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Football féminin : un vent de révolte en sélections

par Léna Bernard et Anna Carreau
Football féminin : un vent de révolte en sélections

La crise que traverse actuellement la sélection féminine tricolore est malheureusement loin d’être une première dans un foot féminin habitué à se battre pour obtenir la moindre avancée. Les mises en retrait de Renard, Katoto, Diani, Morroni et Mbock ce week-end s’inscrivent dans un contexte de crise plus global. Explications.

« J’ai l’impression que pour nous femmes et sportives de haut niveau, c’est compliqué. On doit toujours, toujours se battre, quitte à arriver à des situations individuelles compliquées », se lamentait dimanche Wendie Renard dans une interview accordée à RMC Sport. Deux jours plus tôt, la capitaine des Bleues, suivie par d’autres coéquipières, annonçait sa mise en retrait de la sélection, dénonçant des conditions sportives ne correspondant pas aux exigences du très haut niveau. Une demande particulièrement courante dans le football féminin ces dernières semaines, dans un monde où les top joueuses européennes voient la discipline progresser en club quand les sélections restent à quai, dans des fédérations où l’on se satisfait d’avoir une équipe féminine sans lui donner des moyens adéquats pour performer. « Des problèmes apparaissent dans les pays, mais je pense que ce n’est pas l’affaire d’un pays en particulier, c’est quelque chose de global, constatait Alexia Putellas après avoir reçu son trophée de joueuse de l’année par la FIFA. On doit tous se mettre ensemble (institutions, joueurs…) s’écouter et voir ce qui est le mieux. » La dernière trêve internationale a montré que beaucoup de fédérations, dont la France, n’étaient pas à la hauteur de ce que doit être le football féminin et que si les joueuses ne se rebellent pas, personne ne changera jamais rien pour elles.

Le Canada, une grève et des menaces

Le Canada fait également face à une fronde des joueuses de la sélection contre leur fédération. Le 10 février dernier, les joueuses canadiennes annonçaient entrer en grève face au manque de considération de Canada Soccer, la Fédération de football canadienne. Les Canucks reprochent à l’instance, présidée par Nick Bontis, l’annonce de coupures budgétaires remettant en cause une préparation optimale pour la Coupe du monde à venir à l’été 2023. Les Canadiennes avaient été obligées d’interrompre leur grève et de reprendre le chemin de l’entraînement deux jours plus tard face aux menaces de sanctions financières lancées par Canada Soccer. Les joueuses n’ont pour autant pas renoncé à faire entendre leur voix, notamment lors de la SheBelieves Cup. Maillots retournés à l’entraînement, union sacrée avec les Américaines lors de leur rencontre, chaque joueuse était munie d’un ruban violet pour marquer la lutte contre les inégalités après s’être réunies au centre du terrain avant le coup d’envoi.

Plusieurs cadres de la sélection se sont exprimées sur la situation, notamment la capitaine Christine Sinclair, menaçant de ne pas se rendre au rassemblement prévu au mois d’avril si les points de tension avec la Fédération n’étaient pas résolus d’ici là. Les joueuses canadiennes profitent d’un large soutien dans le football mondial et en particulier de la part de leurs homologues masculins. Eux aussi étaient entrés en grève en juin dernier et avaient réclamé dans leurs doléances l’obtention de l’égalité salariale entre les sélections masculine et féminine du Canada. Aucun accord n’a pour l’instant été trouvé entre Canada Soccer et les différentes parties. Le très décrié président de la Fédération Nick Bontis, qui a présenté sa démission dans la soirée du 27 février, a tenté de sauver son image avec une déclaration optimiste au moment de faire ses cartons : « Canada Soccer et nos programmes d’équipes nationales sont en voie de signer une convention collective historique. » Pour mener à bien cette mission, Charmaine Crooks vient de reprendre le poste vacant à la présidence, et Kelly Brown occupera désormais le poste de vice-présidente par intérim. Un vent nouveau souffle sur le Canada.

L’Amérique du Sud entre développement et négligences

De l’autre côté de l’Atlantique aussi les voix se lèvent sur un continent qui n’est qu’à ses premières heures du football féminin, mais où les joueuses sont déjà obligées de menacer leurs fédérations pour obtenir le minimum : un coach. La trêve internationale vient de se terminer pour à peu près toutes les sélections, sauf celle du Pérou, qui n’a aujourd’hui ni entraîneur, ni rassemblement, ni matchs amicaux. Sur Twitter, les internationales, qui évoluent principalement aux États-Unis, prennent la parole pour demander a minima qu’on se préoccupe de leur sort. « Notre fédération n’a aucun investissement sérieux dans le football féminin, mais ils attendent de nous que nous soyons performantes ? C’est inacceptable », écrit Alexandra Kimball. Dans l’attente d’avoir ne serait-ce qu’un semblant d’existence tant l’équipe féminine semble être le cadet des soucis de la FPF, celles qui évoluent dans le championnat local poursuivent leur présaison qui dure depuis trois mois. En cause ? La fédération n’a toujours pas donné de calendrier ni de date de reprise.

