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Ramenez l’alcool dans les stades, s’il vous plaît !

Par Julien Duez
Ramenez l’alcool dans les stades, s’il vous plaît !

La question d’un éventuel retour de l’alcool dans les stades de foot français est venue déchaîner les passions de tous bords. Preuve s’il en est que les différentes parties concernées ont chacune des arguments à faire valoir. Et qu’il serait bon de prendre en compte ceux des supporters, réduits - une fois de plus - à des récriminations peu sérieuses, voire irresponsables. Mais celles et ceux qui font vivre les tribunes chaque week-end sont des grandes personnes. Et pour paraphraser le livre de Maud Tabachnik, « Tous ne sont pas des monstres ».

Lorsque Agnès Buzyn étudiait la médecine, fréquentait-elle les troquets de la voisine rue Mouffetard pour écluser quelques verres avec ses coreligionnaires carabins entre deux éprouvantes sessions d’examens ? On ne se prononcera pas à la place de l’intéressée mais quelle que soit la réponse, cela n’a pas empêché la ministre de la Santé de devenir une brillante hématologue, ni de soutenir une thèse de doctorat portant sur l’immunité anti-tumorale spécifique dans les leucémies myéloïdes et perspectives d’applications thérapeutiques. De même, cette Parisienne de naissance n’a-t-elle jamais fréquenté les travées du Parc des Princes, du Stade Charléty ou de Bauer pour y encourager avec ferveur l’un des clubs majeurs de la capitale ? Seul Hippocrate le sait. Aujourd’hui, Agnès Buzyn défend bec et ongles sa boutique, celle de la santé publique. Et lorsqu’une centaine de députés de son groupe parlementaire (LREM) propose de rationaliser la vente d’alcool dans les stades et ce, dans le cadre de la stricte application de la Loi Évin, la ministre n’a pas hésité à réagir avec véhémence par l’entremise de son compte Twitter.

Pouvoir et responsabilités

Nombreux ont été celles et ceux qui ont alors reproché à Mme Buzyn de ne pas tenir compte dans ses 260 caractères de l’immunité en vigueur au sein des salons et loges VIP. Tandis que les supporters cherchent chaque année l’une des dix dérogations auxquelles leur club a droit pour vendre de l’alcool en tribunes, derrière les parois de verre qui surplombent toutes les Présidentielles de l’Hexagone, c’est champagne à gogo. Et pour cause, ces « safe spaces » tombent sur le coup d’une législation à part : celle de la restauration, ce qui autorise donc leurs occupants privilégiés à se sustenter d’un verre de vin, de bière ou de cidre (coucou la Bretagne !) si tant est que le buffet contienne également des boissons sans alcool. Dans les tribunes de presse, c’est la même chanson. Et pourtant, on imagine difficilement un journaliste se la coller allègrement quand il a un match à commenter. Dès lors, les VIP et le quatrième pouvoir seraient-ils naturellement plus dignes de confiance quant à la mise à disposition d’alcool à leur portée ?

La réponse est évidemment non. Et c’est là que le bât blesse. Car en se focalisant uniquement sur le peuple des tribunes (ultra comme lambda), les pouvoirs publics opèrent une distinction qui fonce tout droit vers le mépris de classe et entretient le mythe selon lequel les supporters « de base » seraient incapables de se prendre en charge eux-mêmes. Résultat des courses, ces derniers font le plein avant la rencontre au sein des bistrots qui jouxtent leur stade préféré, accroissant ainsi le risque de voir un public passablement aviné dès le coup d’envoi. Incroyable tout de même de ne pas avoir imaginé qu’une vente d’alcool à l’intérieur du stade, même très encadrée, ne puisse pas être considérée comme une solution pour autoréguler la consommation de chacun les jours de match. Car si l’argument selon lequel les supporters sont capables de se retenir de boire pendant 90 minutes est parfaitement valable, une chose est sûre : les fans de foot ne vont pas au stade pour se bourrer la gueule à la buvette. Ils y vont d’abord pour voir un match de foot.

Liberté pour les gourmands !

Mais Agnès Buzyn n’est pas la seule à s’opposer à un retour de l’alcool dans les stades. L’Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA) a de son côté précisé, à travers un communiqué, que « la consommation d’alcool est incompatible avec le sport, car la promotion de l’alcool auprès des jeunes via les compétitions sportives vise à banaliser la consommation générale, et en premier lieu celle des jeunes qui constituent la majorité du public » . Nul but ici de remettre en cause le travail de l’ANPAA, ni de minimiser les 41 000 décès liés à l’alcool chaque année en France. Seulement, lorsque l’on attaque de front le lobby alcoolier et son incapacité à être associé au sport de haut-niveau, peut-être faudrait-il également se pencher sur la question de nommer le championnat de France de Ligue 2 avec le nom d’une chaîne de pizzerias américaine dont la consommation des produits n’est encouragée par aucun médecin.

Dans la même veine, on pourrait s’interroger sur la pertinence sur le naming futur de la Ligue 1 : se faire livrer son petit plat à domicile par des coursiers sous-payés et dépourvus d’une quelconque sécurité de l’emploi ne pose-t-il pas un problème moral, en plus d’encourager les gens à rester vautrés dans leur canapé plutôt que de sortir se chercher quelque chose à manger ? Quid également de l’omniprésence des sociétés de paris sportifs ? Combien de suicides sont liés à l’addiction au jeu chaque année ? Combien de vies sont brisées par l’accumulation de dettes liées « au petit combiné du week-end » ? En tant que miroir de la société, le football partage ceci avec l’être humain : il est imparfait. Mais depuis toujours, il sert d’exutoire, de défouloir, de sas de décompression. Parfois accompagné d’un petit vice coupable : une clope, une pinte, un hot-dog ou une grille de paris sportifs.

Il serait donc utile de freiner la course à l’aseptisation totale du football, sans quoi la situation ne cessera de continuer à se dégrader. Les faibles affluences qui frappent les stades de Ligue 1 et de Ligue 2 constituent un bon indicateur à ce propos. On pourrait alors lancer un moratoire sur le prix des places – bien que le tarif unique en parcage (dix euros en L1, cinq en L2) obtenu de haute lutte par l’Association Nationale des Supporters (ANS) constitue une réelle avancée – ou sur les arrêtés préfectoraux souvent arbitraires qui empêchent les supporters de se déplacer librement. Mais ceci est un autre débat.

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