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Adrien Rabiot, sur les traces de Pistillus

Par Maxime Brigand
Adrien Rabiot, sur les traces de Pistillus

Formé puis mis au placard par le PSG, Adrien Rabiot traîne actuellement son spleen pendant que sa mère, Véronique, affirme que son fils ne « va pas se mettre à la poterie ». Une erreur, car l’international français a bien un avenir dans le milieu potier. La preuve.

Il faut voir ce type fondre sur l’escalier mécanique qui sépare la rue Corbineau et le quai numéro quatre de la gare de Bercy. Capuche de sweat délicatement posée sur le haut des bouclettes et une carte jeune glissée dans la poche arrière de son jean, il file vers la troisième voiture d’un train qui le jettera quelques heures plus tard à Nevers. Un rapide coup d’œil sur le smartphone suffit : c’est les fesses posées sur la mousse de la place 48 qu’il verra défiler les paysages et avalera cette nouvelle journée de mélancolie. Difficile de couper complètement avec le reste du monde quand le reste du monde ne parle que de vous. Même cette mère de famille, installée place 45, semble chercher à le comprendre et à détricoter son cas sous les yeux d’un fils attentif. Dans la main droite, elle tient son quotidien préféré, trente-huit centimètres sur vingt-huit où s’affiche, à la une, le visage d’une mère en colère. Une mère qui parle de « sordide » et d’un fils « prisonnier » qui pourrait bientôt être mis « au pain sec, à l’eau et au cachot » . Ce fils est justement le mec de la place 48 et il a, à cet instant, le regard posé où il se sent certainement le mieux : dans le vide. Faire un six avec un dé ne pouvant lui permettre d’ouvrir les menottes que lui a enfilées le PSG, Adrien Rabiot n’a qu’une clé possible pour faire sauter la serrure : s’échapper. Ça l’a pris comme ça, un matin de mars, avec des yeux brillants et sur un SMS envoyé à sa mère : « Maman, je pars. »

En réponse, il reçoit une interrogation. Adrien ne répond pas, entrouvre la fenêtre du wagon de son Intercités et balance cette cochonnerie de cellulaire. La suite ? Un malaise d’abord, suivi d’un moment de flottement dans la locomotive, auquel le chevalier répond en tirant un bouquin de son fourreau. Un classique de Jacqui Akin, la papesse d’Abergavenny, ce qui est déjà autre chose que Papus Camara. Sabots en plastique au pied, son voisin, un homme dont le crâne est une zone dépoilée, ose une approche : « Monsieur… » En réponse, Adrien Rabiot sort une incisive. La bête n’est pas facile à dompter, encore faut-il le savoir. Peut-être encore plus lorsqu’elle est en chasse. Celle-ci a un objectif : si le bonhomme est en route pour la Nièvre, c’est pour rebondir ensuite en Saône-et-Loire, et plus précisément à Autun, où la poupée désir du foot français a rendez-vous. Comme un fils qui aime inventer la suite des histoires qu’on lui lit le soir, Rabiot se met à rêver d’un autre monde, d’une autre vie, d’un univers où on ne lui demandera pas de monter sur un VTT en pleine forêt de Rambouillet et où on ne le regardera plus comme la pâle copie d’un homme né Louis-Dieudonné. Sa porte de sortie est pourtant bien là, après 550 mètres de D681 et 650 autres avalés sur une route de campagne : les menottes de Rabiot s’ouvrent.

Meilleur manieur de tournette de sa génération

Coiffé à la Alexi Lalas, Pierre-Alain Capt, les mains pourries par l’argile et des bottes genouillères aux pieds, sort de sa cachette. « Adrien, enfin… » , ouvre l’homme venu tout droit de Suisse pour l’occcasion. « C’est un honneur, maître » , répond Rabiot, transformé en Anakin par le regard du Palpatine de la poterie, qui enchaîne : « Tu sais, Adrien, il y a une trentaine d’années, j’étais comme toi, un jeune perdu, aux rêves brisés… Puis, j’ai trouvé une voie annexe et j’ai voulu comprendre les choses. Un jour, on m’a dit que j’étais juste bon à tenir une tournette. Finalement, j’ai appris à me servir d’une tournette et je suis devenu le meilleur. Aujourd’hui, je dois passer la main. » Et Adrien Rabiot est l’élu, contrairement à ce que sa mère criait aux loups. Personne ne sait vraiment où cette histoire a commencé, sans doute le gosse de Saint-Maurice avait-il simplement besoin d’un couteau pour évacuer sa peine : après tout, il vaut mieux graver son nom sur des moules que planter un schlass sur un banc. Précoce et ambitieux, Adrien ne débarque pas dans le cercle des apprentis potiers pour y être le Federico Macheda de la cruche en terre cuite. Non, il veut en devenir une référence, une vraie, comme Capt, comme Akin et surtout comme Pistillus, roi de la poterie gallo-romaine qui possédait justement un atelier à Autun.

Après une petite nuit passée à disserter de l’œuvre de Pierre Abadie, Adrien et Pierre-Alain filent au repère de Pistillus, se recueillent sur le lieu de création de l’expert historique de la poterie érotique des premiers siècles de l’après J-C et se mettent au boulot. Très vite, Capt se rend compte que son jedi est une diva aux mains d’orfèvre et tranche : « Adrien Rabiot a la finesse de création d’un Jean Gerbino. C’est bluffant. J’ai peut-être entre les mains le meilleur manieur de tournette de sa génération. » Le stage de Rabiot à Autun va durer trois mois, au bout desquels une conférence de presse est organisée pour tourner définitivement la page. L’ancien marquis range ses crampons, baisse son short pour enfiler un tablier et débarque face aux journalistes avec sa nouvelle équipe : des ébauchoirs, une estèque, une planche en bois et un stock d’argile. Et lâche : « Me voilà prêt à entamer ma nouvelle vie. Je remercie Pierre-Alain Capt d’avoir cru en moi et de m’avoir permis de mettre à profit mes qualités d’artiste. En arrivant à Autun, je n’avais que mon titre de champion de Larmor-Baden de château de sable en poche. J’ai connu la haine, les tomates jetées, j’arrive aujourd’hui sur un autre terrain, mais je suis prêt à encaisser les critiques. Peut-être qu’il me fallait simplement changer de scène. » En avant.

Rabiotlogies, et start-up

Là où Adrien Rabiot a longtemps été un secret sur un terrain, un type toujours utile, mais rarement indispensable, il faut le voir jouer de l’ébauchoir et faire tomber les mâchoires des critiques spécialisées. Intrigué, Télérama envoie même l’un de ses snipers à la première exposition de l’ancien milieu relayeur, Rabiotlogies, où sont exposées les premières œuvres de l’ex-joueur du PSG, dont sa merveille Glaise Matuidi. Les retours médiatiques sont unanimes : le monde de la poterie tient bien là sa perle rare. « Une révolution sensuelle » , titre ainsi Libération. Rien que ça. Dans la foulée, Rabiot surfe sur le succès de sa première exhibition artistique et lance sa start-up Touche pas à ma pot’, dont l’objectif est de démocratiser l’art potier et de défendre les conditions des jeunes artisans. Le Français a surtout (enfin) trouvé sa cour, son audience et son moyen d’expression. C’est en tout cas ce que Pierre-Alain Capt raconte et affirme : « En fait, Adrien, c’est l’histoire de l’homme devenu ridicule qui a réussi à ridiculiser les autres. » Sans chicha, mais avec une tournette, donc. Histoire à suivre.

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