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On a lu Racaille football Club de Daniel Riolo

Par Nicolas Kssis-Martov
On a lu <i>Racaille football  Club</i> de Daniel Riolo

Ce livre a déjà fait du bruit. Il en fera encore beaucoup. Daniel Riolo, pilier de l'After Foot sur RMC Info, a choisi le titre parfait pour susciter le buzz. La lecture se termine avec le sentiment d'avoir parcouru un bon numéro de Marianne, une couv' racoleuse pour in fine égrainer un contenu mesuré et nuancé. Beaucoup d'anticonformisme pour rien ?

Pour commencer, il faudrait avertir les fachos 2.0, les fans de Michèle Tabarot, les aficionados de Marine ou les anars de droite qu’ils ne doivent surtout pas acheter ce bouquin. Ils vont être déçus. En effet, si déjà sur les réseaux sociaux, certains se régalent des polémiques à venir, prouvant qu’ils ont « toujours eu raison » , le résultat va forcément leur laisser un goût d’inachevé. Alors oui, une bonne moitié du bouquin assène des thématiques très zémouriennes : la menace « racaille » , le spectre du communautarisme et le péril islamique. Cela d’autant plus que contrairement au pays dans son ensemble, dans le foot, « ils » y seraient majoritaires.

Au final, les premiers chapitres traitent en effet peu de football. Il ne s’agit que de parler de « racisme anti-blanc » , de musulmans arrogants et dominateurs, et bien sûr de la fin de l’autorité et du « respect » . Daniel Riolo ne se mouille pas trop. Il distribue la parole, assaisonne un peu d’avis contradictoires, pour mettre en scène les évidences, généralement dans les citations des autres, qui selon lui « dérangent » . Des évidences sur une équipe de France gangrenée par la culture de cité, par cette génération qui prie Allah, idolâtre Scarface et ricane de La Marseillaise, tout en persécutant les gentils petits blancs, seuls authentiques victimes de cette triste histoire. En retour, les discriminations dont parlent et se plaignent parfois les premiers incriminés ne constituent qu’un « ressenti » . S’ils aident leur famille, ce n’est pas pour suppléer à des environnements où le taux de chômage monte à 40% chez les moins de 25 ans ou aux retraites maigrichonnes de leurs parents, il s’agit presque d’une logique « mafieuse » . En face, un pays traumatisé par tant d’ingratitude, des supporters désabusés et un Yohann Gourcuff en bolos expiatoire.

« T’es facho ou quoi ? »

Pour se prémunir de toute critique trop conformiste, le journaliste entonne à longueur de pages la complainte du « si on dit cela, on est tout de suite accusé de racisme » . Comme si les Bleus et le foot ne se voyaient, depuis 2006, pas reprocher scandales et polémiques et ne faisaient pas le bonheur des chroniqueurs et intellos néo-réacs trop heureux de détruire le mythe de 98. Les affaires de comportement, les escapades nocturnes, les rivalités internes dans le groupe, les déclarations à l’emporte-pièce, accompagnent à longueur de temps les prestations de la sélection nationale. Pourtant, à se poser par anticipation en crucifié du politiquement correct, on en arrive à d’étranges raccourcis. Évoquant l’affaire des quotas, en guise de commentaires à la réaction d’un André Mérelle, DTN et ancien directeur de Clairefontaine, qui trouvait que « ça pue le racisme tout cela » , le livre conclut : « Il faut dire que lui peut faire tomber la sentence. Sa femme est noire. Et pour aborder certains sujets, en France, il vaut mieux avoir des alibis en béton. » Que rajouter ?

En retour évidemment, tenter de contredire son point de vue revient donc à abandonner la France aux djihadistes en crampons. Et au-delà, à une espèce d’empire invisible qui englobe notamment Canal+, le rap, Djamel Debbouze, etc. Omar et Fred et leur SAV sont de la sorte accusés avec leur personnage « François le Français » d’entretenir un mépris mi-bobo mi-banlieusard envers les Dupont Lajoie, en oubliant au passage d’autres protagonistes de l’émission, comme le jeune de cité complètement débile ou les parodies de sorciers africains. On a parfois l’étrange sentiment de se retrouver devant ces nationalistes corses horrifiés par la vision proposée des « leurs » dans le film carcéral Un prophète, sans être dérangés pour un sou par celle des Maghrébins. Certaines caricatures vont de soi, sûrement.

Témoins à charge

Beaucoup de monde est sollicité, ou appelé à comparaître. De Vikash Dhorasoo à Olivier Cachin ou bien le sociologue François Dubet. Mais les derniers mots échoient naturellement à Christophe Guilluy, le géographe « de gauche » préféré de Patrick Buisson – et qui a l’idée de rapprocher de nouveau le foot des classes moyennes et de la ruralité – voire à Cardet auteur de L’effroyable imposture du rap (après son inoubliable Hooliblack), qui gravite dans l’ombre d’Alain Soral. Nous avons même droit à une citation de Marc-Edouard Nabe, pamphlétaire volontiers provoc’ et sujet à de nombreuses controverses ces dernières années, tant pour ses écrits que ses interventions télé. Attention frisson !

