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Der Zakarian, Brest in peace

Par Andrea Chazy et Jérémie Baron
Der Zakarian, Brest in peace

Après un chapitre de quatre années à Montpellier refermé, Michel Der Zakarian a directement mis le cap à l’ouest pour prendre le contrôle du brigantin siglé SB29. Un choix qui a surpris tout le monde, même l’intéressé, mais qui résume bien le caractère d’un homme aussi passionné par son métier que distant des strass et des paillettes. Parfois malgré lui.

Ils l’ont espéré, attendu, et finalement, ne le verront pas. Au stade Francis-Le Blé ce vendredi soir sur les coups de 20h45, Lionel Messi ne viendra ni faire coucou ni martyriser le Stade brestois dans son antre. Neymar non plus, d’ailleurs. Un coup dur pour ces fans ayant dépensé plusieurs centaines d’euros – parfois même 400 (!) – tout ça pour dire : « J’y étais ». Tout ça pour narguer la France entière ou tout simplement assouvir leur pulsion, leur envie, de voir le sextuple Ballon d’or revêtir un maillot avec le patch de la Ligue 1 Uber Eats le temps d’une soirée.

On dit qu’on a un championnat de merde, qu’on a plein de choses qui ne sont pas bonnes… Mais si on arrive à faire venir un joueur comme ça, ce serait extraordinaire. On va se régaler

Michel Der Zakarian, aussi, sera un peu déçu. Le nouveau coach brestois n’avait d’emblée caché à personne que l’arrivée de La Pulga avait eu un effet « coup de fouet » sur sa sexualité : « Je ne vais pas être poli, mais il me fait bander, le mec. On dit qu’on a un championnat de merde, qu’on a plein de choses qui ne sont pas bonnes… Mais si on arrive à faire venir un joueur comme ça, ce serait extraordinaire. On va se régaler ». Tant pis, il faudra encore attendre un peu pour que la rencontre ait lieu entre le technicien breton et la star argentine. Un mal pour un bien : lors des deux premières journées, les hommes de Der Zak’ ont prouvé qu’ils avaient les armes pour regarder dans les yeux les Européens du championnat de France. Après avoir accroché Lyon (1-1), qualifié en Europa League, et Rennes – qui mène sa barque en C4 – sur le même score, l’heure est venue de s’attaquer à un navire de premier ordre. Zef le Pirate ne s’y opposera pas, Michel Der Zakarian non plus.

Europe et fief finistérien

Au même titre que voir Messi traverser les Pyrénées était impensable il y a encore quelques mois, Michel Der Zakarian ne s’imaginait pas non plus forcément, fin mai, débarquer dans la cité du Ponant. Il venait alors de clore une belle aventure dans l’Hérault, une nouvelle, après y avoir joué puis grandi comme coach pendant près de 20 ans entre 1988 et 2006 puis de 2017 au mois de mai dernier. « Ça s’est arrêté, cela faisait quatre ans, rejoue l’intéressé. Je n’ai pas senti de la part de la direction une envie de continuer, et moi j’avais aussi le désir de voir autre chose. Ça s’est fait comme ça. » Pour Daniel Congré, l’un de ses relais dans le vestiaire montpelliérain, le groupe aurait pourtant pu rempiler pour une cinquième saison : « Je n’ai pas forcément senti une fin de cycle, pose le nouveau défenseur de Dijon. On fait quatre belles saisons avec lui et je pense que ça s’est plus fait ressentir vis-à-vis du club que vis-à-vis des joueurs. Le coach n’a rien laissé transparaître, il a été impliqué jusqu’au dernier match et s’est montré sérieux et pro jusqu’au bout. »

