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Typologie des footballeurs amateurs, épisode 1

Par Swann Borsellino
Typologie des footballeurs amateurs, épisode 1

En son temps, Dmitri Ivanovitch Mendeleïvev avait classifié les éléments chimiques pour le plus grand bonheur de la communauté scientifique. Pour vous, SoFoot.com dresse le tableau périodique des joueurs de football amateur. Et vous les connaissez peut-être...

Julien, 36 ans, Paris, chef d’une boîte de pub

Julien a 36 ans, mais dans son équipe, on l’appelle quand même « Juju » . Sur le terrain, il est celui à qui tout le monde dit de se calmer et celui à propos de qui tout le monde s’excuse en fin de match, en jurant, l’air convaincu que « dans la vraie vie, il n’est pas comme ça » . Dans la vraie vie, Julien est à la tête d’une équipe dans une agence de pub parisienne où il manage trois autres Julien et deux Maxime. Son profil LinkedIn indique qu’il est plutôt créatif, qu’il maîtrise la communication de crise et qu’il speaks english very well depuis son ERASMUS dans une université de l’État de Géorgie, aux States. C’est là qu’il a joué sérieusement au soccer – il le raconte à qui veut l’entendre – et qu’il a découvert la mentalité américaine qui ne l’a plus quitté depuis. C’est aussi là qu’il a rencontré Léa, devenue il y a deux ans la mère du petit Gaspard. Léa trouve que Julien est aimant et rassurant, qu’il est un bon exemple pour leur fils. Mais ce que Léa ne sait pas, c’est que l’an dernier, elle a épousé un gros connard. Car le lundi soir, quand Julien joue milieu de terrain dans son équipe de foot à 7, elle dîne avec des potes. Elle n’est pas là pour le voir mettre des petits coups discrets dans les tendons d’Achille d’un gamin de 20 ans, en lui susurrant à l’oreille que sa mère est une prostituée. Elle ne le voit pas insulter l’arbitre avant de venir s’excuser quelques minutes plus tard, en lui expliquant « que c’était chaud au taf aujourd’hui » . Et si elle a déjà vu chez lui des signes de crispation lors d’une défaite au Times Up lors d’un week-end chez sa famille, Léa ne sait pas que son mari fait tout pour déclencher une bagarre à chaque match, contre des mecs bien plus costauds que lui. Sauf qu’un jour, ça finira mal. Et Julien, il devra alors expliquer au petit Gaspard pourquoi papa ressemble à Elmer l’éléphant.


Arthur, 26 ans, Lyon, runner et créateur de sa Start-Up

Depuis quelques semaines, Arthur essaye une nouvelle marque de chaussures de running. Des « Hoka » . Il espère que la semelle renforcée va l’aider à battre son meilleur temps lors du prochain semi. Ce soir, il a match contre le FC Bistrouille, en foot à 7 et quand ses copains prennent le métro jusqu’à Parilly pour se rendre au stade Jean Guimier de Vénissieux, lui préfère y aller en courant. Ça ne l’empêche pas d’arriver aux vestiaires avant tout le monde pour enfiler ses crampons Décathlon flambant neufs, qu’il a été obligé d’acheter après que son capitaine, un ancien du centre de formation de l’OL, lui a indiqué qu’il ne souhaite plus partager le terrain avec un mec qui joue en tennis sur du synthétique. Arthur a 26 ans, mais a toute la maturité nécessaire pour accepter le plus important : il n’est pas bon au foot, et le savoir est une force. En forme physique comme s’il préparait les prochains Jeux olympiques, il est celui qui joue sur un côté, car capable d’enchaîner les allers-retours, qui est toujours au marquage, toujours au bon endroit au bon moment et qui se contente de faire des passes dans les pieds et des crochets sur feinte de passe uniquement quand les adversaires commencent à être fatigués. C’est d’ailleurs en fin de match qu’il marque ses seuls buts de la saison, comme ce soir, face aux Rose et Bleu du Bistrouille FC, lassés de lui courir après. Ce qu’il y a de sympa avec Arthur, c’est qu’il est toujours d’accord pour aller s’en jeter une petite derrière la cravate après le match. Et il ne dira jamais non à un petit shot de téquila, non plus. Mais il fera quand même son semi-marathon en 1h12, l’enfoiré.


