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Mutu ce qui brille

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Mutu ce qui brille

Drogue, baston, clash avec ses dirigeants, dettes... Adrian Mutu a tout fait. Mais hier, enfin, il s'est rappelé qu'il était avant tout un talentueux joueur de foot. Un beau gâchis.

S’il y en a bien un qui devait l’avoir mauvaise, hier, c’est Racaj Berat. Ce jeune serveur de la discothèque Full Up de Florence adore, comme tout bon Florentin, la Fiorentina. Mais un peu moins depuis un soir d’octobre 2010, quand il s’était fait démonter par Adrian Mutu à la sortie de la boîte où il bosse. Suite à cette agression peu justifiable, le Roumain n’a pas arrangé sa cote de popularité, lui qui était déjà, à l’époque, suspendu pour dopage. Alors hier, quand Mutu a claqué un doublé face à Catane (3-0), Racaj Berat a dû se dire que ce gars-là ne méritait pas cette affection du stade Artemio Franchi. Ce qui n’est évidemment pas l’avis des tifosi de la Viola, heureux comme tout d’avoir retrouvé celui qui avait été le grand artisan de la qualification du club en Ligue des Champions en 2009. Après ses deux buts, Mutu n’a pas couru comme un fou, il n’a pas fait trois pirouettes et un salto. Il a souri, levé les bras au ciel et regardé les supporters de la Curva Fiesole, qui lui ont toujours tout pardonné. Sa façon à lui de leur dire merci. Car après toutes les conneries qu’il a faites, il sait lui-même, à l’instar de son serveur préféré, qu’il ne mérite pas tout cet amour.

Pourtant, lorsque Mutu débarque à Florence, à l’été 2006, il est déjà loin d’être tout blanc. En septembre 2004, alors qu’il vient d’effectuer une première saison énorme à Chelsea, il est contrôlé positif à la cocaïne. Abramovitch, qui ne rigole pas avec ces choses-là, le force à dégager dès le mois suivant, et la justice sportive lui inflige une suspension de sept mois. Le Roumain prend son mal en patience, réfléchit à ses vices, et revient en Italie. Magouilleur dans l’âme, il profite d’une faille du système pour être embauché par Livourne tout en jouant avec la Juventus. Il fait son retour lors de la dernière journée de championnat, et promet : « Tous les problèmes sont derrière moi. Je veux m’épanouir ici. Rendez-vous l’année prochaine » . Beau tableau. On a presque envie d’y croire. Pourtant, à la Juve, il passe inaperçu. Pas de bêtise, pas de drogue, mais pas non plus de génie sur le terrain. La saison se termine en tout anonymat, et Mutu signe à la Fiorentina.

C’est là, avec Cesare Prandelli sur le banc, qu’il va connaître sa meilleure saison. Aux côtés de Luca Toni, il redevient décisif et emmène la Fiorentina en coupe UEFA, malgré la pénalisation initiale de 15 points due à Calciopoli. A la fin de l’année, Mutu est élu par la Rai « Meilleur joueur du championnat ». Mais en plein vol, son passé finit par le rattraper. Pour ses histoires de coke et de contrat rompu, Chelsea obtient gain de cause au Tribunal : une jolie amende de 17 millions d’euros que le Roumain devra verser en petites coupures. Pire encore, son nom est retiré de certains jeux vidéo. Bah ouais. Andrei Murgu, dans Fifa, c’est bien lui. Comme une punition du destin, en plus de cette amende (la plus grande de l’histoire du football), Mutu est frappé lors de la saison suivante (2008-09) par une série de blessures. En tout, il ne réussit à jouer que 19 matches sur l’intégralité de la saison, mais plante tout de même 13 buts, dont trois, décisifs, face au Genoa (3-3) qui permettront à la Viola de se qualifier pour la Ligue des Champions. Bis repetita la saison suivante. Mutu se blesse au ménisque du genou, et ne revient que début 2010, où il claque but sur but. Sa forme olympique après quatre mois d’arrêt éveille quelques soupçons. Après un match de Coupe face à la Lazio, où il réalise un doublé (3-2), Mutu est contrôlé positif aux métabolites. Bim. Neuf mois de suspension. Ça ne t’avait pas suffi la première fois, alors on t’en remet une couche.

A une semaine de la fin de sa peine, il cogne le fameux serveur. Ses mea-culpa ne servent plus à rien. Tout le monde l’a bien compris, Mutu est un bad boy et ne peut rien y faire. Pourtant, Mihajlovic, le nouveau coach de la Fiorentina, lui accorde sa confiance. Mutu remercie, rechausse les crampons, mais n’est plus que l’ombre de lui-même. Dépité, déprimé, poursuivi par ses erreurs passées, il demande à partir au mercato de janvier 2011. Il trouve même un accord avec Cesena. Mais le président de la Viola, Andrea Della Valle, lui refuse. Démystifié, Mutu quitte un entraînement en claquant la porte. Son club le suspend jusqu’à nouvel ordre et lui interdit tout transfert. Mutu chiale dans son coin, en silence. Il faut dire que les années passent, qu’il vient de fêter ses 32 ans et qu’à ce rythme-là, sa carrière va lentement sombrer dans l’oubli. Alors il s’excuse. Encore. « Je demande pardon. Je veux rester ici et je souhaite tendre la main à la Fiorentina pour jouer à nouveau. Je ne suis pas là pour pleurer. Cette situation est déplaisante, j’ai fait une bêtise en abandonnant mon équipe, l’entraîneur et le club » affirme-t-il, sincère. Della Valle saisit la main tendue et lui pardonne. Une dernière fois. Le joueur est réintégré à l’effectif. Pendant quelques matches, il erre sur la pelouse. Comme tous ses coéquipiers, d’ailleurs. Puis, en un 6 mars ensoleillé, il fait la paix avec lui-même et inscrit deux buts salutaires pour une Fiorentina qui n’a jamais eu autant besoin de lui. L’histoire dira si ces deux buts sont le symbole d’un renouveau attendu depuis trop longtemps ou l’énième (dés)illusion d’un joueur brillant, qui s’est brûlé les ailes tout seul.

Eric Maggiori

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