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Robert Herbin… pour les jeunes

Par Mathieu Rollinger, 29 ans et 315 jours
Robert Herbin… pour les jeunes

Ce lundi soir, c’est une légende du football français qui nous quittait à l’âge de 81 ans. Mais le souvenir de Robert Herbin n’appartient pas qu’aux Stéphanois ou aux boomers. Voilà pourquoi.

Faut-il prétendre connaître quelqu’un pour lui rendre hommage ? Faut-il avoir été un contemporain de ses plus belles tranches de vie pour pouvoir mesurer la trace qu’un homme a laissée ? Faut-il avoir été là pour comprendre une existence ? Dans le cas de Robert Herbin, non. Il suffit de tendre la main, ouvrir les yeux, se déboucher les oreilles pour sentir un héritage. C’est certainement le lot des grands hommes, ceux qui ont marqué leur histoire, et le Grand Robert mérite au moins que ce qu’il représente lui survive. Mais c’était quoi au juste, Robert Herbin ? Certainement plus qu’une référence dans une chanson de Mickey 3D ou qu’un figurant dans un docu ayant pour générique de fin « Qui c’est les plus forts… ».

Vous êtes le Sphinx des hôtes de ces bois

Celui qu’on appelait « le Sphinx » avait déjà visiblement du mal avec sa propre définition, celle que les médias lui ont donnée. Dans son autobiographie, il racontait qu’il avait pris connaissance de ce surnom en 1983, année où il quittait l’AS Saint-Étienne, « en planchant sur des mots croisés ». Un coup d’œil dans le dico plus tard, il apprenait qu’il était donc un « personnage énigmatique figé dans une attitude mystérieuse ». Il est vrai que le coach à l’incroyable coupe afro rousse n’était pas du genre à étaler ses sentiments dans la presse. Mais à l’écouter, ce mystère était mal éludé. « Je pense que l’on a souvent confondu mon souci de protéger mes joueurs avec un certain attrait pour le mystère », écrivait-il. En plus de ça, en emmenant Saint-Étienne vers quatre titres de champion de France, trois Coupes de France et surtout une finale de Coupe des clubs champions, il a pu démontrer qu’il avait bien plus de pif que le félin de pierre posé à Gizeh.

Quitte à taper dans les références mythologiques, il aurait certainement fallu le comparer à un Phénix. Parce que ce Parisien de naissance a réussi à faire carrière dans le foot en étant formé au petit Cavigal de Nice. Pourquoi le Gym ne l’a pas remarqué ? Mystère. Pourtant, ce puissant milieu défensif, réputé pour son solide jeu de tête, a réussi à faire son trou à Sainté, puis chez les Bleus. Replacé défenseur central, il voit sa carrière internationale écourtée par l’émergence de la « Garde noire », formée par Marius Trésor et Jean-Pierre Adams. Sa carrière de joueur tout court sera, elle, rabotée par un tacle rugueux à souhait de Nobby Stiles, l’Anglais édenté. Malgré ce parcours faisant la part belle aux histoires inachevées, il est pourtant celui qui a permis au football français de renaître de ses cendres.

Le loser bénéfique

Alors que le pays traversait un désert d’émotions, un carême long de quinze piges depuis les épopées rémoises et une troisième place au Mondial 1958, ses Verts à lui ont enfin redonné vie et fierté à toute une génération. Ces baby-boomers post-soixante-huitards qui commençaient à se fondre dans la culture rock, à se dandiner sur du disco ou à avoir le temps d’être séduit puis déçu par les mouvements maoïstes… tous ceux-là découvraient la joie des frissons footballistiques. Et ça grâce à des petits gars en vert, représentant une ville ouvrière et populaire, donnant vie au chaudron de Geoffroy-Guichard. Janvion, Lopez, Curković, Bathenay, Piazza, Santini, Synaeghel, Larqué, Rocheteau, les frères Revelli… voilà l’ossature dirigée par le marionnettiste Herbin qui fera rêver la France au printemps 1976. Il y a eu l’exploit, suivi sur tous les postes de télé, face au Dynamo Kiev d’Oleg Blokhine, avec un but décisif de Rocheteau, l’Ange Vert pourtant sur une patte. Puis, évidemment, la finale de Glasgow du 12 mai contre le froid et clinique Bayern Munich de Beckenbauer, perdue 1-0 à cause de… oui, on sait Tonton, les poteaux carrés.

Mais pendant que les Champs-Élysées célébraient des perdants, alors que les autres cherchaient des excuses, un homme ne comprend pas ce monde qui l’entoure. « J’avais l’impression d’être ailleurs, avouera-t-il plus tard. À l’Élysée, je ne me souviens même plus de ce que nous a dit le président. C’était qui, d’ailleurs, à l’époque ? Giscard ? » On a enfin mis le doigt dessus. Le temps ayant fait son œuvre, voilà ce qu’il reste de l’héritage de Robert Herbin. Si beaucoup font de lui le symbole d’une France romantique, naïve et adepte de l’auto-congratulation, à l’intérieur de lui, Herbin est celui qui savait qu’elle méritait mieux : la victoire. Ainsi, avec Michel Hidalgo, autre légende bâtisseuse disparue durant ce confinement, il s’avérera être l’une des jambes d’un pays qui accédera après de longues années de rééducation à un titre, puis à plusieurs. Et quand vos aïeux vous assureront que « c’était mieux avant », répondez-leur que Robby n’était vraiment pas sûr de ça. Sinon, on aurait réservé un autre traitement à ce bonhomme, aussi sauvage soit-il, qui a fini ses jours seul avec son chien, dans sa maison de l’Étrat, à écouter du Wagner. Si la défaite était vraiment si belle, la France aurait fini par apposer un nez sur la statue de son Sphinx.

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