n’a par la suite fait qu’allonger la durée de vie d’anciens champions déjà sertis de gloire ailleurs : Ronaldinho, Beckham, Zlatan…

À partir du moment où Berlusconi est entré en politique, c’est comme s’il avait rencontré une nouvelle femme. Et quand on rencontre une nouvelle femme, on pense moins à celle d’avant.

Zvonimir Boban

Le Milan, ce géant d’autrefois devenu colosse aux pieds d’argile, est-il mort de l’entrée en politique de son président ? C’est possible. Mais l’inverse est peut-être vrai aussi: plus Berlusconi s’est éloigné du Milan, plus sa cote de popularité politique a flanché. Rattrapé par sa vulgarité et sa manie de mêler constamment intérêts privés et chose publique, l’ancien golden boy a fini par lasser tout le monde. Tant et si bien que sous la pression de l’opinion, Berlusconi a présenté sa démission de son poste de président du Conseil italien en novembre 2011, payant les errements économiques d’une Italie ravagée par la crise des subprimes, qui a fait exploser la dette du pays. Depuis son retour sur le trône en 2008 (après deux premiers mandats, de 1994 à 1995 puis de 2001 à 2006), cette dernière a bondi de 20 %, passant de 100 à 120 % du PIB. « À ce moment-là, c’est l’illusion de la compétence économique de Berlusconi qui vole en éclats, décrypte le docteur en sciences politiques Pierre Musso. L’Italie, troisième pays industriel d’Europe, a connu un décrochage de sa production à partir de 2009 et de son économie dans la foulée. Berlusconi n’a pas été apte à endiguer le phénomène, et cela a fortement entaché son image de président entrepreneur. » Les emmerdes volant naturellement en escadrille, « Sua Emittenza » a vu également son image publique ravagée par l’affaire du Rubygate, lors de laquelle il fut soupçonné d’avoir incité à la prostitution une danseuse de discothèque mineure. « Toute cette histoire l’a fortement discrédité dans l’électorat italien, qui reste très catholique, très attaché à la famille, confirme Musso. D’un coup, il a perdu ce qu’on pourrait appeler son crédit moral, d’autant que les procès qui le visaient, lui ou ses entreprises, commençaient également à se multiplier. »

Si l’homme au visage de cire parviendra à se soustraire la plupart du temps à la justice, il ne peut éviter à son entreprise, Fininvest, d’être condamnée à payer les pots cassés. En juillet 2011, sa holding, qui englobe Mediaset, le groupe télévisuel qui a fait sa fortune, doit s’acquitter de 560 millions d’euros. Une somme que la firme de Berlusconi doit verser au groupe CIR, un autre géant transalpin des médias. II est reproché à Fininvest, ancien sponsor maillot des Rossoneri, d’avoir ravi en 1991 à son concurrent le contrôle de l’éditeur Mondadori – un mastodonte de l’édition de journaux et de magazines en Italie – en corrompant des avocats et un juge. La victime collatérale de cette mise à l’amende ? Le club qui était autrefois le plus grand du monde, bien évidemment. Ce modèle de gestion obsolète, Berlusconi le reconnaîtra dans sa lettre d’adieu au Diavolo, lorsqu’il cédera le club à un mystérieux conglomérat d’investisseurs chinois en avril 2017 : « Je lâche aujourd’hui, après plus de trente ans, le titre et la fonction de président du Milan. Je le fais avec douleur mais en ayant conscience que le foot moderne, pour être performant au plus haut niveau européen et mondial, nécessite des investissements et des ressources que nous ne sommes plus en mesure de fournir. » Ces dernières années, comme un enfant qui ne peut s’empêcher de jouer ou une star qui ne peut pas accepter de sortir de scène, il avait repris Monza, le petit club avec son associé de toujours, Adriano Galliani. Ce coup-ci, le compteur était resté bloqué à zéro.

Dans cet article :
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Par Lucas Duvernet-Coppola et Stéphane Régy, avec Adrien Candau et Andrea Chazy

Tous propos recueillis par ACa, ACh, LDC et SR, sauf mentions.

Article tiré du magazine So Foot hors série spécial Italie, paru en janvier 2022.

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