Le Chili, qui jusqu’ici avait un peu plus d’avance que son voisin péruvien, a de son côté fait quelques pas en arrière durant cette trêve, échouant à se qualifier au prochain Mondial lors d’un match de barrages contre Haïti. En 2019, les Chiliennes vivaient pourtant la première Coupe du monde de leur histoire et semblaient être en pleine progression, avec comme capitaine « la meilleure gardienne du monde », Christiane Endler. « Nous avons fait tout ce que nous pouvions avec les moyens qu’on nous a donnés, témoigne la portière de l’OL après l’élimination. « Le niveau international progresse chaque jour un peu plus, et nous, nous restons bloquées. Et s’ils ne changent pas les choses, ne mettent pas plus de moyens, l’écart va encore se creuser. Ça fait un moment qu’on le dit, et personne ne nous écoute. » La joueuse la plus capée de l’histoire de sa sélection envisage même de « faire une Wendie Renard » si son coup de gueule n’est pas entendu.

L’Espagne et « las 15 » rendues inaudibles

En Espagne, les propos de Wendie Renard trouvent un écho tout particulier. Le 22 septembre dernier, 15 joueuses de la Roja féminine prenaient la même décision que la Martiniquaise. Leurs revendications ? Les mêmes que celles formulées par les quelques stars françaises : un niveau d’exigence décent, du travail, un changement de coach. Et si la péninsule compte bien un championnat professionnel, contrairement à la France, la sélection semble encore être à la traîne, ce qui pousse ces joueuses majoritairement issues du FC Barcelone et de la Real Sociedad à mener cette grève, faute d’être entendues. « Il y a beaucoup de choses établies depuis longtemps que l’on doit casser, argumentait Alexia Putellas, double Ballon d’or et frondeuse malgré sa rupture des ligaments croisés, dans son documentaire sur Prime Video. Celles qui ont commencé ont dû se battre pour qu’on les laisse jouer, nous aujourd’hui on doit se battre pour avoir de meilleures conditions, afin d’avoir des résultats et de gagner. »

Un contexte qui fait dire à la milieu de terrain du Barça qu’il manque encore « certains points pour être considérées comme joueuses de foot 100% professionnelles ». Sauf que depuis six mois, aucune des 15 joueuses n’a été entendue par la fédération, qui s’entête à les dénoncer comme des capricieuses refusant de porter la tunique nationale. Le sélectionneur Jorge Vilda, qui n’aime pas spécialement la remise en question, appelle donc à chaque rassemblement de petites nouvelles, venant remplacer les grandes absentes. Le tout soutenu par le président de la fédé et malgré les récents mauvais résultats de la Roja lors des matchs de préparation au Mondial. La gestion du cas Diacre devrait donc être scrutée outre-Pyrénées et pourrait servir de ligne de défense pour ou contre l’homme qui se tient à la tête de la sélection espagnole depuis 2015 sans jamais avoir remporté le moindre trophée. 

Les États-Unis et Ada Hegerberg, les pionnières

Deux modes d’action radicalement différents et pourtant réunis sous la même bannière : une meilleure considération du football féminin. Les États-Unis ont obtenu gain de cause par la force du collectif, tandis qu’Ada Hegerberg à elle seule a fait plier la fédération norvégienne. Le combat des Américaines avait débuté le 8 mars 2019. Quelques mois à peine avant la Coupe du monde qui s’est déroulée en France, 28 joueuses ont déposé un recours collectif contre la Fédération américaine de football pour « discrimination sexiste généralisée ». Aux États-Unis peut-être plus qu’ailleurs, l’écart des montants versés aux sélections était insupportable, surtout quand on souligne que les Américaines ont remporté plusieurs titres majeurs dont quatre Coupes du monde (1991, 1999, 2015 et 2019) et quatre Olympiades (1996, 2004, 2008, 2012), quand la meilleure performance de la sélection masculine reste une demi-finale en Coupe du monde obtenue en 1930, autrement dit il y a une éternité. Les hommes gagnaient pourtant bien plus que leurs homologues féminines jusqu’à ce 18 mai 2022 historique. L’accord prévoit l’égalité salariale entre footballeurs et footballeuses en sélection, ainsi qu’une distribution égalitaire des primes versées par la FIFA lorsque les équipes sont qualifiées en Coupe du monde. Une première mondiale.

Concernant Ada Hegerberg, la relation entre la Ballon d’or 2018 et la sélection norvégienne est loin d’être un long fleuve tranquille. Alors âgée de 22 ans, l’attaquante avait décidé de claquer la porte de la sélection norvégienne peu après l’Euro 2017 afin de dénoncer la différence de traitement entre joueurs et joueuses. La Fédération norvégienne avait tenté de faire un pas dans son sens en doublant la rémunération de la sélection féminine et arriver ainsi à l’égalité salariale entre les sélections féminine et masculine. La Norvège était devenue le premier pays à fournir un tel accord dans le monde du football, une proposition qui n’avait pourtant pas suffi à faire sauter la joueuse au plafond : « Même s’il y a des changements, vous devez pousser ces changements tous les jours, ne jamais cesser d’exiger l’égalité et le développement. » La Coupe du monde 2019 s’était alors déroulée sans elle. Depuis, de l’eau a coulé sous les ponts. Près de cinq ans après sa dernière cape, Ada Hegerberg, 27 ans, a révisé sa position et s’est de nouveau mise à la disposition de la sélection nationale lors du dernier rassemblement avant l’Euro 2022, sans grand succès, puisque les Drillos avaient pris la porte dès la phase de poules. Le rendez-vous de la Coupe du monde 2023 signera comme une tentative de rédemption sur la scène internationale pour les partenaires de l’attaquante lyonnaise. Une Coupe du monde durant laquelle s’opposeront des équipes qui n’auront pas le même maillot, mais les mêmes combats.

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par Léna Bernard et Anna Carreau

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