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Il n’y a qu’Unai qui m’aille

Par Alexandre Doskov
Il n’y a qu’Unai qui m’aille

Accusé de tous les maux à chaque mauvaise sortie parisienne depuis le début de saison, Unai Emery trouve des soutiens dans le flot des critiques qui déferle depuis mercredi sur le PSG. Curieux ? Pas tant que ça, car au fond d'eux-mêmes, les supporters et les dirigeants parisiens savent qu'Emery est un bon coach et que les plus belles heures de son mariage avec Paris sont devant lui.

Les armes sont chargées. Les canons bien astiqués, les cartouches bien alignées et portées en bandoulière, comme dans Rambo. Observateurs, fans, journalistes, consultants, tous étaient prêts dès le coup de sifflet final du Barcelone-Paris de mercredi à défourailler sur le PSG. Mais en visant qui, exactement ? Le problème avec un cataclysme de ce genre, c’est qu’on ne sait pas vraiment sur qui tirer. Qui mérite plus que les autres que l’on s’acharne sur lui ? Nasser, dont les déclarations ambitieuses et grandiloquentes ne font plus rêver personne ? Thiago Silva, capitaine abandonneur, qui se met à marcher de travers dès que son brassard devient un peu trop lourd ? L’arbitre, cible traditionnelle d’un public qui s’estime volé ? Di María pour son duel raté, Trapp pour ses sorties manquées ? Impossible de réussir sa partie de ball-trap quand tant de plateaux sont lancés en l’air. Mais la cible idéale, la tête de Turc ultime, celui censé assumer le rôle de sac de frappe avec un grand S, c’est évidemment Unai Emery. Tabasser un entraîneur fait partie du folklore du monde du football, et même si ce n’est que rarement efficace, ça défoule. Sauf qu’après la bérézina du Camp Nou, cette lame de fond habituelle ne s’est pas abattue sur le coach parisien. Et paradoxalement, alors que la France avait réservé un mauvais accueil à Emery en lui tombant dessus pour un oui ou pour un non lors de ses premiers mois, il devrait sortir indemne de la pire défaite de l’ère QSI.

Pas comme Blanc

Il semblerait même que le monde se soit fracturé en deux catégories : ceux qui maintiennent que l’entraîneur reste le premier responsable, car premier exposé et premier à devoir rendre des comptes sur la façon de jouer de son équipe, et ceux qui défendent Emery en ne le jugeant pas responsable du match horrible de ses joueurs. Plus étonnant encore, le deuxième groupe semble recueillir la majorité des suffrages, et Nasser a résumé l’état d’esprit ambiant en expliquant dans la longue interview qu’il a accordée au Parisien il y a quelques jours : « Vous disiez tous que c’était le meilleur coach du monde après le match aller. Ce n’est pas devenu le plus nul après le match retour. Soyons sérieux… » Dans le même entretien, le président du PSG jouait les bons potes et envoyait une grande tape dans le dos de son entraîneur : « J’ai déjà eu de longues conversations avec le coach ces deux derniers jours. Unai a des qualités en lesquelles nous croyons. Il a mon soutien plein et entier. » Bien entendu, il faut se méfier des déclarations tièdes d’un président qui, en avril dernier, prolongeait Laurent Blanc jusqu’en 2018, puis déclarait « on a confiance en lui » une semaine plus tard après l’élimination contre Manchester City, pour le faire dégager au mois de juin. Mais Emery est dans une situation totalement différente, et alors qu’on demandait à Blanc un triplé Coupe de la Ligue/Coupe de France/Championnat + une demi-finale de Ligue des champions chaque saison, la galaxie parisienne montre autant d’indulgence que d’intelligence dans la gestion du cas Emery, et c’est tant mieux.

Titi et gominé

On demandait la démission d’Emery pour un 2-1 encaissé à Guingamp, mais on est prêt à lui pardonner le 6-1 du Camp Nou ? Pourquoi ce revirement ? Il faut dire que le Emery en question a toujours montré un état d’esprit irréprochable. Pas seulement par rapport au huitième de finale contre Barcelone, même s’il a eu l’intelligence de ne pas avoir été arrogant entre les deux matchs et d’avoir eu des propos mesurés après le 6-1, mais depuis qu’il a posé ses valises à Paris. Souvenons-nous, il n’y a pas si longtemps, le PSG abordait le virage de la mi-saison à la troisième place en L1 avec quatre défaites au compteur dont certaines faisaient franchement tache, et les choix d’Emery rendaient fou pas mal de monde. La sous-utilisation de Ben Arfa, la politique des gardiens, la question du projet de jeu, tout était devenu sujet à débat, et Emery en prenait plein la poire à longueur de temps. Lui était resté calme, digne. Caricaturé en coach sans cap gominé sur son banc de touche, il répondait en faisant l’effort d’apprendre le français et en montrant des signes d’attachement à la ville de Paris. Atteint d’un mal profond, le PSG ne veut pas y ajouter la culture du zapping qui était la sienne au milieu des années 2000. Les rumeurs Mancini ou Simeone ne sont que du vent, et si des têtes doivent tomber, celles de Kluivert, de Letang ou même de Nasser finiront sur une pique avant celle d’Emery. « Je suis un entraîneur qui a vécu beaucoup de mauvais moments dans ma carrière. Si j’avais renoncé à chaque fois, je serais à la maison depuis longtemps » , balançait hier le coach parisien en conférence de presse. Et aujourd’hui, sa maison, c’est Paris.

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