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Arsène Wenger, le dernier samouraï

Par Nicolas Jucha
Arsène Wenger, le dernier samouraï

Début 1995, Arsène Wenger prend le monde du football à contre-pied en signant au Japon, à Nagoya, quelques mois après son limogeage de l'AS Monaco. Un séjour de 18 mois qui fera office de transition cruciale entre Monaco et Arsenal dans la carrière du technicien alsacien.

Départ surprise à Nagoya

« Ce n’est pas Arsène Wenger qui est venu me chercher pour aller au Japon, c’est moi qui l’ai appelé. J’ai toujours été attiré par l’Asie et j’ai plusieurs fois songé à aller sur ce continent. Un jour, mon frère Franck me dit : « T’as vu que Wenger est parti au Japon ? » J’ai téléphoné de suite à Arsène et lui ai demandé comment il avait fait pour débarquer à Nagoya. Il m’a répondu : « Pourquoi tu me demandes ? » Je lui ai expliqué que j’avais toujours eu envie de vivre une expérience en Asie et il m’a simplement dit : « Si ça t’intéresse, tu m’intéresses ! » C’est comme ça que je suis parti. » Ancien international français et pilier de l’AS Monaco au début des années 90, Gérald Passi a eu la chance d’accompagner Arsène Wenger lors de son escale de 18 mois au Japon. Fraîchement limogé de l’AS Monaco après huit saisons brillantes – champion 1988, Coupe de France 1991, finale de Coupe des coupes 1992 -, mais un début de saison raté, l’Alsacien est approché par Nagoya l’hiver suivant. Début 1995, il débarque en J-League à la tête d’un club de bas de tableau. Ses premières décisions : prendre Boro Primorac comme adjoint – ce dernier est encore compagnon de route 20 ans après à Arsenal – ainsi que deux joueurs français avec Franck Durix et Gérald Passi, pour compléter un effectif qui compte également le génie Dragan « Pixie » Stojković.

Passi se souvient d’un football à construire : « Quand on est arrivé, le football japonais était très naïf et bon enfant, avec une perception du football uniquement comme un jeu. La J-League existait depuis trois ans, les clubs ne descendaient pas… Tout était un peu rose, et nous, on arrivait d’un football où la nécessité du résultat était omniprésente. » Pour Arsène Wenger, plusieurs difficultés se présentent : la barrière de la langue, le choc culturel, et la faiblesse tactique de ses ouailles. Pour ce qui concerne le terrain. Car en dehors, où les francophones passent beaucoup de temps à discuter ensemble « car sinon on ne parlait à personne » , Gérald Passi se souvient de quelques situations cocasses, notamment au tout début de l’aventure : « Aussi bizarre que cela puisse paraître, les Japonais ont le regard tourné vers les États-Unis, donc quand ils organisent quelque chose, ils font une sorte de show à l’américaine. Ils ont fait la présentation de l’équipe dans un énorme amphithéâtre en plein été. Il faisait super chaud, ils nous ont donné une coupe avec une boisson dedans. On attendait, on avait soif, alors on a commencé à boire, et à peine on a mis le verre à la bouche qu’on a senti un gros malaise. En fait, c’était pour trinquer avec le millier de personnes présentes, il ne fallait surtout pas boire et attendre que chacun soit servi pour faire kampaï avec tout le monde ! » Mais Arsène Wenger est intelligent et s’adapte vite au contexte nippon, transformant le faible Nagoya Grampus Eight en machine de guerre et laissant une trace indélébile sur l’ensemble du foot nippon.

Un héritage Wenger au Japon

Équipe de bas de tableau à son arrivée, Nagoya tutoie les sommets rapidement sous la houlette du coach français : 4e de la première phase de la J-League, ses hommes frôlent la victoire lors de la seconde, « à un match près contre notre rival direct » se souvient Passi. « Au début, on était vraiment dans les bases du football. Wenger a amené une organisation solide rapidement et, avec une équipe qui avait fini en bas de tableau, plus l’apport de Durix, le Brésilien Torres et moi, il a failli être champion. » Le Nagoya de Wenger ne remporte pas le championnat, mais s’adjuge la Coupe de l’Empereur, tout en développant un projet de jeu, « de passes courtes et tourné vers l’avant, agréable à regarder pour les spectateurs, mais aussi à mettre en place pour les joueurs » se souvient Tetsuo Nakanishi, milieu de terrain et interprète à l’occasion pour le technicien français.

