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La grande chute

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La grande chute

L'an prochain, les deuxièmes divisions vont voir débarquer quelques gros noms du football européen. De la Sampdoria à Monaco, en passant par le Deportivo La Corogne, comment des équipes taillées pour l'Europe ont-elles pu tomber aussi bas ?

Ils étaient tous partis avec de belles ambitions. On parlait d’Europe. On parlait de Ligue des Champions. Chez les supporters les plus rêveurs, on parlait même de titre. A l’inverse, même le plus pessimiste de tous les fans n’aurait pas prédit une fin si tragique. Pas de juste milieu. La loi de la relégation est la plus cruelle. Ils s’appellent Sampdoria, Deportivo La Corogne, AS Monaco, Lens, Francfort ou West Ham. Des noms ronflants, des passés glorieux. Et pourtant, toutes ces grandes équipes européennes doivent se résigner à la triste réalité, celle qui brise les rêves : ils joueront l’an prochain en deuxième division. Plus de déplacements au Camp Nou ou à San Siro. Non, désormais, le week-end, cela se passera devant quelques milliers de spectateurs, à Istres, Grossetto ou Doncaster. La preuve qu’être étiqueté « grand club » ne confère pas l’immunité.

Surprenante statistique. Des quatorze clubs relégués dans les cinq championnats européens majeurs (France incluse), seuls six affichent une vitrine de trophées vide. Cinq d’entre eux (Sampdoria, La Corogne, Francfort, Monaco, Lens) vantent même un titre de champion national. Champions déchus. Les hiérarchies n’existent plus. Il ne suffit plus de débarquer avec de beaux noms et de beaux discours pour assurer son avenir. Il faut désormais autre chose, et la saison qui vient de s’achever n’en est que la vigoureuse confirmation. Analyse en trois points.

Des choix de mercato ratés

L’exemple le plus criant est certainement celui de la Sampdoria. L’an passé, les Génois ont réussi un parcours splendide, se classant quatrième et se qualifiant pour le tour préliminaire de la Ligue des Champions. Mais la saison 2010-11 débute mal, avec l’élimination face au Werder Brême. En championnat, les résultats ne sont pas brillantissimes, mais l’équipe réussit tout de même à se classer 8ème à la trêve. Au mercato, le président Garrone laisse filer Cassano au Milan AC et Pazzini à l’Inter. Les deux phares s’éteignent, et la Sampdoria se met à avancer avec un bandeau sur les yeux. Les nouveaux arrivants (Maccarone, Biabiany, Macheda) sont très loin d’être à la hauteur de leur prédécesseurs. Aucune cohésion dans l’équipe, aucune unité dans la souffrance : la chute est violente et personne ne réagit. « C’est vrai, j’ai peut-être commis des erreurs » admet à demi-mots le président génois. Pour une fois, faute avouée, impardonnable.

Même son de cloche à Monaco. Il y a sept ans, l’ASM caressait la Ligue des Champions en échouant en finale face à Porto. Aujourd’hui, au terme d’une saison dégueulasse et truffée d’erreurs sociétaires, le club de la Principauté est relégué. Comme si chaque année écoulée depuis les grands succès était équivalente à une décennie de déchéance. « On est l’un des piliers des clubs français. Il ne faut pas l’oublier. Ce soir, c’est une grosse perte pour le football français » affirme, à chaud, le coach monégasque Laurent Banide. D’accord. Mais être un pilier n’est plus un argument. Il faut, avant tout, savoir se renouveler, évoluer dans une certaine continuité, reconstruire sans jamais tout démolir. Sur ce point, Monaco a tout faux. Des 30 joueurs de l’effectif actuel, la moitié est arrivée il y a moins d’un an. Les autres ne sont pas beaucoup plus anciens. 2009, voire 2008. Un chamboulement total trop brusque, peu réfléchi, en rien stratégique. Impossible, dans un tel cas de figure, de créer une équipe homogène, où tout le monde raisonne selon une seule et même philosophie. L’ASM aura désormais un an pour réfléchir à ses erreurs. Minimum.