Le jugement de valeur est simple et après tout mérite évidemment débat : ces Bleus-là s’en foutent-ils de la France ? Ils manquent de reconnaissance envers leur pays. Les bons points sont ensuite distribués. Lilian Thuram en héros quand il reste sur la pelouse du stade de France pour alpaguer, à raison, les importuns qui l’ont envahie lors du match contre l’Algérie. Lilian Thuram en insupportable donneur de leçons quand il se permet de rappeler « son pays » à la mémoire de l’esclavage. Le rapport au patriotisme devient le nœud du problème. On va se mettre d’accord, les footeux, et en particulier les Bleus actuels, ne sont pas transis d’amour devant le drapeau. Ils n’ont pas de chance, chez eux, cela se voit. Personne n’exige rien au reste de la société, comme aux gentils petits soldats du Palais Brongniart. Quel genre de patriotisme et d’attachement aux valeurs de la République chez les bons cathos qui manifestent en masse contre le mariage pour tous ? La France laïque menacée ? Les principales fêtes catholiques sont fériées (c’est naturel, c’est l’histoire, qui le conteste ?), mais un joueur qui demande à manger hallal réveillerait le monstre du communautarisme ? Qui interroge sur leur attachement au pays natal un Cahuzac, un Guéant, un Lagardère ou même un Depardieu, cet Obélix qui déteste (en cela un vrai point commun avec Anelka) le totalitarisme fiscal de la France et devient bi-national pour cette noble motivation ? Benzema ne veut pas chanter La Marseillaise, c’est débile certes, mais c’est presque plus honnête que l’entonner pour ensuite placer son fric – ou celui de ses amis – en Suisse. Et puis quel genre de patriotisme amène à écrire, comme c’est le cas ici, qu’en raison de l’existence d’un ministère des Sports chez nous, inauguré sous le Front populaire par Léo Lagrange, « en matière de sport, elle (la France) se rapproche de Cuba et de la Corée du Nord » ?

Le bon exemple et le mauvais footballeur.

Le foot a un devoir d’exemplarité supérieur au politique, ce qu’il n’arrive pas à réaliser, car dans l’ensemble de la société les valeurs concernées ont dégringolé. Ajoutez que les membres de cette équipe de France plutôt moyenne ont trop bien compris qu’ils ne gagneraient rien avec (peut-être l’explication première pour laquelle ils se défoncent plus au Bayern ou Real qu’en bleu), et vous obtiendrez la recette du cocktail indigeste du moment.

Rideau ! Arrive la conclusion, la fin du livre. Et la chute est presque contradictoire, comme si on changeait d’ouvrage et d’auteur dès que débarque la place de l’argent et des agents (et du foot pro dans son ensemble). Daniel Riolo revient à ce qu’il connaît le mieux. Le foot français, ses faiblesses, son manque de professionnalisme, son fossé avec les autres championnats européens, les carences de la formation. Et d’un coup, le problème des joueurs de foot qui partent à l’étranger redevient un choix pro dans un environnement économique. Il s’apparente même davantage aux jeunes diplômés issus de l’immigration, qui, pour la peine, se sont généralement émancipés des « codes racailles » dans une perspective de réussite par les études, et qui se rendent à Londres vérifier si leur patronyme sur le CV y demeure autant un handicap que chez nous.

Le modèle NBA

La formation française et son incapacité à s’adapter à ce nouveau public, le retard de la culture foot en France, le tout comprimé par le culte du transfert, la faiblesse endémique des dirigeants du foot français, dessinent alors un nouveau paysage où la crise de confiance autour des Bleus ne se réduit plus au doigt de Nasri sur sa bouche. En quoi d’ailleurs le comportement du pensionnaire de City diffère-t-il d’un John Terry et de ses frasques ? En quoi l’égo insupportablement démesuré d’un Benzema est-il moins sympathique que celui d’Ibra ? Tout cela pour finir par donner raison à Hermann Ebongue de SOS Racisme en appelant à toutes les bonnes volontés pour redécouvrir « le vivre ensemble » avec un peu d’éducation. Et aussi pour vanter la NBA en modèle qui a viré la culture ghetto de ses joueurs noirs en les habillant en costard sur le banc de touche, afin de satisfaire un public majoritairement blanc (cela dit aux États-Unis, il est rare d’être choqué d’une équipe black black black si elle est composée des meilleurs et la réussite d’un pauvre n’est pas perçue comme un manque de bienséance envers l’ordre naturel de la hiérarchie sociale). Suffit donc d’un trois-pièces pour passer de « Racaille Football Club » à « Blazer Football Club » ?

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