Gerd Müller, ce héros ! (Suite)
Exceptionnellement, vu les réactions passionnantes des internautes à propos du Bomber (article du vendredi 20 février, «Gerd Müller, ce héros !»), on va donner suite à quelques interrogations sur son compte. Et surtout, apporter la preuve que les chiffres de l'UEFA sont faux, qu'on nous cache tout, qu'on nous ment, qu'on nous exploite et qu'on nous spolie.
Rappelez-vous du classement officiel des meilleurs buteurs de l’histoire des Coupes d’Europe. Avec 66 buts chacun, Fillippo Inzaghi et Raul étaient classés en tête de ce Hall of Fame en supplantant Gerd Müller (62 buts)… Hall of Shame ?
En fait, Gerd Müller a inscrit 69 buts en 77 matchs dans les trois coupes d’Europe (C1, C2 et C3). Petit détail important : il a aussi joué la Coupe des Villes de Foire, ancêtre de la Coupe de l’UEFA, durant la saison 1970-71 (la dernière édition, avant de se transformer en Coupe de l’UEFA). Il y a même marqué 7 buts en 8 matches.
Autre précision, il a aussi marqué 3 buts en 3 matches lors de finales de Super Coupe d’Europe. En gros, l’UEFA a comptabilisé ces 3 matchs et ces 3 buts marqués en Super Coupe mais elle a zappé les 7 buts en 8 matchs inscrits en Coupe de Ville des Foires. On se demande bien pourquoi… Après tout, l’édition 1970-71, au cours de laquelle l’ami Gerd a marqué, n’avait plus rien à voir avec la petite compétition pittoresque des débuts (la Coupe des Villes de Foire a existé de 1955 à 1971).
En 1970-71, les “Villes de foire” avaient laissé place à tous les 2èmes et 3èmes des championnats nationaux de tout le continent. Bref, une vraie Coupe d’Europe, avec du lourd. Qui plus est, beaucoup de clubs qui ont gagné une Coupe des Villes de Foires (avant 1971, donc) font figurer à leur palmarès officiel un titre de vainqueur de la Coupe de l’UEFA (c’est-à-dire de la C3) ! Par exemple, on dit souvent du grand Barça qu’il fait partie des rares clubs européens à avoir gagné les trois Coupes d’Europe (C1, C2 et C3). Sauf que non ! On attribue au club catalan 3 victoires en C3 alors qu’en fait, ce n’étaient que trois Coupes de Villes Foireuses remportées en 1958, 1960 et 1966… Comprenez le malaise ?
Dans ce cas-là, pourquoi gruger Müller et ses 7 buts, qui ne figurent pas au décompte officiel ? Enfin, au nom de quoi qualifier une finale de Super Coupe de “match européen” ? C’est quand même un trophée à part, créé tardivement (1974) et qui ne respecte aucun principe d’équité puisque seuls deux équipes la disputent et non pas tous les clubs continentaux… Alors pourquoi en comptabiliser les buts inscrits ?
Voilà pour la compta des meilleurs buteurs en Coupe d’Europe, où quoi qu’il en soit Gerd Müller reste quand même le N° 1, au ratio “buts inscrits par match” toujours supérieur aux autres.
Dans un autre registre, il est intéressant de revenir sur les extraordinaires performances de scoreur de Gerd Müller. De 1964 à 1981, Der Bomber a marqué 650 buts en 731 matchs. On compte ici, tous les buts inscrits avec le Bayern (Coupes-Championnat, coupes d’Europe), buts en Mannschaft et aux USA (avec les Strikers de Fort Lauderdale, 1979-81). C’est tout simplement énorme : quasiment un but par match…
Et c’est là aussi qu’il faut apporter une précision par rapport à l’article d’hier où on insistait sur le fait que Müller a joué le gros de sa carrière dans la deuxième partie des années 60 et dans les années 70, à une époque où le foot hyper offensif d’avant et des scores fleuves avait disparu. Pour bien comprendre, il faut donc comparer avec le seul super crack qui en gros a fait mieux que Müller : Pelé, lui-même.
Le bilan perso du Roi : 1282 buts en 1367 matchs… Ben, oui : ça calme. Sauf que c’était avant les années 70 que Pelé engrangeait les buts à foison et profitait de championnats (et de coupes) régionaux et nationaux à rallonge. Et puis il y avait les tournées incessantes de Santos aux quatre coins du monde. Durant la saison 1959, sa saison la plus prolifique, Pelé a marqué 123 buts en 103 matchs. En 1961, 111 buts en 75 matchs et en 1965, 106 buts en 74 matchs… Énorme, bien sûr. Mais quel véritable crédit accorder à ce football d’un autre âge, hyper offensif (système en 4-2-4) avec un nombre exponentiel de matchs (plus de 100, parfois) ? Reste que Pelé demeure le meilleur buteur de tous les temps. Müller arrive derrière… Petit rappel : en 1971-72, 50 buts en 48 matchs, et la saison d’après, 55 buts en 44 matchs.
Enfin, pour en finir avec la Bête, quelques réponses aux internautes… Il n’y a aucune nostalgie dans le fait d’évoquer la carrière d’un joueur “d’avant”. Les circonstances autour du classement des meilleurs buteurs en Coupes d’Europe ont fait qu’il était intéressant de parler d’un immense joueur, toujours scandaleusement négligé. Le prototype absolu du buteur, c’est lui. Dans les 16 mètres, il était peut-être même supérieur à Pelé…
Ensuite, on ne peut évidemment pas “comparer ce qui n’est pas comparable”, mais Gerd Müller fait partie de ces rares joueurs qui auraient brillé quelles que soient les époques, y compris la période actuelle. Un tel instinct de chasseur est intemporel. Quant à ceux qui disent qu’il « se ferait manger tout cru aujourd’hui » , à cause du physique et du sens tactique plus aigu des défenseurs actuels, ils feraient bien de revoir tous les buts qu’il a marqués en duels serrés ou au milieu de cinq défenseurs mastoc.
Enfin, petit clin d’œil à Vince 53, qui avait parlé des poteaux carrés… Référence bien sûr à la finale de C1 perdue 1-0 par les Verts en 1976 contre le Bayern, à Glasgow. L’ASSE “méritait” de gagner et a eu la malchance de taper deux fois sur les barres carrées. Reste que… Dans le premier quart d’heure, un certain Gerd Müller avait marqué un but refusé pour hors-jeu. En revoyant les images, il y a peu, on s’aperçoit que ce hors-jeu n’était vraiment pas évident du tout. Alors…
Merci aux internautes d’avoir enrichi le débat…
Chérif Ghemmour
PS : Pour ceux que ça intéresse, voici un lien utile qui décrit dans les détails les stats de Müller en Coupes d’Europe (buts, matchs, minutes) : http://www.rsssf.com/players/gmueller-in-ec.html
Enfin, visionnez toutes les images des buts de Müller. C’est vraiment impressionnant. Pas toujours très esthétique, mais nobody’s perfecto.
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