Pas l’habitude de lutter pour survivre

C’est un fait : dans chaque pays, beaucoup de formations étaient plus faibles que ces illustres relégués. A une différence près. Ces équipes-là, qu’elles se nomment Cesena, Levante, Fribourg, Brest ou West Bromwich, en veulent. A titre d’exemple, les vaillants joueurs de Cesena (plus petit budget de Serie A) ont réussi à enchaîner quatre victoires lors des six dernières journées, alors que tout le monde les avait déjà inscrits à la prochaine Serie B. En porte-étendard, ce match nul 2-2 arraché à Palerme, alors que l’équipe était menée 2-0 à la 92ème minute. Discours similaire du côté de Wigan. Relégable depuis le mois de novembre, l’équipe de Charles N’Zogbia s’est sorti les tripes lors du sprint final, avec des victoires magiques (à la 94ème face à West Ham, à dix minutes du terme face à Stoke) qui ont enterrées les trop sereins West Ham et Birmingham (un point chacun lors des six dernières journées).

Ces exploits ont été obtenus grâce à d’indéniables vertus : courage, abnégation et hargne. Des qualités que la Sampdoria ou encore l’Eintracht Francfort ont laissées au vestiaire tout au long d’une désastreuse deuxième partie de saison. Autre adversaire : la peur. Celle de jouer le bas de tableau. Une peur qui tétanise ceux qui ne sont pas habitués à être au bord du précipice, et qui fait perdre des matches qui auraient été remportés dans une autre situation. Apprendre à jouer avec le couteau sous la gorge est un métier. Que cela puisse servir de leçon à ceux qui pensent ne jamais être concernés.

Des gestions financières catastrophiques

Le constat est tout aussi accablant pour le Deportivo La Corogne. En pleine disgrâce depuis le titre de champion d’Espagne décroché en 2000, le Depor sombre aujourd’hui en deuxième division. Bien tristement. Les Galiciens ont, contrairement aux relégués déjà cités, quelques circonstances atténuantes. Endetté jusqu’au cou, dirigé par un gras despote qui ne comprend pas grand-chose au football (Augusto Cesar Lendoiro), le club qui avait fait rêver les foules avec son attaque Makaay-Tristan fait désormais rêver ses détracteurs. Déjà en 2008, La Corogne était passé tout prêt de la descente après un début de saison catastrophique, mais avait su se ressaisir en deuxième partie d’année. Visiblement, personne n’a tiré profit des erreurs commises. Lendoiro voulait reconstruire un SuperDepor, il va devoir revoir ses projets à la baisse. Et le discours de la gestion économique pourrait s’étendre à d’autres clubs. Au RC Lens, par exemple, qui, après la relégation de 2008, n’a jamais réussi à se remettre dans le droit chemin sur le plan financier. « Il y a eu une vague de joueurs qui sont arrivés, et qui ont signé des contrats sur trois ou quatre ans. Ce sont eux qui nous ont fait descendre cette année. D’ailleurs, certains d’entre eux ne jouent même plus et le pire, c’est qu’ils ne veulent pas partir. Ils sont là, pépères, ils prennent leur argent et s’en foutent du club. Ça le pourrit à l’intérieur » confirme Arnaud Goubelle, responsable des Red Tigers, rendu célèbre cette saison pour s’être copieusement fait insulter par Vedran Runje.

Pourtant, Gervais Martel assure y avoir mis toute la bonne volonté du monde. « J’ai été obligé de vendre Boukari, c’était un impératif de financement, donc je regrette pas (…) Quand vous avez de l’argent pour aller manger au restaurant mais que vous n’avez pas les moyens de manger fromage et dessert, vous prenez soit fromage, soit dessert » explique le président dans une interview à So Foot au mois de mai. En Hollande, Willem II, finaliste de la Coupe des Pays-Bas il y a quelques années, n’a même pas les moyens d’aller au restau. Depuis deux ans, le club n’a plus un rond, les joueurs sont payés au lance-pierre, et beaucoup ont quitté le navire pour éviter de se noyer. Résultat, 15 points obtenus en une saison. Personne n’a fait pire en Europe. Même pas Arles-Avignon.

Eric Maggiori

Propos d’Arnaud Goubelle recueillis par Swann Borsellino

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