Au moment de son départ pour Arsenal, 18 mois après son arrivée surprise, Arsène Wenger a le droit de faire un discours d’adieux dans le stade de Nagoya. Ovationné, l’Alsacien s’exprime en japonais, à l’exception du « thank you very much » final, et s’offre un tour d’honneur digne des plus belles histoires d’amour footballistiques. Preuve qu’il n’est pas parti comme un voleur, son ancien club termine la saison beau deuxième, et la plupart des observateurs locaux voient en lui l’inspiration du jeu court des Blue Samouraïs de l’équipe nationale. « A posteriori, j’ai réalisé à quel point Wenger avait été bon, car il devait s’exprimer via un interprète. Il pensait en français, s’exprimait en anglais, et son traducteur transmettait en japonais aux joueurs. Au fur à mesure, il a réussi à combler les difficultés de communication, car l’interprète n’avait pas forcément énormément de connaissances en football, donc parfois, il interprétait à sa manière les consignes. Déjà qu’il y a des incompréhensions quand on parle entre francophones, alors là… » Pour Gérald Passi, la réussite de Wenger au Japon, c’est celle de l’intelligence et de l’ouverture d’esprit. De retour à Nagoya à l’été 2013 pour un amical entre Grampus Eight et Arsenal, Wenger a eu la joie d’une nouvelle ovation du stade et d’une banderole « Welcome Home Bengeru » , Bengeru étant la prononciation japonaise de son patronyme. Mais si Arsène Wenger a beaucoup donné au football japonais – y compris un livre de management pour le public japonais, Sosho no Esprit (l’esprit de conquête) – l’inverse est également vrai.

Un tournant dans la carrière de Wenger

« Ce fut un changement bienvenu dans ma vie, une expérience fantastique. Cela m’a profondément transformé, ma vision de la vie a changé au Japon. Cela a été une expérience très profonde et positive. C’était sûrement un peu fou à ce moment de décider d’y aller, mais je suis reconnaissant de cet instant de folie » , estimait Arsène Wenger il y a un an à propos de son choix de carrière japonais. Cette théorie, qui voit en l’étape Nagoya un parcours initiatique salvateur pour l’Alsacien, Gérald Passi y croit dur comme fer : « Ce séjour au Japon a été un tournant dans sa carrière. Il est parti dans un pays qui est complètement différent, pour moi c’est une autre planète. Il a su s’adapter, faire passer ses messages et il a progressé. » Le principal point d’amélioration selon l’ancien milieu de terrain reconverti recruteur à l’OGC Nice, c’est l’approche psychologique. « À Monaco, il était directif, imposait des contraintes et était exigeant. Il n’a pas pu le mettre en place au Japon, car il a senti qu’il fallait lâcher du lest, il n’avait pas la maîtrise de la culture et de la langue locales. » Résultat, l’entraîneur apprend à s’adapter aux spécificités de chaque individu, à faire confiance aussi, à ne pas vouloir tout contrôler. « Il n’a pas tout lâché, mais il a appris à mettre en avant ses joueurs, les valoriser, alors qu’avant, à Monaco, il ne parlait que du collectif. » À Nagoya, Wenger a donc préparé son arrivée à Arsenal, de son propre aveu « car il a désormais la capacité à prendre de la distance » . Pour Passi, l’ancien entraîneur de Monaco a tout simplement passé un palier psychologique au Japon. Tout en ayant une expérience de l’engouement poussé à son paroxysme, selon le témoignage de son ancien milieu de terrain : « L’ambiance était extraordinaire, chaque match, c’était la Coupe d’Europe. Il y avait 30 caméras, des sollicitations de partout, un engouement incroyable avec des stades dont tous les billets avaient été vendus pour les deux saisons à venir. Wenger s’en amusait avec son éternel petit sourire en coin. »

Par Nicolas Jucha

Propos de Gérald Passi recueillis par Nicolas Jucha, propos d'Arsène Wenger issus du site officiel d'Arsenal, propos de Tetsuo Nakanishi tirés du Japan Times

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