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Les leçons tactiques du derby

Par Maxime Brigand
Les leçons tactiques du derby

Alors que la rivalité continue d'avancer dans l'histoire et que les Verts se présentaient dimanche soir avec les fesses vissées sur le podium de Ligue 1, un vieux récit est remonté à la surface : Saint-Étienne a une nouvelle fois eu les armes pour y croire, mais Lyon a gagné à la fin.

La chute, puis l’atterrissage. Dans la soirée de dimanche, un homme à casquette s’est avancé dans un couloir de Geoffroy-Guichard, et deux minutes ont suffi pour sortir un diagnostic : ce mec a besoin de repos. Usé par quatre-vingt-dix minutes passées dans un mixeur, Jean-Louis Gasset souffle sa peine : « Je savais que ce métier était cruel. Aujourd’hui, c’est un petit KO. C’est un match qui méritait de se finir à égalité. On a tout donné et on a fait le match que l’on voulait faire. Je sais que ce derby était important pour les supporters, j’espère qu’ils ont vu qu’on a tout donné. On se relève de tout. » De tout, même d’un derby perdu alors que, pour la première fois depuis six ans, l’AS Saint-Étienne avait les fesses posées sur le podium de Ligue 1. De tout, même d’un scénario qui se répète : les vieux fantômes se sont une nouvelle fois invités ce week-end dans le Forez, et les Verts sont de nouveau tombés sur le dernier temps d’une valse entre ennemis. Dans les arrêts de jeu, encore. Cette fois, pas de Sidney Govou, pas de Jimmy Briand, mais un Moussa Dembélé venu jouer avec les fusibles et éteindre la lumière d’une rencontre agitée par une quarantaine de frappes, dont seize cadrées, un record pour un derby disputé au XXIe siècle. Et si tout ça répondait à une forme de logique ? Et si, parfois, le résultat ne dépendait que de l’adversaire ?

Les stéréotypes lyonnais et le cas Mendy

Cette fois, impossible de passer à côté du décor : si la rivalité connaît une période d’accalmie, sans petite phrase, sans supporter de l’un autorisé à venir s’installer dans la chambre de l’autre, ce derby, bien qu’il se soustraie par nature à n’importe quel classement, ne peut débuter sans un regard vers le tableau. L’ASSE est, avant d’allumer les feux, invaincue à domicile, présente l’une des meilleures attaques de Ligue 1 dans son stade et vient de prouver face à l’OM qu’elle sait aussi sortir victorieuse d’un combat qu’elle ne mérite pas forcément de gagner. Et l’OL ? « Dans les grands matchs, ils sont là » , soufflait Gasset durant l’avant-match médiatique. Mais surtout, ils s’adaptent, ce que fait Bruno Génésio en habillant pour l’occasion son onze avec une défense à quatre têtes. L’objectif du coach lyonnais est assumé : étirer au maximum un bloc vert déplié en 3-4-3 et dont l’idée de base est de permettre aux trois attaquants (ici Hamouma, Khazri et Cabella) de se retrouver « davantage dans l’axe » . À une précision près : la mise en place d’un tel système a été rendue possible, car Gasset possède dans son effectif ce qu’il appelle des joueurs « multiprises » , mais son impact offensif est dépendant de transitions parfaites. Le hic du soir.

Un quart d’heure de jeu suffit à isoler deux casse-tête. Le premier : en refusant la relance courte et en favorisant les longs dégagements de Ruffier vers ses offensifs (à eux trois, Cabella, Hamouma et Khazri n’ont remporté qu’un seul des onze duels aériens offensifs qu’ils ont eu à disputer), les Verts abandonnent trop rapidement le ballon et laissent à l’OL les clés du débat. Le second : le schéma vert doit rapidement régler la gestion du cas Ferland Mendy (le joueur lyonnais qui a touché le plus de ballons de la première période), libre d’œuvrer offensivement avant que Kévin Monnet-Paquet ne grimpe d’un cran pour le saisir et laisse à Loïc Perrin la responsabilité du dossier Cornet. Comme souvent, les Lyonnais se retrouvent avec un marteau de président entre les mains, mais le 4-4-2 de Génésio est installé face à ses stéréotypes (difficulté à imposer un rythme dans la durée, incapacité à utiliser correctement les ailes avec Cornet et Traoré, quasi-inutilité de Memphis Depay lors des phases de pressing).

