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Paul Ince, le patron du Nord

Par Mathieu Faure
4 minutes
Paul Ince, le patron du Nord

Ils ne sont pas nombreux à avoir joué à Manchester United et Liverpool (13 en tout). Parmi ces « parias », Paul Ince. Guerrier, pote d'Éric Cantona, premier capitaine noir de l'équipe d'Angleterre – c'était en juin 1993, face aux États-Unis -, mais surtout modèle d'intégration.

« S’il essaie de vous intimider, putain, il va en profiter. Ne le laissez jamais vous intimider, compris ? » Sir Alex Ferguson connaît parfaitement Paul Ince. Alors quand une caméra de télévision capte ses propos avant un derby entre Manchester United et Liverpool à la fin des années 90, la presse s’embrase. D’autant que Fergie va plus loin, qualifiant même son ancien joueur de « Good time Charlie » qui, en anglais, définit un personnage se prenant pour un roi, alors que tout le monde le voit comme un pur loser. Un branleur qui se la raconte, en gros.

une photo déchaîne les enfers

Ferguson va mettre dix ans avant de s’excuser publiquement pour ses propos. Allant même plus loin dans les colonnes du Guardian : « Avec Paul, ce n’était pas tout le temps la lune de miel parce qu’il avait un caractère tellement lunatique, mais il ne vous laisse jamais tomber. » Voilà, Paul Ince a joué à Manchester United et Liverpool, mais il a laissé une trace indélébile dans l’histoire du football anglais. Il faut dire que pour le milieu de terrain, la rivalité historique entre les deux clubs est une broutille. On parle d’un mec qui aurait pu – dû ? – finir sa vie derrière les barreaux. L’histoire de Paul Ince commence dans une taule perdue qui répond au blase d’Ilford, le 21 octobre 1967. Là où de nombreux footballeurs vont être couvés par leur famille, Ince va se débrouiller seul. Pur produit des quartiers durs de Londres, Ince est élevé par sa tante dans la culture antillaise parce que ses parents l’avaient abandonné quand il avait dix ans. Forcément, ça vous façonne le caractère. À Londres, quand vous avez un minimum de caractère et de talent, vous atterrissez à West Ham. C’est là-bas que le « Guv’nor » , comme il se surnommait lui-même, va apprendre le football. Suffisant pour convaincre Alex Ferguson – pas encore Sir – de le recruter en 1989. Sauf que le deal a failli ne jamais se faire… D’abord recalé à la visite médicale , il est finalement déclaré médicalement apte, mais le contrat n’est pas encore signé.

Pourtant, un cliché le montrant avec la tunique de MU sort dans la presse anglaise. Ince ne se doute de rien, il est en vacances. Mais à Londres, les fans de Hammers veulent lui ouvrir le bide. Il faudra toute la persévérance de Ferguson pour que le joueur ne panique pas. « On s’était tous mis d’accord avant mon départ en vacances. Et pour les photos, c’est mon agent de l’époque, Ambroise Mendy, qui m’avait conseillé de faire ses photos avant mon départ, histoire de ne pas me faire revenir de congés juste pour des clichés. Sauf que pendant mon absence, le Daily Star cherche une photo de moi avec le maillot desHammerset tombe finalement sur celle de MU qui ne devait être utilisée qu’après l’officialisation… » explique à son retour de vacances le joueur dans les colonnes de Four Four Two. Comme prévu, Ince débarque à United où Ferguson commence à façonner son équipe. Des teigneux, des tempéraments, des forts en gueule. Avec le temps, MUFC commence à se construire une grosse équipe. Ince joue avec Hugues, Keane et bientôt Éric Cantona. Cette équipe de dingues va réaliser le doublé en 1994. Dans le Nord, Ince devient le « Boss » de United, dixit Éric Cantona.

« Poulet écervelé »

Pourtant, Ferguson a toujours eu l’idée de vendre ses meilleurs joueurs au top. Ainsi en 1995, Ince prend le chemin de l’Inter Milan où il va devenir « Robocop » , « Terminator » ou encore le « Lion » . En Italie, Ince se lâche dans la presse, sûr de sa force. « Mon modèle ? Paul Ince… Même lorsqu’il joue mal. Lorsque l’on a 27 ans et que l’on est un professionnel accompli, on n’a pas de modèles. Les idoles, c’est bon à l’age de douze ans » balance-t-il dans les colonnes de la Gazzetta. Une belle revanche pour celui que Graham Taylor, sélectionneur anglais entre 1990 et 1993, avait traité de « poulet écervelé » . En manque d’école anglaise pour son fils Tom – professionnel à Nottingham Forest aujourd’hui -, Ince décide finalement de revenir au pays. À Liverpool. Ennemi héréditaire de United.

Chez les Reds, Ince retrouve une génération particulière que l’Angleterre affuble du surnom de « Spice Boys » . Ainsi, Jamie Redknapp, David James, Steve McManaman, Robbie Fowler et Jason McAteer se retrouvent sur le devant de la scène. La faute à un rencard supposé entre Fowler et Emma Bunton, l’une des Spice Girls. Dans cet univers axé sur le paraître, Ince est dans son élément. Cheveux courts légèrement frisottés, grands yeux marron, dents blanches, Paul le destructeur est un bel homme. Se faire apprécier à Liverpool ? Une banalité pour un homme qui n’est pas du genre à pleurer sur son sort. On parle d’un garçon qui a reçu des bananes, des insultes et des crachats durant toute sa carrière. Et comme Ince était avant tout un footballeur hors norme, il avait compris que pour être accepté par les fans de Liverpool, il devait marquer contre Manchester United. Ce fut chose faite le 5 mai 1999 quand le Lion égalise pour les Reds face à l’ennemi intime. On jouait la 89e minute. De quoi entrer dans la légende.

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Edoardo Bove : et maintenant ?
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