Lorsque Laurent Nicollin a pris la décision de ne pas le prolonger à la Paillade, le Franco-Arménien ne s’est jamais dit qu’il était l’heure de souffler. Il s’est immédiatement engouffré dans un nouveau tunnel, guidé sûrement par une volonté de ne pas revivre ces « neuf mois de chômage entre [son] limogeage nantais et [son] retour en Ligue 2 à Clermont » connu au début de sa carrière d’entraîneur, entre 2008 et 2009. Michel rêvait aussi d’Europe, pour la première fois de sa vie de coach après avoir connu quelques épopées crampons aux pieds, mais l’opportunité ne s’est jamais présentée. « J’ai eu Brest, c’est tout. Je ne vais pas raconter des bobards, avoue-t-il. Je ne voulais pas arrêter pendant un ou deux ans, l’opportunité, c’était Brest, qui est en Ligue 1 et qui a des ambitions. Je n’avais pas envie de faire de pause, j’avais envie de continuer à coacher. C’est ma passion, je n’ai pas envie de faire une coupure en attendant une opportunité ou qu’un coach se casse la gueule pour prendre sa place. »

On lui a expliqué que nous étions un club familial dans lequel j’impliquais l’entraîneur dans les prises de décision concernant le recrutement. Un peu de caractère, de rigueur, on avait peut-être des besoins à ce niveau-là. Ce qui a pu lui plaire, c’est aussi le fait que nous sommes un club avec un fonctionnement très simple, la prise de décision se fait entre la direction et mon entraîneur.

« Il avait dit qu’il voulait jouer la coupe d’Europe, on ne l’a pas forcément mal pris, explique de son côté le directeur sportif brestois Grégory Lorenzi. Ce n’est pas parce que quelqu’un a un souhait que se retrouver à Brest est pour autant un choix par défaut. Les opportunités peuvent ne pas se présenter mais c’est aussi pour ça qu’il a toujours été clair là-dessus : le projet brestois l’intéressait, sinon il n’y aurait jamais eu le premier contact. » Le SB29 a aussi eu pour lui sa localisation, la belle-famille de l’ancien défenseur ayant pour fief Penmarc’h (Finistère sud), à une centaine de kilomètres en-dessous de Brest. Pour ce qui est du reste, il y a eu le discours de Lorenzi, ce « feeling » positif et l’assurance de retrouver dans le 29 un peu de ce qu’il avait connu dans l’Hérault. « On lui a expliqué que nous étions un club familial dans lequel j’impliquais l’entraîneur dans les prises de décision concernant le recrutement. Un peu de caractère, de rigueur, on avait peut-être des besoins à ce niveau-là. Ce qui a pu lui plaire, c’est aussi le fait que nous sommes un club avec un fonctionnement très simple, la prise de décision se fait entre la direction et mon entraîneur. » Un paramètre important pour l’ancien Nantais, qui avait par exemple connu le totalitarisme de Waldemar Kita à Nantes : sa friction avec le président des Canaris, au coup de sifflet final de la 38e journée à la Beaujoire l’an dernier, a d’ailleurs convoqué de vieux fantômes : « Je suis content pour vous, mais pas pour le FC Nantes ! », avait-il lâché à son ancien boss dans les coursives de Louis-Fonteneau, après avoir envoyé les Jaunes en barrage Ligue 1/Ligue 2. Ce soir-là, en battant les locaux (1-2), Michel et son MHSC avaient également validé le maintien de… Brest, dix-septième à un point de la trappe. Quelques semaines plus tard, Olivier Dall’Oglio et lui échangeaient leur place à quelques jours d’intervalle. « Si on m’avait dit tout ça, je n’y aurais pas cru, s’amuse Lorenzi. L’histoire a bien fait les choses. C’est purement le hasard. »

Amer, Michel ?

Franck Rizzetto connaît Michel Der Zakarian comme peu dans le monde du foot. Malgré les « huit-neuf ans » de différence avec son aîné, il a joué avec Der Zak’ et l’a ensuite suivi à Reims, à Montpellier et aujourd’hui à Brest dans sa deuxième vie de coach. Les deux ont un mot pour décrire leur relation : ils sont complémentaires. « C’est par rapport à nos personnalités, détaille Rizzetto. Je suis plus « posé » que lui. Pour dire les choses aux joueurs, moi je le dis à ma façon, lui le dit à sa façon. Michel n’y va pas par quatre chemins, dit les choses franchement, donne beaucoup d’objectifs aux joueurs. » Comme Michel, Franck aime le golf. Même si en ce moment, ils y vont moins. « À Montpellier, on avait une bande d’amis avec qui on en faisait régulièrement. Depuis qu’on est arrivés à Brest, on n’y est allés que deux fois. La météo le permet moins », se marre-t-il.