Alors, l’OL court et fait courir, les Verts, eux, maîtrisent les vagues et souffrent de leur manque de créativité dans les sorties de balle, mais aussi des nombreuses erreurs d’Ole Selnæs. Lors des vingt premières minutes, Lyon sort ses griffes et imprime le scénario : 67% de possession de balle, 118 passes – dont une trentaine dans le dernier tiers adverse et neuf tentées dans la surface verte –, mais une incapacité à dérégler l’organisation stéphanoise, à l’exception d’un contre enclenché par une relance de Mendy et bouclé par un lob malin de Depay sauvé par Ruffier (12e). Comment l’expliquer ? L’OL n’arrive pas à péter de lui-même la relance adverse – c’est les Verts qui rendent le ballon aux Lyonnais et systématiquement alors qu’ils sont en place, donc moins vulnérables – et a les ailes coupées par une approche ultra-lisible où les hommes de Génésio viennent en permanence plonger dans un cœur de jeu fermé facilement par la bande à Gasset. Une bande qui, lorsqu’elle assure à la relance, arrive à profiter de la lourdeur de Marcelo et des espaces immenses laissés par les latéraux : d’où le premier but inscrit de la tête par Hamouma, où Tete et Mendy sont fautifs. Chaque erreur technique lyonnaise est sanctionnée, Khazri est partout – deux duels gagnés, quatre ballons récupérés, deux occasions créées – et est bien aidé par un Hamouma croquant dans la légèreté des axiaux lyonnais (notamment Denayer, ce qui a amené à une grosse occasion pour Gabriel Silva).

L’affinage et la relance verte

Au bord de la rupture à la pause, inexpressif offensivement (deux tirs cadrés, six passes réussies sur seize tentées dans la surface adverse, un centre réussi sur huit), l’OL patauge et confirme son incapacité à trouver une assise défensive fiable. Alors, à l’heure de jeu et après un nouveau quart d’heure sans tempo, Bruno Génésio fait glisser ses pions : Moussa Dembélé prend la place de Bertrand Traoré, Memphis Depay se décale côté gauche, Nabil Fekir attrape pour de bon les platines et une forme de verticalité revient progressivement alors que la paire Ndombele-Aouar sort de sa couette. Ainsi, elle s’exprime enfin, casse des lignes (douze passes réussies à eux deux dans le dernier tiers adverse lors de la dernière demi-heure, cinq ballons récupérés, quatre fautes subies), alors que la rencontre se désarticule, laissant les deux gardiens péter les ampoules à plusieurs reprises. Dans cette capsule, la relance verte s’écroule et celle de Neven Subotić crève les cœurs (52,2% de passes réussies, plus faible ratio d’un joueur de champ titulaire dimanche soir).

L’entrée de Moussa Dembélé permet de tordre et faire reculer un bloc stéphanois où Perrin a longtemps été parfait avant de concéder un penalty et de perdre un duel décisif avec l’attaquant lyonnais dans les arrêts de jeu. Un but encaissé comme un reflet – l’ASSE a été punie sur une sortie de balle ratée (de Kolodziejczak) et pour avoir peut-être trop voulu en mettre dans les dernières foulées – et qui transforme d’un coup Bruno Génésio en vainqueur, la tête de Dembélé arrivant au bout d’un centre de Dubois (son troisième réussi en dix minutes), deux joueurs lancés en cours de partie par le coach lyonnais. Dimanche soir, l’OL a sorti un brouillon gagnant, n’a pas vraiment fait un grand match, a gagné lorsqu’il a dû le faire, mais en ressort avec une question : peut-il vraiment se priver d’un buteur ? C’est l’enjeu des prochaines conquêtes d’une équipe lyonnaise gruyère, bourrée de trous défensifs, sans réelle rigueur, mais capable de fondre et couler sur n’importe quel adversaire, à n’importe quel moment. Une histoire de températures et d’affinage.

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