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Adios amigos

Par Thomas Pitrel, à Donetsk
5 minutes
Adios amigos

Au terme d’un match honnête, l’équipe de France a perdu son quart de finale contre l’Espagne à cause d’un doublé de Xabi Alonso (2-0). Les Bleus rentrent à la maison sur un bilan mitigé. L’Espagne se mesurera au Portugal en demie.

Espagne – France : 2-0 Buts: Xabi Alonso (19e et 90e) pour l’Espagne.

Lorsque l’on perd, il est parfois agréable d’avoir quelqu’un sur qui taper pour se défouler. Que ce soit un arbitre évidemment corrompu. Que ce soit un adversaire qui refuse le jeu, qui simule ou qui met des coups de tatane dans les tibias. Ou que ce soit plus simplement sa propre équipe, les joueurs que l’on espérait voir faire un exploit et qui se sont écroulés comme de pauvres merdes. On peut alors leur mettre tous les maux du monde sur le dos et appliquer la seule solution possible, celle qui a suivi la Coupe du monde 2010 pour l’équipe de France : tout casser pour tout reconstruire. Rien de tout ça n’est arrivé ce soir. Il n’y a pas eu d’injustice et, si tout n’a pas été parfait dans le jeu, les Bleus n’ont pas lourd à regretter. Ils y ont mis du cœur à l’ouvrage, ils ont fait ce qu’ils ont pu. Il n’aurait d’ailleurs pas été totalement absurde qu’ils arrachent la qualification au bout. Mais au fond, il n’y avait sur le terrain qu’une équipe avec suffisamment de coffre pour remporter un Euro, et elle jouait en rouge.
La Bûche se brûle les ailes
Pourtant, si Laurent Blanc voulait que ses joueurs entrent dans le match dès la première minute, il a enfin obtenu entière satisfaction. La bonne entame se traduit d’abord par une intensité sur chaque passe, par une agressivité sur chaque ballon joué par l’adversaire à mille lieues de ce qu’on a pu observer pendant 90 minutes contre la Suède. Les choix tactiques du sélectionneur font que Benzema dézone beaucoup moins, même s’il n’a pas encore l’air totalement à son aise. Derrière lui et devant M’Vila, il peut quasiment compter sur deux numéros 10 avec Malouda et Cabaye qui pressent haut et redescendent alternativement. Pendant que Ribéry ratisse l’aile gauche à coups de débordements incessants, Debuchy est chargé de faire pareil à droite. Oui, Debuchy. Exit les Nasri, Ben Arfa, Ménez, le sélectionneur a trouvé son choix fort en mettant la Bûche à un poste qu’il n’a plus connu depuis quelques années et en alignant Réveillère à sa place comme latéral droit. La formule fonctionne bien. Comme contre la Croatie, la Roja multiplie les passes ratées et autres petites erreurs qui prouvent qu’elle n’a pas la sérénité que l’on pourrait attendre. Comme contre la Croatie, elle va pourtant réussir à ouvrir le score.
La différence, c’est qu’elle le fait beaucoup plus tôt que pour son dernier match de poule. À la 19e minute, Debuchy, redescendu pour l’occase, course Jordi Alba lancé en profondeur par Iniesta, mais trébuche au milieu du chemin, laissant l’arrière gauche centrer au deuxième poteau pour un Xabi Alonso complètement oublié. Pour sa centième sélection, le Madrilène claque une tête piquée et croisée qui enflamme le carré des supporters espagnols, tout proche (1-0). L’avantage quand on encaisse un but aussi tôt, c’est que ça laisse le temps de réagir. Après un court passage lors duquel elle semble sonnée et prête à en prendre un deuxième, la France se réveille. Alors que Benzema a envoyé mollement un ballon similaire au dessus de la barre quelques minutes plus tôt, Cabaye se charge de placer en pleine lucarne un coup franc de 20-25 mètres et oblige Casillas à la parade (31e). Sur le corner qui suit, San Iker, toujours décisif, s’impose encore en deux temps devant Koscielny puis Rami. Au milieu d’un lourd silence dans la Donbass Arena, on entend même les spectateurs français (apparemment de moins en moins nombreux au fil de la compétition), entamer un « Allez, Cabaye, tes supporters sont là » .
Une vraie défense centrale, trop tard
Les Bleus en blanc se surprennent carrément à avoir la maîtrise du ballon. Contre l’Espagne. Dominateurs, ils laissent tout de même planer quelques doutes sur leur capacité à égaliser. D’abord parce que Debuchy, sur son aile, peine quand même à créer des situations dangereuses. Ensuite parce que la relation entre Ribéry et Benzema, les deux maîtres à jouer, manque encore cruellement de fluidité, comme en témoignent les quelques pertes de balle très énervantes observées en début de seconde période. Alors que Lloris offre à tout le monde une sortie de grande classe devant Fàbregas, Blanc décide donc de mettre un coup de pied dans la fourmilière en remplaçant Debuchy et Malouda par Nasri et Ménez (65e). Mais la domination française s’est un peu estompée et les champions du monde ont finalement arrêté de vouloir jouer sans attaquant en lâchant Torres et Pedro dans l’arène. Rami et Koscielny sont forcés de prouver que la France a peut-être enfin une défense centrale solide : un sauvetage chacun sur des débordements trop faciles des Espagnols. Balle au centre.
On commence à flipper méchant et on a raison. Il ne se passe plus grand-chose sur la pelouse, Benzema n’a toujours pas commencé son Euro et Ribéry va jusqu’à redescendre spécialement pour voler un ballon à… Réveillère. Depuis le début de la préparation, tout le monde demandait à Laurent Blanc d’au moins tenter le coup du 4-4-2, il a fini par céder à dix minutes du terme en faisant entrer Giroud à la place de M’Vila. Mais tout était déjà terminé. L’association madrilo-montpelliéraine en pointe n’a rien apporté, la France n’avait tout simplement plus rien dans les chaussettes. Alors que l’écart d’un but permet encore de rêver, d’imaginer une montée du gardien sur le dernier corner et une explosion de joie, la faute de Réveillère, en retard sur Pedro, offre un penalty d’arrêt de jeu à l’Espagne. Lloris a l’occasion de montrer sa valeur par un coup d’éclat à l’issue d’une belle partie de sa part, malheureusement on ne retiendra que le contrepied que lui inflige Xabi Alonso pour son doublé. La France n’a finalement fait que ce qu’on attendait d’elle avant l’Euro : passer le premier tour et tomber. Avec ou sans son sélectionneur actuel, elle a maintenant deux ans pour bosser et se pointer au Brésil avec un jeu plus solide à proposer. À moins que l’Espagne ne lui pourrisse la vie encore une fois en éliminatoires.

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Par Thomas Pitrel, à Donetsk

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