Manchester, le rouge est mis
C'est un peu le match de la dernière chance pour Liverpool. Samedi à Old Trafford, les Reds doivent vaincre Manchester United pour continuer à rêver du titre. De loin, comme ça, ça paraît cuit. Mais de près, beaucoup moins. Explications.
Sir Alex Ferguson ne boude pas son plaisir. L’entraîneur de Manchester United a beau aligner les titres comme d’autres les culottes de leurs conquêtes, cette saison c’est un peu différent. La lutte pour le titre en mano a mano avec Liverpool, c’est irremplaçable. « C’est un derby unique, l’affiche la plus passionnante d’Angleterre, quel que soit le classement des deux équipes. » La gourmandise du mage écossais est renforcée par le passé récent des deux clubs les plus titrés du royaume : depuis bientôt vingt ans, les Reds sont secs en championnat alors que sur la même double décade, les Red Devils ont compilé pas moins de dix couronnes de champions, se replaçant à une toute petite longueur du rival de la Mersey. Personne n’est dupe, cette saison Manchester va égaler les 18 sacres record du voisin. A moins que…
MU à l’italienne
Liverpool se pointe avec une idée très simple : gagner. Une fois qu’on a dit ça, le problème reste entier. Les Reds n’ont plus triomphé depuis 2004 à Old Trafford. Depuis ? Une boucherie mancunienne avec quatre succès, huit buts inscrits pour un seul encaissé il y a presque quatre ans. Voilà, Liverpool s’avance devant ce défi immense avec aucune autre option possible. En ce sens, la donnée pourrait jouer son rôle sur le plan tactique. Au coup d’envoi, c’est la formation de Rafael Benitez qui sera mis en demeure d’attaquer. Celle de Ferguson pourra attendre patiemment en attendant le contre. Il y a quelques saisons, ce genre de schémas était inenvisageable pour les Red Devils, et encore moins à domicile.
Mais depuis la saison dernière, Cristiano Ronaldo et les siens ont mûri, capables d’attendre, de guetter, de neutraliser, sans faire feu de tout bois. Résultat : non contents de faire la loi en Premier League, les Diables Rouges ont étendu leur territoire à l’Europe avant de conquérir le monde en fin d’année au Japon. Le dernier affrontement face à l’Inter Milan n’a pas dit autre chose. Verrouillage à l’aller (0-0), gestion de père de famille au retour (2-0). La leçon administrée en 2007 par l’autre club lombard, l’AC Milan (3-2, 0-3) a été retenue. On ne reprendra plus MU à se faire rouster sur le plan tactique. Mais si c’était ça la bonne nouvelle pour Liverpool ?
Liverpool aime le jeu continental
Le fond de commerce des Reds est essentiellement celui gribouillé au tableau noir par Rafael Benitez. Le genre d’essence qui mène loin sur les routes européennes. Le problème du Liverpool drivé par l’ancien sorcier de Valence était son incapacité à sortir les gros pneus lors des joutes franco de port de Premier League. « Mon équilibre se faisait aspirer avant d’être déséquilibrée par un long ballon » , confiait Rafa à So Foot en décembre dernier. De fait, la furia rouge et noire mancunienne était encore plus insoluble puisque servie par une technique haut de gamme. Manchester, le cauchemar absolu.
Mais, on l’a dit, MU a muté. Plus patient, plus tranquille, il s’est continentalisé. Et finalement il ressemble désormais à s’y méprendre aux écuries continentales les plus roublardes. Dans le genre de celles que Liverpool aime par-dessus tout. Celles que la machine rouge peut prendre le temps de jauger, de cadrer avant de les broyer. Le Real Madrid, mardi, et quelques autres depuis près de cinq ans en ont fait la dure expérience. D’ailleurs, en septembre dernier, à Anfield, Liverpool avait enfin mis Manchester sous l’éteignoir (2-1) après sept ans de malheurs at home (six défaites et un nul). Oui, Manchester est une bien meilleure équipe que par le passé. Mais parfois, le mieux est l’ennemi du bien.
Dave Appadoo
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