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Pourquoi Claudia Pina rend fous les joueurs de FC26 ?

Par Victor Marie et Thomas Morlec
5 minutes

Depuis le début de FC26, anciennement FIFA, un débat fait rage au sein de la communauté de joueurs : est-ce qu’il faut idolâtrer ou haïr la carte de Claudia Pina ? Meilleure joueuse du jeu, l’attaquante du FC Barcelone cristallise à elle seule la difficile intégration des joueuses dans la licence, mais aussi la misogynie de certains gamers.

Pourquoi Claudia Pina rend fous les joueurs de FC26 ?

Oubliez Erling Haaland, Kylian Mbappé, Alexia Putellas ou encore Mohamed Salah, la meilleure joueuse du nouveau FC26 est Claudia Pina. De très loin. Sa carte ne dépasse pas les 86 de général et les 79 de vitesse, mais cela ne l’empêche pas d’être l’une des meilleures joueuses de l’histoire de la licence. Dans le mode FIFA Ultimate Team (FUT), le niveau de Claudia Pina est si phénoménal qu’elle est quasiment présente dans toutes les équipes, au point d’être la deuxième joueuse la plus utilisée sur cet opus avec près de 7 millions de matchs disputés. Alors, pourquoi un tel succès ? Et aussi, qu’est-ce que cela raconte de l’évolution de cette licence et de manière plus globale de l’intégration des femmes dans le jeu ?

Playstyles, arcade et sexisme

« Une carte aussi complète en matière de finition, de physique, d’agilité, de mobilité et de qualité de passe, c’est du jamais-vu, pose Thip, un streamer Twitch spécialiste du jeu qui compte plus de 146 000 abonnés. En compétition, les joueurs pros mettent sur le banc des joueurs à 3 à 4 millions de crédits (argent virtuel du jeu, NDLR), pour elle. » C’est simple, l’internationale espagnole coche tous les critères pour être la joueuse ultime, notamment grâce aux playstyles, des capacités spéciales permettant aux joueurs/joueuses d’être plus performant(e)s dans certains secteurs.

Parce qu’elle est une femme, elle est davantage détestée. Il y a ce côté où des gens jugent que ce n’est pas rationnel que les femmes soient plus fortes que les hommes sur n’importe quelle statistique.

Thip, un streamer spécialiste de FC26

« Claudia Pina a tous les playstyles les plus méta (métagame, NDRL) : tir rasant, des frappes à ras de terre très fortes, mais aussi tir enroulé, aussi l’un des meilleurs playstyles en finition, ajoute SalemFUT, un autre créateur de contenu FC26 très suivi. Elle a aussi la passe incisive qui va permettre de mettre des passes en profondeur avec un effet qui va contourner le défenseur, et tiki-taka, pour les passes en une touche. » Autre atout majeur de l’attaquante de Barcelone : elle ne mesure qu’1,60 mètre, favorisant son agilité tout en résistant à l’épaule à des colosses comme Virgil van Dijk.

Cette anomalie physique et le manque d’équilibre global frustrent logiquement les joueurs et démontrent surtout que la licence a énormément changé. Depuis plusieurs opus, le gameplay est de plus en plus tourné vers l’arcade, comprenez plus de fun, des buts à gogo et des défenses à la ramasse. Le jeu est bien moins réaliste que par le passé, et Electronic Arts assume ce tournant. Même si cela déplaît fortement aux accros du mode FIFA Ultimate Team. Depuis l’ajout des joueuses sur FC24, certains gamers, nostalgiques de l’époque où les opus récompensaient davantage le jeu de passe, n’hésitent pas à critiquer ouvertement l’arrivée des féminines, en avançant que cela ne serait pas réaliste : « Évidemment que parce qu’elle est une femme, elle est davantage détestée, parce qu’il y a ce côté où des gens jugent que ce n’est pas rationnel que les femmes soient plus fortes que les hommes sur n’importe quelle statistique », abonde Thip.

Depuis l’arrivée de ce mode, jamais une carte n’a suscité autant de débats et de critiques. Sur le site Futbin, permettant de noter les cartes et de voir leur prix, Pina, pourtant excellente, a quasiment autant de dislikes que de likes (4 326 contre 4 100). De son côté, l’Espagnole, interrogée à propos de son succès sur FC26, préfère en rire : « Je joue aussi à FIFA (FC26, NDRL), j’aime beaucoup ce jeu. Je l’ai achetée (sa carte) la première semaine, et honnêtement, c’est drôle de voir combien de personnes font des vidéos sur moi sur TikTok. » Pourtant, les attaques à son propos sont virulentes, et elle reçoit des milliers de messages d’insultes par des joueurs exaspérés.

Claudia Pina et Stéphanie Frappart, même combat ?

Des attaques d’autant plus virulentes que la carte de la discorde est celle d’une femme ? Lucas Barrallon, professeur à Lyon III et auteur d’un mémoire sur les pratiques spatiales et mémorielles des supporters de football, en est convaincu. « Oui, le fait qu’elle soit une femme est nécessairement un facteur aggravant le harcèlement. Elles sont toujours davantage visées par les violences, en particulier dans le sport, spécifiquement dans le foot », assure-t-il. La communauté FC, globalement peu connue pour sa lutte acharnée en faveur de l’inclusion des femmes, n’est pas en reste.

Les femmes sont toujours davantage visées par les violences, en particulier dans le sport, spécifiquement dans le foot.

Lucas Barrallon, professeur à Lyon III

Même si elle est loin d’être la seule. Pour illustrer sa théorie selon laquelle les gamers, et a fortiori les consommateurs de foot, réservent souvent un « traitement de faveur » à la gent féminine du milieu, il prend l’exemple de l’arbitre de Ligue 1 Stéphanie Frappart, jamais la dernière du métier à prendre cher chaque week-end : « Alors que l’arbitrage français est globalement médiocre, elle subit systématiquement beaucoup plus de critiques que les arbitres hommes. »

Finalement, le « sujet Pina » sur FC est un cas édifiant du fossé qui existe parfois entre l’inclusion par le haut des femmes dans une structure et l’acceptation par la majorité de leur arrivée dans un écosystème déjà établi. « La place des femmes sur FC26 et sa réception par le public donnent une idée du fait que les hommes peuvent voir comme “optionnelles” les femmes dans certains espaces, et penser que ces espaces sont mieux et complets sans elles », analyse Lucas Barrallon. Cela apporte pourtant un boost de visibilité pour les joueuses, bien que les mentalités peinent à évoluer selon Thip. « Certains gamers ont du mal avec le fait que les féminines soient sur FC et qu’une carte aussi forte soit une femme, ça leur rajoute de l’énervement, assure le créateur de contenu. Depuis FC24, cette communauté s’est déjà vu imposer des joueuses dans le jeu, et là ils n’ont plus la possibilité de jouer sans, ou d’en affronter peu, puisque Pina est partout. Cela renforce un sentiment de ras-le-bol. » N’en déplaise à ses haters, Claudia Pina continuera de les traumatiser sur FC26. Et ce sera visiblement la même chose sur le nouveau Football Manager.

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Par Victor Marie et Thomas Morlec

Tous propos recueillis par VM et TM

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