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Les leçons tactiques de PSG-OM

Par Markus Kaufmann
Les leçons tactiques de PSG-OM

Alors que la rivalité classique continue à avancer dans l'histoire, son pas boiteux ne peut plus dissimuler le déséquilibre structurel qui lui fait perdre tant de saveur. Aujourd'hui, PSG-OM n'est plus un choc culturel tendu, et les deux clubs ont su se trouver d'autres ennemis. Mais pour ses dernières représentations, il faut reconnaître que le pas boiteux a été régulier : Marseille y croit au début, Paris gagne à la fin.

Le maillot blanc. Le pressing agressif. Les contre-attaques déterminées. Les traits de Michel. Le cœur de Lassana Diarra. Cette première demi-heure marseillaise avait une certaine allure madrilène. Non pas une aura galactique, mais plutôt des traces de la Furia espagnole des années 1980 et 1990. C’était l’Espagne qui créait beaucoup et finissait toujours par perdre face aux méchants Italiens et Allemands. C’était l’esprit de Juanito, les schémas de Javier Clemente et la verticalité de Luis Enrique. Dimanche, c’était un peu cet Olympique de Marseille capable de jouer avec les idées claires et de pouvoir déchirer la copie brouillonne des Parisiens, le temps d’une vingtaine de minutes. Comme l’an passé avec Bielsa, l’OM a mieux commencé. Comme l’an passé, l’OM a trébuché face au premier obstacle italien, puis face au deuxième, allemand : Ibrahimović déguisé en Tassotti, Trapp en Matthaüs. Le cynisme est-il plus fort que la foi ? Allez demander aux quatre étoiles qui couronnent le maillot de la sélection italienne. Allez demander aussi au palmarès de Raúl et Morientes en sélection. Même si, en réalité, peu importe : le PSG s’est montré plus cynique et a aussi fini par se montrer plus fort. Mais les Parisiens n’étaient pas pressés (et ce n’est pas forcément un défaut).

La furie marseillaise

Si la rivalité connaît une période de déséquilibre, le thème s’est aussi invité dans l’opposition tactique au Parc. La première demi-heure peut être imagée de la sorte : l’OM court sur son attaque, le PSG s’assoit sur sa défense. Difficile de dire quel phénomène est la réaction de l’autre, et peu importe. Mais le manque de créativité de la sortie de balle parisienne couplé au tranchant de la relance marseillaise donne le premier avantage à Marseille. On aurait pu croire que le 4-2-3-1 de Michel allait se retrouver rapidement déséquilibré par la possession de Blanc, mais tout l’inverse se produit. Lors des vingt premières minutes, l’OM se montre plus dangereux et plus ordonné que le PSG : 4 tirs à 1, malgré 40% de possession. En plus de Lass (cf. paragraphe ci-dessous), le grand responsable est Michy, crucial en point d’ancrage hyper mobile (6 tirs, 33 passes, 2 longs ballons sur 2). Au départ, le danger se concrétise sous la forme de frappes lointaines et stériles d’Alessandrini et Cabella, comme Gignac et Payet la saison dernière.

Presque surpris d’arriver si facilement à la surface parisienne, les Marseillais ont la consigne de frapper dès qu’ils le peuvent. La bonne utilisation de Cabella et Barrada dans le troisième quart ouvre le 4-3-3 de Blanc, trop passif sans ballon et trop patient en phase de possession. Les deux offensifs ne font pas seulement le lien avec leurs milieux sur de belles sorties de balle, ils parviennent aussi à porter les attaques blanches. Marseille court sur son attaque : Nkoulou et Rolando ne touchent que 5 et 7 ballons respectivement lors des 20 premières minutes : tout se passe dans le camp parisien et l’OM va droit au but, trop pressé ou trop conscient du manque de temps de domination qu’il lui reste. Mais l’OM n’a pas que l’agressivité de la Furia espagnole. Elle en a aussi la naïveté. Si la sortie de balle de l’action du but de Michy est un cas d’école, la prise de risque et la précipitation à la relance sont telles que la moindre perte de balle devient une occasion parisienne.

Le brouillon gagnant du PSG

En face, le PSG joue sur un faux rythme. Maxwell fait une fausse touche, Ibra perd deux ballons dans les trois premières minutes. Paris dort sur sa défense parce que le ballon somnole entre les pieds de Verratti (21 ballons en 20 minutes) et David Luiz (17 ballons) : Di María et Matuidi touchent seulement 10 ballons dans les 20 premières minutes. Si le PSG construit peu, il se montre surtout vulnérable dès que le rideau Verratti-Motta est piégé dans la transition. Comme souvent, la santé du Parc dépend alors de la lecture du jeu de Thiago Silva ou de la prise de risque de David Luiz. Silva s’avance pour boucher le trou et il faut dire que dans la majorité des situations, cela suffit pour éviter l’infection. Devant, alors qu’il est difficile d’atteindre Di María et Cavani, seul Ibra permet de maintenir un semblant de dialogue avec le milieu. Face aux murmures du Parc qui semblent avoir envie de le voir partir à la retraite, le Suédois reste le pilote des contres parisiens qui s’appuient sur son moteur Aurier à la 12e, puis sur Cavani à la 19e. À la 23e, Zlatan peut déjà ouvrir le score face à un héroïque Mandanda (cet arrêt sur Pastore, sérieusement…). Il terminera finalement le match avec un savoureux doublé à l’italienne. À sa sortie, Cavani n’a jamais réussi à rétablir un semblant de hiérarchie offensive. Une occasion manquée pour l’Uruguayen ?

