Ca vaut quoi le Mexique ?

Le Mexique, un cactus sans épines ? Plusieurs indices portent à la croire. Chacun le sait, la CONCACAF est une zone aussi périlleuse que Neuilly-sur-Seine à 11h du mat’. Le géant de la région a pourtant bien failli y laisser sa carcasse. Humiliée par le Salvador (2-1) et le Honduras (3-1), la sélection aztèque a senti le souffle de la guillotine sur son cou jusqu’à la dernière ligne droite des éliminatoires. Pour sauver sa peau, El Tri a usé trois entraîneurs et a fini par s’en remettre à un meneur de jeu ventripotent, qui oeuvre dans l’abominable Major League Soccer : Cuauhtemoc Blanco, 36 ans au compteur, employé des Chicago Fire. Alors pourquoi craindre cette sélection instable et dégénérescente ?

Dans la foulée d’une Coupe du Monde 2006 où la sélection aztèque était passée à deux doigts de sortir l’Argentine (défaite en prolongations en huitièmes), le Mexique avait entamé les éliminatoires la poitrine gonflée. Hugo Sanchez était chargé de mener la sélection et avait annoncé la couleur : le Mexique champion du Monde ! On ne rit pas … Aussi brillant que Maradona avec l’Argentine, le meilleur joueur aztèque de tous les temps se fait débarquer comme un malpropre. Même sort pour son successeur, Sven Goran Eriksson. Car après la gloire locale et son charisme latino, la Fédé mexicaine avait opté pour le « sérieux » européen. Double échec, et le coup classique : l’ancien sélectionneur, Javier Aguirre appelé à venir jouer les pompiers.

A l’aube de l’année de son bicentenaire, le Mexique fait du neuf avec du vieux, et Cuauhtemoc Blanco, meneur de jeu à la Coupe du Monde … 1998, est rappelé par son ex-nouveau sélectionneur au mois de mai. Débuts cataclysmiques. Défaite face au Salvador et une entame de Gold Cup humiliante, avec l’expulsion de …. Javier Aguirre coupable d’une « patada » (un coup de pied) sur un joueur panaméen (1-1). Cette fois, la Fédé mexicaine ne bougera pas. La peur du ridicule sans doute. Mais le sang froid ou le fatalisme finiront par payer, puisque Blanco, toujours à le plus créatif des mexicanos malgré son âge avancé, et El Vasco (le surnom d’Aguirre) finiront par arracher la Gold Cup et la qualif’. El Tri bouclera ses éliminatoires au deuxième rang de la CONCACAF, un point derrière les ennemis US.

Faut-il pourtant s’effrayer devant ce soudain rebond ? Peut-être … Car Aguirre a réussi là où Hugo et Sven-Goran ont pataugé. Avec la Gold Cup comme laboratoire, un début d’alchimie a pris forme entre l’ancienne génération et les champions du monde moins de 17 ans de 2005. Souvent risible en club, Giovani Dos Santos réserve ses meilleurs moments à la sélection, et Carlos Vela semble désormais en mesure de pouvoir mener l’attaque mexicaine. Derrière, les vieux tiennent la baraque : la tête de pont Rafael Marquez, mais aussi l’excellent latéral gauche, Carlos Salcido (PSV Eindhoven) ou ce relayeur trop peu connu, Pavel Pardo (ex-Stuttgart, aujourd’hui à l’America). Entre les deux générations, l’intermédiaire Andres Guardado (23 ans), agitateur du flanc gauche de la Corogne, fait la colle.

Au Mexique, tirer la France n’a pas excité les commentateurs. L’honneur fait au pays de donner le coup d’envoi de la Coupe du Monde avec l’Afrique du sud a largement pris le dessus sur toute autre considération. Sélection le cul entre deux chaises, ni cador ni nabot, El Tri prend souvent de haut les petites équipes, et donne en général sa plénitude face aux gros morceaux. Pour mémoire, les Bleus peuvent se mater la cassette de Mexique-Argentine 2006, où l’opposition face aux Pays-Bas, millésime 1998 (2-2). Et pour se rassurer, se dire que si elle se montre presque invariablement à la hauteur lors des grands rendez-vous, la sélection mexicaine ne les gagne que rarement.