Mondial -20 : de la prise de risque chez les ados

Il y a quelques jours, l’International Society for Adolescent Psychiatry and Psychology (ISAPP) tenait son congrès à Montréal. Le thème en était « la prise de risque à l’adolescence » . On y a parlé pratiques sexuelles extrêmes, consommation excessive de drogues et d’alcool, régimes draconiens, scarification, etc. Pour mieux étudier leurs sujets in vivo, les 700 participants ont déplacé leurs travaux le temps d’une journée au Stade olympique où était réuni un panel d’adolescents représentatif.
Le premier groupe examiné était composé de onze sujets tchèques tout habillés de blanc de façon à les distinguer des autres groupes mis en observation. Le constat fut unanime chez les congressistes : ce groupe a eu une conduite très responsable. Pour l’anthropologue français David Le Breton, cette attitude n’est pas rare et vise un but particulier : « Ces rites privés correspondent davantage à une institution de soi qu’à une destruction. Les issues sont presque toujours positives » . Les onze tchèques, prenant des risques mesurés, ont ainsi passé le cap difficile de l’adolescence avec succès.

Le second groupe étudié a pour sa part terriblement alarmé les scientifiques. Les onze Panaméens présents dans le stade transformé en laboratoire ont, en effet, semblé tétanisés. L’exercice qui leur était proposé consistait à entrer en possession d’une sphère de cuir et à s’en servir en faisant appel à leur imagination. A la grande stupéfaction des observateurs, aucun des sujets n’a pu trouver d’utilité à l’objet ni essayé de s’en servir pour entrer en communication avec autrui. Le plus souvent, ils s’en sont rapidement débarrassés. Ce qui a fait dire au psychiatre Patrice Huerre : « Le plus grand risque, c’est de ne pas en prendre » .

Le troisième groupe a également éveillé l’inquiétude des chercheurs. Il s’agit de onze jeunes gens venus de Corée du Sud. Totalement hors contrôle, ce groupe a littéralement joué avec sa vie quatre-vingt-dix minutes durant, multipliant les risques, comme autant d’appels au secours vers un public angoissé qui ne pouvait les aider mais manifestait sa peur par des cris de détresse. A la fin de la période d’observation, ce petit groupe s’est écroulé devant les yeux des témoins impuissants. « Aujourd’hui, toutes les extravagances sont justifiées par le ‘C’est mon droit’ » , a expliqué le pédopsychiatre Philippe Jeammet.

Le dernier groupe, venu de Pologne, a divisé cliniciens et praticiens du comportement en prenant peu de risques et en s’opposant aux exercices proposés, ce qui, paradoxalement, a mis son évolution en danger. « Les conduites d’opposition et de destruction sont le moyen d’adaptation d’un moi fragile » , a diagnostiqué Philippe Jeammet, avant de conclure : « Détruire, c’est la créativité du pauvre » . Fort heureusement pour lui, ce dernier groupe a survécu. Polonais et Tchèques vont rester en observation quelque temps encore au Canada.

Jean Damien LESAY, à Montréal.

Les Résultats :

Pologne – République de Corée : 1-1

Rep. Tchèque – Panama : 2-1