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Le retour des Grands d’Argentine ?

Par Léo Ruiz
Le retour des Grands d’Argentine ?

Après des années de crise, de relégations et de disette, ceux que l'on appelle en Argentine les « cinq Grands » sont de retour au premier plan. Pour la première fois, quatre d'entre eux disputeront la Copa Libertadores, dont le premier tour a démarré mercredi.

Si l’on s’en tient aux performances, l’année 2014 a frisé la perfection pour l’Argentine du foot. À l’échelle continentale, deux trophées : la Copa Libertadores pour le San Lorenzo du Patón Bauza et la Copa Sudamericana pour le River Plate du Muñeco Gallardo. Sur la scène internationale, deux finales : celle du Mondial brésilien pour l’Albiceleste et celle du Mondial des clubs, toujours pour San Lorenzo. Idéal pour masquer les autres réalités du fútbol argentino, beaucoup moins glorieuses : crise économique, corruption, violence, interdiction des supporters adverses dans les stades. Mais là n’est pas le sujet. Cette année 2014 est notable en Argentine parce qu’au-delà des coupes et des médailles, elle est celle du retour au premier plan des Grandes, les cinq clubs les plus titrés du pays (Boca, River, Independiente, Racing et San Lorenzo). La preuve : le dernier championnat, remporté par le Racing du prince Milito, a vu quatre de ces cinq grands terminer dans le top 5 (il ne manquait que le Ciclón, qui n’avait que le Maroc et le Real Madrid en tête). La preuve, encore : les noms des quatre qualifiés d’office pour la Copa Libertadores, dont la phase de repêchage commence aujourd’hui : Boca, River, San Lorenzo et Racing (Huracán a toisé 4-0 Alianza Lima au barrage aller mardi et Estudiantes la Plata joue le sien vendredi).

Dettes, poids des idoles, mafias et mufa

Independiente, le recordman de la compétition (7 sacres), est donc le seul grand absent de 2015 (El Rojo disputera quand même la Sudamericana). Ce quatre sur cinq en Libertadores est historique. Ce n’était jamais arrivé. Pourtant, avant le renouveau de 2014, rien ne laissait imaginer un tel scénario : lors des cinq dernières éditions de la plus prestigieuse des coupes latino-américaines, le quintet gagnant d’Argentine n’avait jamais réussi à placer plus d’un représentant. Plombés par les dettes et ses présidents mafieux (entendre : plus mafieux que les autres), River Plate (2011) et Independiente (2013) avaient d’autres préoccupations : la découverte honteuse de la deuxième division, alors que tout – un improbable et injuste système de relégation basé sur une moyenne de points pris sur trois ans – avait été imaginé pour que la descente ne soit qu’une affaire de « petits » . Au bord du gouffre lui aussi, San Lorenzo avait sauvé ses fesses lors d’un barrage tout aussi injuste, face à Instituto de Córdoba, qui ne s’en est jamais vraiment remis (mais qui s’en intéresse ?). Racing, de son côté, jouait à l’éternel candidat au titre, spécialiste des départs canons, mais trop vite rattrapé par son terrible statut de mufa (porte-malheur), que seul ce génie de Diego Milito a semblé capable de pouvoir conjurer. Ne restait alors que Boca Juniors, seul survivant de l’élite, mais écrasé par le poids de ses idoles, fussent-elles magnifiques (Riquelme et Bianchi).

Des grands puissants

Racing, River et San Lorenzo sont donc les trois derniers champions nationaux. Avant eux, les petits (Arsenal de Sarandi, Argentinos Juniors, Banfield) et les moyens (Newell’s, Vélez, Estudiantes) avaient profité de la dégringolade des gros pour dépuceler ou gonfler leur palmarès. Mais ça, c’était avant 2014. Avant que les grands ne redeviennent des puissants (avec un peu de sérieux, un peu de fric et pas mal de pouvoir à l’AFA). Désormais, San Lorenzo a à sa tête Marcelo Tinelli, une star de la télé-réalité aux poches bien garnies et au carnet d’adresses imposant (le bonhomme lorgne même sur la présidence de la Fédé). Independiente a bazardé Javier Cantero, trop intéressé par la lutte contre la corruption, pour placer Hugo Moyáno, leader sulfureux de la CGT. Et ça va tout de suite « mieux » : le Roi des Coupes a retrouvé l’élite, a un stade et des installations un peu plus présentables, paye ses employés et ambitionne de regagner des titres. Racing est allé chercher son idole en Italie pour lui filer le brassard et expliquer aux jeunes que si, c’est bel et bien possible d’être champion avec le maillot bleu ciel et blanc de l’Academia sur les épaules. River Plate, enfin, en a terminé avec Daniel Passarella, ennemi juré de feu Grondona (l’ex-éternel président de la Fédé, mort en juillet dernier) et semble mener enfin une politique sportive sensée et intelligente. Après sa belle année 2014, l’Argentine du foot s’est remise à rêver. Guidée par ses fleurons et sa sélection, elle ne pense qu’à une chose : vivre une merveilleuse année 2015.

Lucas Stassin, ça passe ou ça chasse

Par Léo Ruiz

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