Au niveau des médias, il s’est toujours protégé. Car sinon, c’est quelqu’un de passionné. Des fois même trop expressif

Le numéro 1 confirme : « On ne fait pas que jouer au golf, on travaille d’abord (Rires). On essaie une fois par semaine de s’évader un peu. On aime bien la petite balle. Ça nous permet de nous vider la tête. » Des greens au stades de Ligue 1, partout où il a accompagné la tête-pensante brestoise, Rizzetto a vu le même cas de figure se répéter : Der Zak’ a fait le job et puis s’en est allé. Souvent avec le sentiment du devoir accompli, rarement avec la lumière des projecteurs braquée sur lui. Il a ramené Nantes en Ligue 1 pour finalement faire une pige en Champagne dans l’antichambre de l’élite l’année d’après. Il a installé sur la durée Montpellier dans le top 10 du foot français à son arrivée en 2017 alors que le club héraultais sortait d’une saison cauchemar où il avait frôlé la relégation. Sans intéresser les écuries qui se trouvaient au-dessus de lui ou qui, comme lui, rêvent de soirées sur le Vieux Continent. Ces derniers mois, Lille a pris Jocelyn Gourvennec, Rennes a choisi Bruno Genesio, Lyon et Marseille se sont tournés vers l’étranger quand Nice a même payé pour attirer Christophe Galtier dans ses filets.

L’expresso et le Rizzetto

Une question se pose alors : Michel Der Zakarian ne souffrirait t-il pas légèrement d’un déficit d’image ? De cette « carapace » qu’il revêt face aux médias et en conférence de presse là où d’autres, dont les résultats sportifs ne sont pas plus probants, excellent ? Peut-être un peu. « Au niveau des médias, il s’est toujours protégé, explique Daniel Congré. Car sinon, c’est quelqu’un de passionné. Des fois même trop expressif. À l’entraînement ou en match, on ne peut pas dire qu’il ne laissait rien transparaître. » Son nouveau N+1, Grégory Lorenzi, abonde : « Je pense surtout que c’est une personne timide qui, par le passé, a eu une mauvaise expérience avec la presse. Ce n’est pas quelqu’un qui aime bien s’épancher là-dedans. Il préfère avoir des réponses assez brèves, assez franches, qui peuvent paraître parfois assez froides. Mais quand vous êtes avec lui et que vous discutez, rien n’empêche de pouvoir rigoler, d’échanger sur pas mal de choses autres que le football et on s’aperçoit que c’est aussi et surtout une personne agréable. Il y a le foot, mais il y a aussi l’homme. » L’homme, justement, a encore quelques années à passer sur un banc de Ligue 1. Rallier Brest n’avait alors en ce sens plus rien de surprenant. Car au-delà du sportif, se rapprocher et même revenir en Bretagne émanait d’une volonté commune entre sa femme Véronique et lui. « Je connais la Bretagne, j’ai vécu un certain nombre d’années à Nantes, conclut Michel Der Zakarian. Brest est plus à l’ouest, mais c’est une belle région, il y a de beaux coins, c’est très sauvage, et il y a des petites plages même si l’eau est très froide. C’est le métier qui veut ça : qu’on soit joueur ou entraîneur, on est des nomades, il faut bouger. »

Dans cet article :
Brest toujours sur son nuage, Metz s'offre un bol d'air à Nantes
Dans cet article :

Par Andrea Chazy et Jérémie Baron

Propos de Michel Der Zakarian, Grégory Lorenzi, Daniel Congré et Franck Rizzetto recueillis par AC et JB, sauf mention.

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