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- Les 100 meilleurs joueurs « So Foot »
- Michel Platini
S’il ne devait en rester que 100… (4e)
So Foot a classé ses 100 meilleurs joueurs de l'histoire. Mais selon ses propres critères. Soit un peu d'objectivité, pas mal de mauvaise foi, beaucoup d'amour et même une dose de grâce. Au fur et à mesure du mois seront ainsi dévoilés, et de manière décroissante bien sûr, les heureux élus. Voici donc les meilleurs joueurs So Foot, avec aujourd'hui le joueur classé 4e.
#4 - Michel Platini
À l’époque, on disait toujours « Platini » . On ne l’appelait jamais « Platoche » , un surnom de journalistes qui n’a jamais vraiment pris dans le grand public (à la différence du très populaire « Zizou » , par exemple). On ne l’appelait pas non plus « Michel » . Sauf Thierry Roland, un grand pote à lui. Il l’a même apostrophé comme ça, en direct, à la télé, un soir de novembre 81, renforcé de Jean-Michel Larqué : « Allez, Michel ! Oui, Michel ! Ouuuuui, Miiiiiiichel ! » Et voilà… Encore un but sur coup franc contre les Pays-Bas qui nous sauve la mise et qui nous envoie direct au Mundial 82 espagnol. Platini va marquer… C’est ça qu’il y avait de vraiment sensationnel chez Platini en Bleu : il a grandi en faisant grandir l’équipe de France. Il l’a surtout aussi fait revenir de l’enfer. Saint-Michel, aidé aussi de Saint-Étienne, faut bien insister ! Début des années 70, c’était la cata du foot français : pas de Coupes du monde 70 et 74, pas d’Euros 68, 72, 76. La zone absolue. À l’été 76, on entend un peu parler de Michel Platini, un p’tit gars de Nancy (la brousse, quoi), paraît-il très fort, qui cartonne avec les Espoirs…
« Allez, Michel ! Vas-y, Michel ! Ouuuuuiiii, Michel ! »
En fait, sa réputation, c’est d’abord plus par son nom qui se retient fastoche, Platini, comme le platine (un métal rare, hein !), que sur ses qualités réelles, qu’on n’a pas trop vues. Vient ce soir de 76, France-Tchécoslovaquie dans un Parc des Princes vide. Coup franc pour les Bleus, menés 2-0. Michel dit à Michel (Henri) : « Passe-la moi, je la mets au fond. » L’aîné, un peu interloqué, s’exécute. Pffff ! Dans le plafond ! But ! « Platini a marqué. » La France fera un nul plein d’espoir (2-2). Ce n’est pas une légende qui est marche, plutôt le bonheur absolu. Jusqu’à la fin de sa carrière internationale (1986), Michel nous accompagnera dans la vie, un grand frère sympatoche qui nous sauvera toujours la mise : Platini va marquer… La France réémerge dans la difficulté, avec des matchs jamais évidents, vu qu’on repart de très bas. Mais on n’a moins peur, parce que Platini va marquer ! On le sait, on en est sûr. Au moindre coup franc à 20-25 mètres pour les Bleus, on s’apprête déjà à sauter de son siège (et qu’est-ce qu’on a sauté !). Les buts de Platini, les coups francs de Platini… C’est fou, c’est passionnant, c’est merveilleux !
En 76-77, après la Tchéco, Michel confirme en plantant sur coup franc contre le Danemark, la Bulgarie (en qualif de Mundial, à 30 mètres, 2-2), contre la Suisse et surtout contre l’Italie. Le flip total à Naples : on est menés 2-0 après 20 minutes, on va retourner au néant, niveau Luxembourg ou Andorre. Mais Platini va marquer… Bathenay réduit la marque, puis grand numéro de légende qui va faire découvrir à l’Italie un de ses fils lointains, émigré en Lorraine. Premier coup franc de Platoche. Parfait, Zoff battu. Refusé ! Pourquoi ? On ne sait pas… Plus tard, Platoche marquera encore sur coup franc. Là, c’est validé : 2-2 chez les Ritals ! On n’en revient pas. En 76-77, Michel nous qualifie surtout pour le Mundial argentin 1978, en plantant contre l’Éire. Contre la Bulgarie en novembre 77, on flippe. Au Parc, sous la pluie, notre petit 1-0 ne nous met pas à l’abri. Mais on le sait bien : Platini va marquer… Une mine de 25 mètres de Michel : 2-0, on est en Argentine ! La France gagne 3-1 et revient sur l’échiquier mondial. Super. Michel nous qualifie encore pour le Mundial espagnol 82. Toujours le même scénario : avant-dernier match de qualif, novembre, frisquet, le Parc des Princes, Thierry et Jean-Mimi, on flippe, c’est la Hollande en face, 0-0 à la mi-temps. Mais Platini va marquer… Coup franc de « Allez, Michel ! Vas-y, Michel ! Ouuuuuiiii, Michel ! » Putain, que c’est beau… En Coupe du monde 82, on est à la rue contre la RFA, 0-1 de Littbarski. On flippe. Mais Platini va marquer… Un péno égalisateur platinien plein de sang froid et on y croit à nouveau.
