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15 novembre 1989 : l’adieu officiel de la RDA contre l’Autriche

Par Chérif Ghemmour
5 minutes
15 novembre 1989 : l’adieu officiel de la RDA contre l’Autriche

La défunte sélection est-allemande (21 septembre 1952 – 15 novembre 1989) a fini emportée par le grand vent de l'histoire. Six jours après la chute du mur de Berlin, lors d’un match en Autriche qualificatif pour le Mondiale italien. Magnéto, Serge !

Mercredi, jour de qualif. Il a fait beau sur Vienne, et à la nuit tombée, le stade du Prater a fait le plein de ses 55 000 places. L’ultime rencontre du groupe 3 des éliminatoires au Mondial italien 1990 entre l’Autriche et la RDA prévue à 19h30 a été avancée à 18 heures pour être synchrone avec l’autre match décisif URSS-Turquie à Simferopol. Avec neuf points, les Russes, leaders et bien partis pour l’Italie, sont talonnés par la Turquie, l’Autriche et l’Allemagne de l’Est, toutes à sept points. Tout est donc encore possible dans cette poule de cinq où les deux premiers seront mondialistes.

Toni Polster pour l’histoire

La RDA, au départ mal engagée dans la course, s’est refait la cerise en battant le « grand frère » russe 2-1 en octobre. Une victoire à Vienne, ce mercredi 15 novembre 1989, face à des Autrichiens abordables (1-1 à l’aller à Leipzig) et handicapés par une différence de buts défavorable (-3 pour eux et -1 pour les Allemands de l’Est), est largement envisageable. La RDA possède des joueurs de qualité dont on reparlera plus tard, tels Ulf Kirsten, Andreas Thom et Matthias Sammer (futurs internationaux de la Mannschaft). Et puis, le coach des Blancs, Josef Hickersberger, a eu l’idée saugrenue d’aligner en numéro 9 Anton « Toni » Polster, excellent au FC Séville… mais rejeté par le public viennois ! Des huées assourdissantes descendent des travées du Prater à l’annonce de son nom par le speaker. L’ambiance générale fleure bon le « monde d’avant » pris dans une accélération de l’histoire qui annonce la fin probable de la guerre froide : la RDA lutte avec l’URSS pour une place à la Coupe du monde dans un match arbitré par le Polonais Piotr Werner, soit trois nations du Pacte de Varsovie.

Vienne demeure le carrefour diplomatique entre l’Est et l’Ouest, et le point de rencontre entre Occident et Moyen-Orient (sommets de l’OPEP, etc.). Surtout, l’Autriche est devenue depuis l’été 1989 la zone de passage à sa frontière, avec la Hongrie, de très nombreux citoyens est-allemands passés en RFA à la faveur d’un dégel politique au sein du Pacte de Varsovie. Au Prater, ils sont 4000 citoyens de la RDA arrivés par quatre trains spéciaux en provenance de Berlin, Dresde et Leipzig, ainsi qu’en voitures privées ! Au coup d’envoi, où les affreuses nuques longues rivalisent avec des moustaches bien vintage, on est frappé par le bleu délavé des maillots est-allemands, d’habitude forçant plus sur le marine austère. Comme si la RDA s’effaçait déjà… Et en effet, les Bleus sombrent rapidement face aux Blancs autrichiens en 23 minutes chrono. Le maudit Toni Polster a placé une frappe du gauche (1-0) dès la 2e avant de breaker à 2-0 sur penalty après une faute idiote dans la surface à la 22e. Les Bleu pâle ont semblé amorphes face au déménageur du FC Séville (1,88 mètre). Mais juste avant la demi-heure de jeu, Ernst Aigner descend Andreas Thom dans la surface de réparation : penalty pour la RDA. Rico Steinmann le tire comme on bâille, pas trop fort, à droite du gardien, à mi-hauteur : d’une belle détente, Klaus Lindenberger repousse en corner.

La Mannschaft hérite de Sammer

C’est entendu : les Allemands de l’Est n’y croient pas. Ils n’y ont certainement jamais vraiment cru. Et pour cause ! Six jours plus tôt, le 9 novembre, le mur est tombé. Le mur de Berlin n’est plus. Le monde a changé soudainement. Enfin… Les footballeurs aux fameux maillots siglés DDR ont la tête ailleurs. Vers le futur. Vers l’espoir. Alors pourquoi vouloir encore lutter pour un pays aux lendemains incertains et né séparé de sa sœur occidentale (la RFA) des décombres de la chute du nazisme en 1949 ? En seconde période, Polster réussit un hat trick sur une contre-attaque qui a laissé une RDA coupée en deux, ralentie dans son lent repli mal coordonné, et achevée par cette frappe croisée de Toni-le-héros sur laquelle le gardien Dirk Heyne n’a pas tenté l’impossible. Le 3-0 final à Vienne et le 2-0 soviétique en Crimée qualifient l’URSS (première) et l’Autriche (seconde) pour la Coupe du monde en Italie. Rancunier, Polster a filé aux vestiaires au coup de sifflet final. Il a refusé d’accompagner les potes pour le tour d’honneur salué par la foule qui s’était mise à scander des « Toni ! Toni ! » à 2-0. Il recevra plus tard l’hommage très fairplay de son adversaire du soir, Rico Steinmann : « Nous étions la RDA avec une équipe jeune et affamée, mais l’Autriche avait Toni Polster. »

Le sélectionneur est-allemand Eduard Geyer regrettera, lui, que « le mur était tombé une semaine trop tôt. Mes joueurs étaient distraits et n’étaient plus concentrés à 100 %. Si le mur était tombé plus tard, qui sait comment le match aurait tourné. » Et si la RDA s’était qualifiée pour la Coupe du monde de l’été 1990 ? Aurait-elle affronté, comme en 1974, la RFA alors que le processus de la réunification allemande entrepris par le chancelier Helmut Kohl battait son plein tout au long de cette année 1990 ? On ne le saura jamais. Cet Autriche-RDA du 15 novembre 1989 restera le dernier match officiel de la RDA qui, prise justement dans le calendrier de la réunification, ne disputera plus que sept matchs amicaux, dont le dernier le 12 septembre 1990 face à la Belgique sur une belle victoire 2-0. Le doublé bruxellois de Matthias Sammer donnera partiellement raison à Franz Beckenbauer qui, au soir de la finale victorieuse de Coupe du monde 1990 contre l’Argentine à Rome (1-0), avait déclaré : « Grâce à l’arrivée prochaine des joueurs de l’Allemagne de l’Est(…), je pense que durant les prochaines années, et j’en suis désolé pour le reste du monde, il ne sera pas possible de nous vaincre pendant longtemps. » Dont acte, mais en partie : la Mannschaft unifiée gagnera l’Euro 1996 avec un super Sammer, meilleur joueur UEFA du tournoi et Ballon d’or, ainsi que grand artisan du succès de Dortmund en finale de Ligue des champions 1997 contre la Juventus.

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