Tout le monde gagne quand Paris grossit
Il ne faut pas être grand clerc, ni une petite souris, pour imaginer ensuite la teneur des discussions lors du bureau de la LFP qui a finalement décidé d’abandonner l’opposition de départ et – les mots font parfois sourire – de principe. Le foot français ne peut se permettre de « perdre » sa principale tête d’affiche (pardon aux Lyonnais et aux Marseillais). Pas au moment historique où l’on vend la Ligue 1 aussi cher – bref en crevant le plafond de verre des sept zéros – à un magnat espagnol. Pas quand la LFP n’arrive même plus à refiler « sa » coupe au service public, pourtant en grande disette de gazon. Voilà l’évidence. Tout le monde gagne quand Paris grossit : davantage de droits télé, y compris pour Amiens ou Nîmes, des stades remplis à chaque venue des stars, une meilleure visibilité – relative certes – internationale de nos compétitions et de leurs pensionnaires... Le foot doit être le seul secteur où le concept de « ruissellement » puisse sonner juste aux oreilles de certains.Le traitement du PSG n’est pas de faveur, ni une faveur. Il éclaire au grand jour d’un banal arrangement entre amis ce qu’est le foot pro d’un championnat avec quelques ambitions. Son essence dans tous les sens du terme. Ce n’est d’ailleurs ni nouveau ni propre à l’Hexagone. « C’est comme dans tous les grands championnats, les grands clubs sont un peu avantagés » , a lâché avec philosophie Michel Der Zakarian. Alors pourquoi s’en étonner ou même en faire toute une histoire ? Peut-on vraiment continuer à brandir de belles valeurs – primauté du « sportif » , égalité entre les « petits » et les « gros » , etc. – hormis évidemment lors de séminaires « sport et citoyenneté » au Sénat ou de rencontres avec les « élus » pour récolter quelque argent public ou pérennisation de niche fiscale ?
Il faudrait un sacré courage politique, de celui qui coûte cher, pour espérer que la LFP ou même la FFF se décident à sacrifier ainsi l’ensemble de l’édifice si patiemment construit. Et les caciques de la LFP le désirent-ils tout simplement ? Les chefs d’entreprise demandent-ils un RIC (référendum d'initiative citoyenne) pour rétablir l’ISF ? Le rapport de force n’était vraiment pas de l’ordre d’une violence faite à des institutions pliant sous l’étranglement de la pieuvre de la finance internationale. Chacun y participe et y voit son profit. Personne ne veut changer de système, déjà bien en place. On aurait presque envie de remercier les gilets jaunes d’avoir, bien involontairement, levé un peu le voile sur cette réalité. Oui, dans le capitalisme, fût-il sportif, la taille compte.
Par Nicolas Kssis-Martov
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