Capocannoniere de 1983 à 1985
Michel, c’était l’éclaircie permanente dans la tempête des années de reconquête… Il va devenir le détonateur artificier des grandes aventures. Platini va (encore) marquer… Euro 84, les Bleus sont favoris et Michel sera bien à l’heure au rendez-vous. Danemark (un but), Belgique (trois buts : droit, gauche, tête), Yougoslavie (3 buts : droit, gauche, tête). Portugal en demie : Vélodrome, prolongation, on flippe à 2-2 vu que les Bleus ont toujours couru après le score (1-2 à la 98e, Domergue égalise 2-2 à la 115e). On flippe, mais « on sait » : PLATINI VA MARQUER. Et Michel plante sur un superbe service de Jeannot Tigana à l’ultime minute (119e). Platini, ou comment apprendre à regarder les étoiles… En finale, on flippe : le Parc, Espagne, grosse équipe, 0-0 à la mi-temps. Platini va marquer… 56e, un coup franc pas terrible de Michel, mais pire encore pour Arconada, et but : 1-0 ! Pfffff… On est bons,là. On est mieux, ça va aller, on respire. Bellone plante à nouveau (2-0) : on est champions et Michel est numéro 1 mondial. Une stat de ouf : 9 buts en 5 matchs. Du Fontaine 58 ! Faut dire qu’entre-temps, les supporters de la Juve se sont calés sur nous : « Michel va marquer ! » Michel sera capocannoniere en 83, 84 et 85. Cette année 84, Michel recevra son deuxième Ballon d’or, avant le troisième d’affilée (83, 84, 85). Cette année-là, Michel était le meilleur au monde. Imaginez-vous supporter d’un joueur et d’une équipe, Platini et les Bleus en l’occurrence. Vous attendez chaque match de la France de Platini dans la fièvre en vous disant « Platini va marquer » . Et Platini marque… Y a quoi de plus beau dans la vie ?
Et le Mundial 86 au Mexique ? Novembre 85, temps frileux, Parc des Princes, c’est tendu pour la qualif, en face c’est la grosse Yougoslavie, on est en fin d’éliminatoires, on flippe. Mais Platini va marquer… Dès la 3e, un coup franc de Michel au fond (1-0) ! Rebelote à la 71e : demi-volée croisée, 2-0, on est au Mexique ! Au Mundial, Michel est affaibli par une blessure à la cheville, il sent aussi venir la fin… Il plante quand même contre l’Italie, avant le gros morceau en quarts, le Brésil. Contre la Seleção, on est total à la rue comme on l’a rarement été : à la 17e, Careca marque ce qu’on croit le premier but d’une série de cinq, six ou huit pions d’affilée. On est mal. Mais Platini va marquer, hein ! Ce sera son dernier en Bleu, celui de l’égalisation : 1-1, le Brésil est calmé, la France revient dans la rencontre. Prolongation et pénos au soleil de Guadalajara : la France passera, mais Michel a raté son tir au but. Signe que la fin approche… La RFA achèvera les Bleus en demies (0-2). Michel tirera sa révérence…
Zidane et Platini… En France, on regarde toujours les fans de Michel comme des nostalgiques. Erreur ! La nostalgie n’a rien à y voir du tout. Ceux qui préfèrent Platoche à Zizou restent marqués à jamais par « l’instant P » , ce moment où Platini marquait. Un moment attendu, une petite fête, un petit rêve exaucé. Des buts, des buts, des buts… Zizou, c’est autre chose : magique et inspiré, bien sûr. Unique à certains moments de sa carrière. Mais avec Michel, y a un petit plus. Une petite musique tenace, une drogue douce et dure qui nous a rendus « accros » pendant 11 ans : Platini va marquer… Novembre, le Parc, les Bleus contre le reste du monde. Et Platini qui marque.
Chérif Ghemmour