En ce sens, Jean-Claude Mvoumbin, président de Culture Foot Solidaire, une des nombreuses associations qui soutiennent le projet, prône depuis des années ce « management interculturel » et une plus grande connaissance des particularités des pays africains. Afin d'éviter, par exemple, les histoires trop banales de ces jeunes joueurs venant d'Afrique traités comme des moins que rien, et même parfois abandonnés à l'hôtel, par les agents qui les ont pourtant fait venir, parce que pas assez bons. Business is business, hein. Intervient ensuite Nicolas Millet, le plus jeune agent diplômé d'Europe, et ses anecdotes incroyables : contacté par des agents anglais soucieux de se trouver un néophyte sans contact, il s'est retrouvé au cœur d'une escroquerie. Il faisait, à son insu, faire des tests à des jeunes africains à Porte de Pantin et à Saint-Denis, en leur promettant que des clubs de seconde zone espagnole s'intéressaient à eux. En réalité, les Anglais voulaient les envoyer dans des équipes pourries en Malaisie ou au Vietnam. Voilà pour le côté obscur de la profession. Ca fait rêver.
Alexandre, la trentaine et travaillant dans le droit du sport, interpelle les intervenants en louant leur idée mais en expliquant « qu'il sera très dur de faire le chevalier blanc » , surtout dans une profession où les règles sont établies depuis longtemps. Hugo Zeitoun, plutôt irritable lorsque les questions ne vont pas dans son sens, rétorque que ce discours est « symbolique de l'immobilisme institutionnel en France » . Et pan ! Mais une question mérite d'être posée : la vénalité n'est-elle pas la limite de cette formation autoproclamée moralisatrice ? « On n'est pas les Ayatollah du capitalisme non plus » se défend Hugo. Avec les valeurs inculquées par l'école, les fondateurs estiment que leurs protégés n'iront pas à l'encontre de la morale et ne dépasseront pas les limites fixées par l'éthique. Cependant, dans le cas contraire, qui va les sanctionner ? Dans les faits, personne. Après l'acquisition du diplôme officiel reconnu par la FFF, ce marché est totalement opaque et très peu contrôlé. « Au moins, on essaie de changer les choses » déclare Mvoumbim avant de citer Aimé Jacquet au sujet des trafics de joueurs africains : « c'est vrai que la tâche est immense, mais, ou on laisse tomber, ou on essaie de faire quelque chose » . Touché ?
Vincent Gersin
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