Le réveil du PSG coïncide finalement avec la multiplication des interventions de Di María. Après avoir touché seulement 10 ballons en 20 minutes, l’Argentin en touche 23 dans les 20 suivantes, dont 3 tirs (2 cadrés). En l’absence de Javier Pastore, il semble évident que c’est à son compatriote argentin de porter l’animation offensive parisienne. Mais la structure de ce 4-3-3 ne s’y prête pas : Di María est bien trop éloigné de Motta pour espérer faire le lien entre élaboration et création. Le constat de Laurent Blanc est lucide : « On n’a pas réussi à mettre notre jeu en place. On n’a pas fait un grand match, mais même sans cela, on a des occasions et on marque des buts. » Peu de jeu, mais beaucoup d’occasions. Suffisant pour en tirer trois points. Reste à savoir si les enseignements seront aussi clairvoyants. Le PSG peut-il vraiment se priver de Pastore sans remplacer l’élaboration du Cordobés ?

Capitaine Diarra

On a cru le revoir au milieu du Camp Nou un soir de demi-finale de Ligue des champions, mais avec plus de responsabilités organisatrices et d’influence au cœur du jeu. Lors des vingt premières minutes du match, les seules minutes vraiment marseillaises, Lass a été ce milieu au degré d’agressivité maximal qui a osé venir mettre en difficulté la paire Motta-Verratti. Lors des vingt suivantes, il a tout fait pour soigner la relance des siens, minimiser les risques de pertes de balle et maintenir la hauteur du bloc. En seconde période, Lass était déjà le dernier élément marseillais à jouer avec l’intensité de la première période. Alors que beaucoup aiment multiplier les comparaisons avec Matuidi, ce qui n’a pas de sens (tactiquement, en tout cas), il faut encore le voir comme un meneur de jeu reculé. Dans le costume du Xabi Alonso de cet OM, celui du numéro 6 sans possession, le Français a alterné construction et destruction avec la sérénité de celui qui n’a pas besoin d’air pour respirer. 47 passes, plus que tous ses coéquipiers (mais deux fois moins que Verratti) et 6 interceptions. L’équilibre du 4-2-3-1 porte son nom : Verratti semblait presque heureux d’avoir enfin un défi en Ligue 1. Finalement, il lui a seulement manqué de la précision sur ses longs ballons (0 sur 4), mais ici les duels aériens gagnés par la défense parisienne ont leur part de responsabilité.

Le cas De Ceglie

De tout temps, le football italien nous a fait croire à une puissance surnaturelle capable de transformer un défenseur aux apparences limitées en gladiateur tactiquement irréprochable. Un défenseur qui ne se montre pas, mais qui ne laisse rien passer. Dimanche soir, malgré son glorieux prénom, Paolo De Ceglie a démystifié le défenseur italien. Si Marseille a finalement payé le prix de deux erreurs, les Parisiens ont multiplié les occasions, et le score aurait pu être bien plus lourd. L’espace entre De Ceglie et Rolando ne s’est jamais refermé, et Paris a attaqué ce côté sans relâche. À droite, Aurier et Di María se sont gavés de 3 passes clés chacun, toutes dans cette zone de non-droit. De Ceglie, lui, a réalisé une performance unique à ce niveau : se montrer décisif sans jouer. À un poste de latéral normalement sollicité, l’ex de la Juve a réalisé seulement 8 passes (pour info, Mandanda en a fait 30, Dja Djé Djé a eu le temps d’en faire 11 en 20 minutes), 0 tacle, 1 dégagement et seulement 62% de passes réussies. Comme si un être invisible n’arrivait pas à se cacher.

Kevin Trapp, des pieds et des mains

Dans un monde en noir et blanc, la boulette de Kevin Trapp contre Bordeaux aurait pu condamner le gardien allemand et faire revenir Salvatore Sirigu dans les cages parisiennes. Dans un monde en noir et blanc, ce penalty de Barrada arrêté avec autorité aurait suffi pour en faire un héros moderne du PSG, loin devant le manque d’influence de son concurrent italien lors des gros rendez-vous. Seulement, le monde est un peu plus nuancé que ça. Dimanche soir, il était bleu, blanc et rouge. Et alors que les titres bruyants alternent entre l’aride sévérité et la pluie d’éloges pour Trapp, certains chiffres silencieux en disent bien plus. Lors des trois dernières saisons, Sirigu avait un taux de passes réussies de 64%, 71%, puis 70% la saison passée. Cette année, Trapp est à 80,5%. Une révolution silencieuse.

Dans cet article :
Procès des vrai-faux agents à Marseille : Le déballage avant le ménage ?
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Par Markus Kaufmann

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