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Bleus : loin des fans, près de l’erreur

Par Nicolas Kssis-Martov

Les Bleus ont présenté un triste visage devant l’Italie ce vendredi soir en Ligue des nations. Plus grave encore, ils n’ont jamais semblé aussi éloignés de leurs supporters, se montrant pour certains parfois même méprisants sur le terrain ou dans certains déclarations publiques. Mais l’équipe de France peut-elle vraiment exister sans le peuple ?

Bleus : loin des fans, près de l’erreur

« L’équipe de France n’appartient à personne » dissertait en vieux sage Didier Deschamps dans les colonnes du Figaro en 2022. Il se trompait. Elle est en grande partie le bien commun, au moins symboliquement, du peuple français. La formule peut sembler pompeuse, mais la défaite cuisante et logique face à l’Italie, assortie du comportement des Bleus vis-à-vis du public, lui rend terriblement justice.

Ensemble ou rien

Il n’y avait qu’à écouter Kylian Mbappé, son capitaine, en conférence de presse au sujet de possibles sifflets (évidemment stupides) à Paris pour son retour, pour s’en convaincre. Mbappé avait alors répondu, un peu hautain :  « L’accueil du Parc ? Cela m’est égal ! » S’il revient avec le Real, cette réaction se révélerait acceptable ou compréhensible, certainement pas quand il réapparaît en portant la tunique des Bleus qu’il affirme, et on veut bien le croire, tant respecter et à laquelle il doit tant. Il semble, comme d’autres, considérer l’EDF comme une sorte de super-équipe d’un super-club. Or, la sélection, surtout en France au regard de notre histoire et de notre rapport à la nation, notamment depuis 1998 pour ce qui concerne le ballon rond, occupe un rôle tout autre. Infiniment plus vaste, culturellement et socialement, que les seuls derniers carrés accumulés dans les Euros ou en Coupe du monde. Pour le coup, c’était encore moins attendu : le capitaine des Bleus se montre désormais aussi décevant dans sa communication que balle au pied.

Le match contre l’Italie représentait pourtant une opportunité unique. Il ne fallait tout du moins pas rater la dimension affective, quitte à perdre au tableau d’affichage. Le Parc des Princes constitue une enceinte historique, un patrimoine bien vivant, le principal réceptacle de la passion autour du foot en région parisienne. L’équipe olympique de Thierry Henry venait d’y perdre une finale, mais avec les honneurs, en ayant, comme l’ensemble des athlètes tricolore lors des JO, entraîné une ferveur populaire qui tombait si bien après le traumatisme collectif des élections législatives. Or nous revoilà avec Didier Deschamps en Michel Barnier du foot et, dans son sillage, des Bleus qui paraissent incapables de comprendre qui ils sont. Le peuple français a besoin de se sentir aimé, nous l’avons si bien observé lors des communions avec les médaillés au club France. Or face aux Azzurri, les Bleus ont donné l’impression de se réfugier dans une bulle, par peur voire par mépris d’un public auquel ils ne pardonnent pas les reproches sur leur style ennuyeux pendant l’Euro. Ils ne se sentaient pas véritablement investis d’une mission ou d’un devoir, subissant une Nazionale en pleine renaissance qui prenait un vrai plaisir à jouer et à gagner avec la manière.

La défaite a d’ailleurs été gérée et vécue en interne. Seul Griezmann a daigné accorder un tour « d’honneur » pour applaudir et remercier ceux et celles venu-es garnir les gradins du Parc. Hasard ou non, il les retrouvera avec son Atlético de Madrid le 6 novembre prochain, dans la nouvelle formule de la Ligue des champions. Reste que Grizou a, à défaut de briller sur le pré, au moins soigné son image de « capitaine de cœur » face à la froide distance de celui qui porte officiellement le brassard. Duránt l’Euro, Didier Deschamps s’était réfugié derrière le référendum de l’audimat pour masquer le problème et la distance entre les joueurs et le public, qui n’a pu qu’à de très rares occasions les approcher durant leur séjour outre-Rhin : « On a un soutien populaire au stade, plus de 10 millions (de téléspectateurs) à chaque match. » Avant de signifier son dédain. « S’ils n’aiment pas ce qu’ils voient, ils peuvent changer de chaîne. C’est plus facile à la maison. Quand ils ont payé au stade, ils restent du début à la fin. » L’EDF ne va pas pouvoir continuer longtemps de la sorte. Il ne reste plus qu’à conseiller à nos internationaux et à leur sélectionneur de se pencher sur cette pensée d’Ernest Renan : « La France excelle dans l’exquis ; elle est médiocre dans le commun. » Comprendre : les Français veulent être grands avec les Bleus, les Bleus ne peuvent l’être sans eux.

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