Pierre, 33 ans, Lille, en reconversion dans le social

Le suspense bat son plein sur le groupe Facebook de cette petite équipe lilloise. À J-1 avant ce nouveau match de foot amateur à 11, 10 joueurs seulement ont répondu présent. Entre les blessés, les amoureux, les bosseurs et ceux qui ont une maison de campagne et qui s’éclipsent à la moindre odeur de barbecue, gérer une équipe amateur est parfois plus difficile que faire tourner une Ligue 1. À 20h37, la nouvelle tombe : Pierre Poulard a publié : « J’en suis, évidemment ! » Mais est-ce vraiment une bonne nouvelle ? En reconversion dans le social après un passage dans la vie politique locale qui l’a « dégoûté » , Pierre, 33 ans, célibataire, aime le foot depuis petit, mais le foot ne lui rend pas. Excellent parieur, il connaît le 11 de Dijon et la biographie de Frédéric Sammaritano, du savoir en pagaille qui a certainement amputé le temps qu’il pouvait passer à apprendre à faire une passe de l’intérieur du pied. Positionné latéral gauche, Pierre aime tout le monde dans l’équipe, et l’équipe l’apprécie, car il est toujours là. Qu’il neige, qu’il pleuve, qu’il vente, ou qu’il y ait un match de foot que tout le monde a envie de voir, Pierre est là, dans l’espoir que peut-être, aujourd’hui, il va marquer ou faire une passe décisive. Chaussé de ses Puma One noir, Pierre a encore été nul ce soir. Mais personne ne l’engueule parce que tout le monde a accepté sa présence comme un fardeau imposé par le dieu du foot qui le rendra un jour au centuple aux membres de l’équipe.


Kevin, aka « Flash » , 21 ans, Montreuil-sous-Bois, étudiant

Elles sont arrivées juste à temps. Commandée en ligne sur son site préféré, la paire de Nike Mercurial Vapor 13 Elite FC Rose, taille 44, est entre les mains de Kevin. « Kevin » , c’est ce qu’il y avait marqué sur le colis UPS, mais si on en croit tous les snaps qui lui sont envoyés, ce jeune homme s’appelle « Flash » . Ancien pensionnaire du centre de formation du FC Metz après avoir fait les beaux jours de l’US Torcy, l’ailier virevoltant a vu sa vie changer du tout au tout après une blessure, arbre qui cachait la forêt d’innombrables problèmes de comportement. De retour à la vie normale, il joue une fois par semaine dans une équipe de potes où tous l’appellent par son surnom, en référence à la vitesse qu’il montre chaque samedi sur le synthétique du stade Maryse Hilsz, coincé entre le boulevard des Maréchaux et le périphérique parisien. Sur le terrain, Kevin a oublié que le football était un sport collectif. Sur le terrain, Kevin a aussi oublié qu’il y avait des adversaires. Incontestablement doué, il ne supporte pas le moindre contact et n’hésite pas à invoquer un « nique ta mère » aussi carré que ses passements de jambes s’il juge une intervention trop rugueuse. Aussi agaçant que doué, Flash débloque souvent des rencontres et ne manque pas de le rappeler à sa communauté. Son meilleur pote était d’ailleurs présent en tribunes avec du matériel de professionnel pour immortaliser son coup franc, afin qu’il puisse le publier sur son Instagram « @FlashOfficial » . Un rêve qui, assez souvent, est éteint par un défenseur de 35 ans, dur sur l’homme, face auquel Flash se rappellera d’une chose : il s’appelle Kevin.


Yves, 47 ans, Dreux, employé de la Poste

Ses cheveux ont déserté son crâne sans que la politesse ne quitte son âme. Ses Copa Mondial lacées comme si ses pieds étaient un corps qu’il avait voulu ligoter, Yves, 47 printemps, serre la main de tous ses adversaires avant de se positionner dans l’axe central de la défense d’une équipe dont il écorne sérieusement la moyenne d’âge. Employé de la Poste depuis près de 30 ans, Yves est celui dont on ne se méfie pas jusqu’à ce qu’on se rende compte qu’il est le meilleur joueur sur le terrain, comme si son talent était caché sous ce ventre bedonnant. Capable de lire le jeu comme personne, d’envoyer une transversale de 30 mètres dans les pieds et de se débarrasser de ses jeunes adversaires, soit d’un crochet court, soit d’un coup d’épaule qui rappelle qu’au boulot, il maîtrise le tampon, Yves est le coéquipier que tout le monde voudrait avoir. Altruiste, sérieux et aussi fort techniquement que fiable tactiquement, il ne s’énerve jamais, sauf quand il considère qu’on ne respecte pas le jeu. Car le foot, c’est toute sa vie et il a déjà affirmé, après un match, que « le jour où il ne pourra plus jouer au foot, ça sera comme une petite mort » . En attendant de savoir de quoi seront faits ces sinistres jours, Yves continue de se faire appeler « le vieux » sur le terrain tous les week-ends. Et il a bien raison de s’en foutre, car très souvent, ce surnom d’apparence peu flatteur est précédé d’un « il est trop fort » .

Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé est purement fortuite. Toute ressemblance avec des noms existants serait purement fortuite aussi.

Par Swann Borsellino

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